Pete Sampras a disputé son dernier match à New York, en finale de l’US Open, le 8 septembre 2002. Il y avait battu Andre Agassi 6-3 6-4 5-7 6-4. Il venait de fêter ses 31 ans. Prendre sa retraite à cet âge-là n’avait alors rien d’étonnant. Et ce même si son rival, dont je parlais à la lige d’avant, a quant à lui quitté la scène à 36 ans. En revanche, si cela se passait de nos jours, les commentateurs, dont je considère faire partie, diraient que « Pistol Pete » est parti très tôt. Sans même parler de Roger Federer, Rafael Nadal, qui a fait la plus belle entame de saison depuis le début de sa carrière, va avoir 36 ans en juin. Novak Djokovic aura, lui, 35 ans en mai et semble encore loin de la retraite physiquement. Bref, plus ça va et plus l’âge de la retraite tennistique augmente.
C’est pourquoi, lorsqu’ Ashleigh Barty, à même pas 26 ans (elle les fêtera le 24 avril prochain), annonce qu'elle arrête, ça fait « kek chose ».
Tous ces ingrédients ne sont-ils pas suffisants pour offrir une motivation nécessaire
Le premier sentiment est l’étonnement. J’ai appris la nouvelle en ouvrant les yeux et en regardant mon téléphone, sur lequel j’avais reçu un message WhatsApp de mon fils, qui vit à l’autre bout du monde, avec 7 heures d’avance sur nous : « Ash Barty a pris sa retraite de joueuse de tennis professionnelle ». J’avoue que ce fut un choc. J’avoue aussi qu’Ashleigh Barty ne me fait pas du tout vibrer, et pourtant, ce fut bel et bien un choc d’apprendre cette nouvelle. Et je demeure soufflé par cette info.
Elle vient de remporter l’Open d’Australie, ce qui n’était plus arrivé à une Australienne depuis 1978 et la victoire de Christine O’Neil. Elle bat donc un record encore plus vieux (de 5 ans) que si un Français venait à remporter Roland-Garros cette année. Et ce, à l’âge de 25 ans. En plus de cela, elle avait déjà remporté deux autres titres du Grand Chelem, le premier à Roland-Garros en 2019, suivi de Wimbledon en 2021. Et pour couronner le tout (sans vouloir faire de mauvais jeu de mot), elle est l’actuelle numéro 1 mondiale. A un moment donné, on se demande ce qu’il lui faut de plus pour continuer. Tous ces ingrédients ne sont-ils pas suffisants pour offrir une motivation nécessaire afin de poursuivre des efforts, qui au passage, ne semblaient pas démesurés ?
D’où le second sentiment que me procure cette nouvelle : celui de la déception. En décidant de ne plus jouer au tennis alors qu’elle domine son sport et qu’elle n’a que 25 ans, Ashleigh Barty me déçoit. Comment peut-on se considérer comme quelqu’un de compétitif et arrêter comme ça ? Suis-je le seul à trouver que ce n'est pas logique ? Si une raison claire m’avait été donnée, peut-être n’aurais-je pas la même réaction, mais après l’avoir écoutée, je suis tout sauf convaincu. Elle dit ne plus avoir « la motivation physique, la volonté émotionnelle et tout ce qu'il faut pour se dépasser au plus haut niveau. Je suis épuisée. Je n'ai plus rien à donner au niveau physique ». A cela, je réponds que parfois, il faut aller au-delà. Je trouve qu’elle ne réalise pas bien à quel point elle est privilégiée. J’ai un peu l’impression d’entendre parler quelqu’un qui n’a pas envie de se faire mal. Et pourtant, c’est le jeu ma pauvre Ashleigh ! Et visiblement, tu l’avais bien compris. Alors pourquoi baisser les bras ?
De quels rêves s’agit-il ?
Elle avait toutes les cartes en main pour devenir l'une des plus grandes joueuses de tous les temps. Ben quoi ? Sur la base de 2 ou 3 titres en Grand Chelem par an, d’ici 10 ans, elle aurait pu se retrouver avec une vingtaine de titres en plus. Ce qui l’aurait rapprochée dangereusement du 24 de Margaret Court. Si ça, ce n’est pas une motivation nécessaire, alors je ne comprends plus grand chose. Encore une fois, si les explications avaient été plus compréhensibles, du genre « Je suis enceinte et je veux être multi-maman et à temps plein », ok. Mais elle n’a jamais parlé de ça. Tout ce qu’elle a évoqué est son désir de « poursuivre d'autres rêves qui n'impliquent pas forcément de voyager à travers le monde ». Ça manque de clarté cette phrase ! De quels rêves s’agit-il ? Fonder une famille ? Alors pourquoi ne pas le dire ? Se relancer comme joueuse de cricket ? Alors pourquoi ne pas le dire ?
Mais sans évoquer une raison précise, à l'exception d'une fatigue physique et mentale, qui se soigne par un break, elle laisse place à l’imagination. Et surtout, elle ne permet pas aux gens de vraiment la comprendre. J’espère, pour elle, qu’elle fait le bon choix. Mais pour le moment, je le trouve aussi incompréhensible qu’irrationnel.