Dominic Thiem sort la tête du trou

12 mai 2021 à 09:00:00 | par Mathieu Canac

Dominic Thiem sort la tête du trou
Diminué physiquement, rincé mentalement, Dominic Thiem a traversé une période compliquée en début de saison. Au point de dire stop après son échec à Dubaï, mi-mars. De retour sur le circuit lors du Masters 1000 de Madrid, l’Autrichien s’est lui-même surpris par sa performance. Cette semaine, à Rome, il espère monter en puissance afin d’atteindre son meilleur niveau à Roland-Garros.

 

À l’US Open, l’an passé, la carrière de Dominic Thiem a fait un grand pas en avant. Le seul hic, c’est que, sans le savoir, il était au bord d’un gouffre. Après son sacre en Grand Chelem, le but de sa vie, il est “tombé dans un trou”, a-t-il confié au quotidien autrichien Der Standard début avril. “Après l’US Open, j’étais dans un état d’euphorie, j’ai eu d’autres bons résultats, comme la finale du Masters, a-t-il détaillé. Puis, pendant l’intersaison, j’ai sombré. J’ai passé 15 ans de ma vie à chasser mon objectif (gagner un Majeur), en étant complètement centré sur ce but. J’ai laissé des choses sur le bord de la route : ma vie privée, m’ouvrir à de nouveaux horizons, découvrir de nouvelles choses… Il faut s’occuper de sa tête, son cerveau. Pour moi, il n’y avait que le tennis. Je veux changer ça.

De 13 ans jusqu’à mes 17, 18 ans, c’était assez dur : école, entraînement, devoirs, dodo. C’est tout, a-t-il raconté en conférence de presse en amont du Masters 1000 de Madrid. Et ça tout au long de l’année. Je ne regrette pas de l’avoir fait, mais j’ai raté certaines choses, comme passer un après-midi ensoleillé à refaire le monde avec des amis. J’ai plus de liberté désormais, alors j’essaie de le faire dès que je peux.” Agissant comme ce professeur de natation tyrannique qui vous repousse avec sa perche alors que vous essayez de rejoindre le bord, les restrictions sanitaires liées à la crise de la Covid-19 n’ont pas aidé le numéro 4 mondial. “Le coronavirus a enlevé tous les bons à-côtés de notre boulot, en commençant par les voyages, la liberté de déplacement”, a-t-il relaté pour le Der Standard.  

Coup de blues et repos

C’est difficile de jouer semaine après semaine dans ces conditions. Certains y arrivent très bien. Pour des gars comme Daniel Evans ou Alexander Bublik, par exemple, les bulles sont probablement un avantage. En temps normal, ils ont plus de mal à se concentrer sur le tennis. Là, c’est super pour eux, ils peuvent se focaliser uniquement là-dessus et rien d’autre (et ils ont de bons résultats). Je ne m'apitoie pas sur mon sort, je ressens simplement un certain vide, mais rien de grave.” Pour enrayer la chute vers les abîmes, le numéro 4 mondial, également enquiquiné par une douleur au genou, a décidé de prendre du repos. Suite à sa défaite dès son entrée en lice face à Lloyd Harris à Dubaï le 16 mars, il n’a repris sérieusement l’entraînement qu’à la fin du mois dernier.

Tous les joueurs sont différents, a-t-il expliqué à Madrid le 4 mai, après son retour à la compétition réussi face à Marcos Giron. Moi, avec mon jeu, j’ai besoin de mettre 100 % d’intensité et 100 % d’énergie. Je ne suis pas le gars qui peut s’en sortir tout le match grâce à son service, ou sans avoir besoin de mettre son intensité au maximum. J’ai besoin d’être à 100 % dans tous les domaines. À la fin de l’Open d’Australie, puis à Doha et Dubaï, je n’étais pas capable de mettre tout ça sur le court, il était donc préférable de faire une pause.” Même quand il a été au plus bas, il a toujours eu une bouée à laquelle se raccrocher. “Il y a eu des moments, en mars, où je me sentais vraiment mal, a-t-il poursuivi devant les journalistes.

Roland-Garros en ligne de mire

Mais, même à cette période, j’avais Roland-Garros (tournoi qui le fait rêver depuis l’enfance) dans un coin de la tête. J’ai toujours des ambitions élevées pour ce tournoi. A Madrid, mes attentes sont relativement basses, mais j’espère bien pouvoir les élever au fil des compétitions. Mon but est d’être au top pour Roland. Je pense ne pas avoir besoin de trop de matchs pour revenir (à son meilleur niveau).” Dans la capitale espagnole, malgré sept semaines sans compétition, il s’est hissé jusqu’en demi-finale grâce à des succès contre Marcos Giron, Alex De Minaur et John Isner, avant de mettre genou à terre devant Alexander Zverev, futur vainqueur. Un bon résultat, alors qu’il n’envisageait rien de grandiose pour ses débuts sur terre battue en 2021.

Je suis surpris, je ne m’attendais pas à aller aussi loin, a-t-il déclaré. J’espérais juste pouvoir jouer un ou deux bons matchs contre de très bon adversaires. Je suis assez satisfait par tous les aspects de mon jeu. Mes frappes du fond partent bien, je suis content de mon service, et mon retour, spécialement aujourd’hui (le 7 mai, en quarts de finale contre Isner), a été très bon. Je pense que je suis sur la bonne voie. Mais j’ai encore quelques petites choses à régler : être à 100 % dans le rythme du match, l’anticipation, etc.” Un optimisme resté intact dans la foulée de sa défaite - 6/4 6/4 - face à Zverev. “Je suis super heureux de ma semaine, a-t-il réitéré. Je n’aurais jamais pensé pouvoir arriver jusque-là et affronter un tel joueur. Je ne peux me plaindre de rien. Il était le meilleur dans cette rencontre. Maintenant, je vais m’entraîner pour Rome, en espérant y jouer encore mieux qu’ici (à Madrid).

Exempté de premier tour en qualité de tête de série numéro 4, le natif de Wiener Neustadt débute son aventure italienne face à Márton Fucsovics ce mercredi. Depuis le début de leurs carrières respectives, les deux hommes comptent trois affrontements l’un face à l’autre. Tous sur brique pilée : un sur le circuit principal à Hambourg en 2019, un en qualification de Challenger à Barcelone en 2014, un en Futures au Maroc en 2012. Bilan, trois succès de l’Autrichien. En cas de bon parcours au sein de la “cité éternelle" - où son meilleur résultat est une demi-finale en 2017 - il ferait le plein de confiance avant d’aborder Roland-Garros. En passe de sortir du gouffre dans lequel il est tombé, Dominic Thiem compte bien reprendre le travail entrepris depuis des années : faire son trou parmi les plus grands joueurs de la planète.

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