Le 15 décembre dernier, j’ai assisté à l’entraînement (de 3 heures) de Rafael Nadal, dans son Académie au Koweït. Au bout de 90 minutes, alors que Rafa enchaînait les services, il a soudainement été saisi d’une douleur au pied, l’obligeant à s’asseoir et à être immédiatement ausculté par son kiné Rafael Maymo. Tout à coup, tous les visages étaient fermés. Le très souriant et nouveau membre de l’équipe, Marc Lopez, faisait lui aussi la moue. A ce moment-là, et à 24 heures du tournoi d’Abu Dhabi, on ne se demandait pas si Rafa allait pouvoir enchaîner au Moyen-Orient, mais s’il serait prêt pour l’Open d’Australie.
Cinq jours et deux défaites plus tard (battu par Murray, puis Shapovalov à Abu Dhabi), Rafael Nadal annonce qu’il est positif au Covid. L’avenir australien s’assombrit de plus en plus pour l’Espagnol. Là, on se dit que le pied n’est pas encore remis, qu'il n’a pas joué depuis 6 mois, qu'il vient de choper le Covid... Bref, pas certain qu’il tente de se relancer sur un Grand Chelem, qui plus est à l’autre bout du monde et, cerise sur le gâteau, celui où Rafa a été le moins couronné. Mais ce serait mal le connaître. Le 31 décembre, soit 11 jours après avoir annoncé sa contamination au virus, ce Tweet est posté :
Bref, comme dirait Rafa :
Pour le coup, not in Rome, but in Melbourne.
Rafa n’est pas favori du tournoi car il est âgé, pas en forme, manque de rythme. Ce qui explique qu’au moment du coup d’envoi, les bookmakers lui donnent seulement une côte de 6,5 contre 2,5 pour Daniil Medvedev (le favori). Pour les non parieurs parmi vous, je vous rappelle que cela signifie que si vous pariez 1 smarties sur lui et que Rafa s’impose à Melbourne, vous en gagnerez 6,5.
252 victoires - 3 défaites, dont 233-2 en Grand Chelem !
Pas certain que Marcos Giron, Yannick Hanfmann, Karen Khachanov et Adrian Mannarino soient tout à fait du même avis que les « bookies ». Le premier vrai défi de Rafael Nadal survient en quart de finale face à Denis Shapovalov. L’Espagnol mène rapidement 2 sets à rien face au Canadien, mais connaît un coup de mou physique, en raison de la chaleur selon lui. Son entraîneur, Carlos Moya, annonce que Rafa a perdu 4 kilos après ce match ! Mais grâce à un refus de la défaite, au même titre que Roger Federer et Novak Djokovic, l’homme aux 13 Roland-Garros réussit à s’imposer au 5e set, face à un joueur encore un peu tendre et surtout... un fan de Rafa !
Enfin arrive cette demie face à Matteo Berrettini, également « team Rafa ». L’Italien, comme son adversaire du jour, avait mené deux sets à rien en quart de finale face à Gaël Monfils, avant de se faire remonter pour finalement s’imposer en 5 sets. L’Espagnol attaque ce match tambour battant. Dans les deux premières manches, il chipe à chaque fois directement le service de son adversaire. Psychologiquement, Nadal a démarré le match avec un clair ascendant sur l'Italien, qui lui, est plus spectateur. Contre Rafa, qui plus est en Grand Chelem, c’est une erreur à ne pas commettre. Même si vous êtes, comme Matteo Berrettini, Top 10. Après 1h30 de match, Nadal menait 2 sets à rien.
Berretteni retrouve de sa superbe au 3e. Le body language s'améliore, le jeu du fond avec et l’Italien parvient à prendre un set. Mais lorsque vous avez de l'autre côté du filet un champion du calibre de Rafael Nadal qui, au passage, détient une stat pas dégueu lorsque qu’il mène 2 sets à rien (252 victoires - 3 défaites, dont 233-2 en Grand Chelem !), il n’y a malheureusement plus grand-chose à espérer. Ce qui devait arriver arriva, et Nadal s’est ainsi qualifié pour sa 29e finale en Grand Chelem.
Quelques minutes après, toujours sur le court, l’Espagnol répondait aux questions de Jim Courier. L’Américain lui rappelle alors que s’il remporte la finale, Nadal rejoindra Djokovic, seul joueur ayant réussi jusque-là 2 Grands Chelems de carrière, mais surtout qu'il deviendra l’unique détenteur du record de titres en tournois majeurs, avec ce 21 tant désiré. Dans un registre qui lui est aussi familier que le décalage coup droit, Nadal rétorque : « Je veux juste gagner l’Open d’Australie. »
iI deviendrait l’unique recordman de titres en Grand Chelem avec 21.
L’opportunité de gagner à nouveau le titre à Melbourne, 13 ans après, touche visiblement une corde sensible chez Rafa. Car juste avant l’interview, alors qu’il rangeait ses affaires, une image a fuité furtivement. Nadal a eu un sanglot incontrôlable et immédiatement ravalé pour, bien sûr, ne rien montrer. Mais moi, je l’ai vu ! Regardez bien vers 4:20 :
Voici quelques chiffres clefs qui donnent encore plus d’envergure à l’exploit, en cours, de Rafa.
- Avec cette 6e finale, il devient le 3e joueur à avoir atteint le plus de fois ce stade à l’Open d’Australie derrière Novak Djokovic (9), Bromwich, Crawford, Emerson et Federer (7).
- Avec une 29e finale disputée en Grand Chelem, il se rapproche de Novak et Rodge, co-leaders du record avec 31.
- Il a remporté 6 des 7 demi-finales qu’il a disputées à Melbourne. La seule défaite à ce stade était face à... Jo Tsonga en 2008 !
- Il pourrait devenir le 2e joueur de l'ère Open ayant remporté tous les Grands Chelems au moins 2 fois.
- En cas de victoire en finale, il deviendrait l’unique recordman de titres en Grand Chelem avec 21.
Pour terminer, je ne peux pas m’empêcher de faire un parallèle avec l’US Open 2019. Cette année-là, Berrettini avait battu Monfils en quart, avant de chuter en demie sur Nadal, qui était ensuite allé s’imposer sur Medvedev en finale. L’histoire se répétera-t-elle ? C’est quelque chose qui a tendance à arriver.
Plus d’informations sur
Les joueurs
Novak Djokovic
Rafael Nadal
Roger Federer
Daniil Medvedev
Matteo Berrettini
Gael Monfils
Karen Khachanov
Marcos Giron
Yannick Hanfmann