Pour deux de ses propriétés, le diamant est un minéral très prisé. Sa brillance permet d’en faire une des pierres précieuses les plus chères au monde ; sa dureté, la plus élevée de la planète pour un matériau naturel, est recherchée pour équiper des foreuses. Iga Świątek et Carlos Alcaraz sont des diamants. Par leurs jeux, la reine et le roi de Roland-Garros 2024 éblouissent. Mais leurs qualités tennistiques ne seraient rien sans un mental d’acier. Ou plutôt, de diamant. Et, quitte à être tout à fait précis, on parle désormais davantage de « gestion des émotions » que de « mental » dans le jargon du sport de haut niveau.
Rafael Nadal, Roger Federer et Novak Djokovic l’ont eux-même raconté au détour de conférences de presse, ils ressentent également la pression, le stress, la tension dans les moments importants. Personne, pas même ces trois extra-terrestres, ne peut être d’une autre planète au point de réussir à se départir de toute émotion humaine. La différence entre les meilleurs et les autres, comme l’a plusieurs fois expliqué Djokovic, se fait justement dans la façon de gérer ces émotions. « La pression est un privilège », a souvent répété le Serbe, en reprenant l’intitulé d’un livre de Billie Jean King.
Swiatek est passée à un cheveu de la sortie au deuxième tour
Dans ce domaine, Świątek et Alcaraz sont passés maîtres. Ils l’ont une nouvelle fois prouvé au cours de leurs parcours respectifs sur l’ocre de la porte d’Auteuil. Avant d’arriver jusqu’à la coupe Suzanne-Lenglen, la Polonaise est passée à un cheveu de la sortie au deuxième tour. Contre Naomi Osaka, elle a écarté une occasion de 5-1 double break contre elle dans le troisième set, puis s’est retrouvée à 5-2, 0-30 sur son service avant de devoir sauver une balle de match à 5-3 engagement Osaka.
« J’ai connu beaucoup d’expériences durant lesquelles j’ai ressentie du stress ou une pression forte, a déclaré la numéro 1 mondiale après son titre. Mais j’ai été capable de les gérer, et on peut ensuite utiliser ce vécu lorsqu’on se retrouve à nouveau dans ces situations. Parce qu’on ne peut pas simplement se dire : ‘Oh, c’est ma cinquième finale de Grand Chelem, c’est bon, je suis habituée, je ne vais avoir aucun stress.’ Non, ça ne fonctionne pas comme ça. L’expérience aide également à gérer ces situations, c’est clair. »
Alcaraz a été mené deux sets à un en demie et en finale
Avant de faire planer la coupe des Mousquetaires au-dessus de sa tête, Alcaraz a lui aussi traversé des zones de turbulences. En demi-finale face à Jannik Sinner, il a été mené deux sets à un. En ressentant dans le premier, perdu 6-1, des débuts de crampes due à la tension et l’enjeu. Exactement comme celles qui l’avaient fait craquer l’an passé au même stade de la compétition face à Djokovic. « Oui, je dirais que suis plus fort mentalement, a analysé l’Espagnol suite à son succès devant Sinner. Je sais comment gérer ces situations. (...) J’ai tiré les leçons du match contre Djokovic, je savais que les crampes allaient disparaître en restant calme. »
En finale, il a de nouveau démontré des capacités mentales bigrement épastrouillantes. Alors que le score était de 5-3 en sa faveur dans la troisième manche, il l’a perdue 7-5 et s’est retrouvé mené deux rounds à un. En semblant perdre le fil du duel : il s’est trouvé des prétextes extérieurs, fait très rare chez lui, en ronchonnant quant à l’état du court. Jusqu’à s’en plaindre auprès de l’arbitre. Mais, très solide dans la caboche, il est parvenu à s’en relever. Ce que très peu d’autres joueurs auraient réussi à faire en finale de Grand Chelem, encore moins de cette façon, en collant un 6-1, 6-2 à un adversaire de la trempe d’Alexander Zvevrer dans les deux derniers actes.
Deux titres, et des records
« La force mentale est très importante dans ces moments, c’est pour ça que j’ai du succès dans les cinquièmes sets, je pense », a répondu le surnommé « Carlitos » devant les journalistes après son sacre. Parole d’expert. Il a remporté onze de ses douze combats en cinq rounds sur le circuit principal. Dont deux en finale de Grand Chelem. Et en trois rencontres à ce niveau, il s’est imposé autant de fois. De quoi devenir, à 21 ans et 35 jours, le plus jeune joueur de l’histoire à s’offrir trois Majeurs sur trois surfaces différentes - il a gagné l’US Open 2022 et Wimbledon 2023 -, devant Rafael Nadal, comme l’a souligné Jeu, Set et Maths.
Iga Świątek, elle aussi, a quitté Paris avec son (gros) lot de records. Elle est devenue, après Serena Williams en 2013, la deuxième joueuse à avoir triomphé à Madrid, Rome et Roland-Garros - les trois tournois féminins les plus prestigieux sur ocre - au cours d’une même saison. Dans la capitale française, en mettant fin à l'aventure de Jasmine Paolini, elle a inscrit son nom au palmarès pour la troisième fois d’affilée. Aucune femme n’a fait mieux, seules Justine Henin et Monica Seles ont fait aussi bien. Au total, elle a fait régner sa loi quatre fois à « Roland », soit autant qu’Henin, pour n’être plus qu’à deux longueurs de Steffi Graff et trois de Chris Evert. Et le plus « effrayant », c’est que la native de Varsovie n’a encore que 23 printemps. Bien qu’elle brille déjà de milles feux, elle est un diamant encore loin d’être totalement polie. Comme Carlos Alcaraz.
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