Février 2020 : c’est quand j’ai, pour la première fois, rencontré Luca Van Assche, à l’occasion du tout premier tournage pour la Team BNP Paribas Jeunes Talents. Comme vous pouvez le voir sur la vidéo ci-dessous, on était déjà pas loin, physiquement, du bonhomme actuel, aujourd’hui classé 91e mondial. En tout cas pas loin pour ce qui est du visage, parce que pour le reste, on était encore sur un ado en pleine croissance, à qui il restait deux voire trois bonnes années d’évolution physique. En revanche, au niveau juvénilité du visage, ça n’a, heureusement, pas trop bougé, même si les joues sont un peu moins rondes et les cheveux un peu plus en contrôle.
Depuis cette journée de tournage et cette rencontre très sympathique, il s’en est passé des choses. Il a grimpé tous les échelons au fur et à mesure des années, en passant par la victoire de Roland-Garros juniors en 2021, deux titres U18 de champions d’Europe par équipes avec Arthur Fils, Giovanni Mpetshi-Perricard et Gabriel Debru. Parallèlement, il effectuait ses premiers pas dans les tournois professionnels en Futures et Challengers. La première finale est arrivée fin 2021 au Future de Toulouse, puis le premier titre tout début 2022 au Future de Bagnoles de l’Orne. Il s’agira, au passage, de l’avant-dernier tournoi de cette catégorie auquel il participera. Sa première finale en « Chall » a eu lieu au Portugal, en septembre 2022. Puis, après deux autres perdues, il réussissait enfin à soulever un trophée sur le circuit secondaire, à Maia. Il y a ensuite, bien sûr, eu le Challenger de Pau et cette finale totalement incroyable, remportée face à Ugo Humbert. Et donc le dernier titre en date, celui d’hier, le 2 avril 2023, à Sanremo. C’est de celui-ci dont je souhaite vous parler.
Sanremo, un club typiquement italien
Plutôt que de me lancer dans un récit de stats et de records, je m’abstiendrai (même s’il y en a un qui me plaît particulièrement, j’y reviendrai plus tard), car je souhaite juste partager avec vous mon expérience.Suite à sa qualification en finale, j’ai envoyé un message à Luca, le félicitant et prenant un peu de ses nouvelles. Je lui ai demandé s’il y avait du monde et il m’a répondu que c’était plein. Du coup (et là je vous raconte un peu ma vie), comme j’habite pas loin de Sanremo, mais en France, je lui ai demandé s’il pouvait m’obtenir deux invitations, de manière à pouvoir aller le soutenir en finale. « C’est bon, m’a-t-il répondu. Deux places t’attendent à l’entrée, dis juste que tu viens de ma part. » La classe, nan ? Me voilà invité sur une finale par un des deux finalistes. Moi, je me sentais privilégié.
Après une heure de route, nous sommes arrivés (mon épouse et moi) dans ce club très joli et ultra tradi à l’italienne. Evidemment, tous les terrains sont en terre battue. Nombre d’entre eux, comme souvent en Italie, sont semi-enterrés, permettant d’avoir une vue plongeante sur le central lorsqu’on est attablé au restaurant en train de déguster des spaghetti alla carbonara (mais façon italienne, c’est-à-dire sans crème bien évidement), tout en sirotant un verre de biè——euh de San Pellegrino.
Sanremo se trouve dans la région de Ligurie, mais il s’agit ni plus ni moins des Alpes Maritimes italiennes. Comme dans le « 06 », les Alpes viennent se terminer dans la mer, ce qui oblige des constructions à niveaux. Du coup, au Tennis Sanremo, les différents terrains sont construits sur des niveaux distincts, tout ça entouré d’énormément de végétation (arbres, buissons, massifs fleuris), mais aussi cerné d’immeubles typiquement italiens, avec des tons pastel se fondant parfaitement dans la colline. Et quand on regarde de l’autre côté, c’est la « Grande Bleue » de bout en bout.
Nous nous présentons à l’accueil, moi fier comme un bar-tabac, en annonçant que nous avions des invitations à nos noms. Après quelques recherches… rien ! Je précise alors que c’est Luca qui les a laissées et la situation se débloque immédiatement. « Ah Luca ! Certo !! » Autant vous dire que le « bar-tabac » s’est transformé en mall à Dubaï tellement j’étais fier. Je vous rassure, je suis resté de marbre, en mode « j’ai l’habitude de ça ».
Après avoir acheté un sandwich « salame-parmegiano » agrémenté d’un filet d’huile d’olive (une tuerie) et du café - obligé quand tu passes en Italie (même si tu n’aimes pas ça, c’est trop bon de le commander) -, on s’est installé dans la petite tribune face à l’arbitre et aux deux bancs des joueurs. Tout était simple dans cette organisation (peut-être un peu trop), mais c’était très rafraîchissant. La différence avec le Challenger de Pau, qui est pourtant de la même catégorie, est assez étonnante. Car l’un ressemble à un ATP 250, tandis que l’autre s’apparente plutôt à une finale de tournoi interne. Mais au final, il s’agit des mêmes points : 125.
Sous un soleil pas très sûr de lui, Luca Van Assche a attaqué son échauffement d’avant-match juste derrière la tribune sur laquelle nous étions assis. Pas de garde du corps, ni de paparazzi, même pas des « bambini » pour lui réclamer un autographe, un selfie ou une raquette. Les joueurs se sont ensuite présentés à l’entrée du court, avant que le speaker ne les annonce l’un après l’autre, Luca bénéficiant du privilège d’être le second à pénétrer sur le court, alors qu’il affrontait la tête de série numéro 1 du tournoi : le Péruvien Juan Pablo Varillas.
Luca Van Assche s’est baladé en ce dimanche après-midi à Sanremo
Les 500 et quelques spectateurs présents n’avaient pas vraiment de chouchou parmi les finalistes, même si Luca, avec son italien fluenti, s’en était mis quelques-uns dans la poche tout au long de la semaine. En tout cas, en spectateurs officiellement identifiés Van Assche, il y avait son entraîneur Yannick Querré, quelqu’un d’aussi gentil que le sont tous les membres du clan Van Assche, et nous deux. Ça fait donc trois.
Peu importe, Luca n’a eu besoin d’aucun soutien, tant il a surclassé son adversaire de dix ans son aîné et classé 30 places au-dessus de lui dans la hiérarchie mondiale du tennis masculin. Après 10 minutes, le Français, né d’un papa belge et d’une maman italienne, menait 3-0. Après seulement 39 minutes, le score était de 6-1 en faveur de notre tête blonde. A l’issue d’un second set à peine plus disputé, celui qui aura 19 ans le 11 mai prochain, pouvait lever les bras au ciel.
Il venait d’empocher son 3e titre en Challenger, le deuxième en 125 et surtout d’affilée. En effet, le dernier tournoi auquel Luca Van Assche, AKA « le crabe », a participé était le Challenger de Pau. Son discours, comme je vous le disais un peu plus haut, il l’a fait en Italien. La preuve en image :
Suite à ça, il a signé tout ce qui se présentait devant ses yeux, fait tous les selfies souhaités, a offert un de ses T-shirts (qu'il a signé) à un ramasseur de balles et a bien sûr pris la pose pour toutes les photos « obligatoires ». Il est ensuite parti en courant vers son sac pour prendre son téléphone, en me demandant d’en refaire quelques-unes pour qu’il en ait à disposition sans devoir attendre celles des photographes qui promettent mais souvent oublient.
Luca Van Assche dans un groupe hyper sélect
J’ai réussi à échanger quelques mots avec lui entre deux selfies et trois autographes. Je l’ai félicité pour son entrée dans le Top 100 et il m’a immédiatement repris en précisant « 91e ». Ce qui m’amène donc à cette stat qui me plaît et dont je vous avais parlé en début d’article. Luca Van Assche, en intégrant le Top 100 avant l’âge de 19 ans, entre dans le club très fermé des joueurs français ayant réussi cet exploit, car c'en est bien un. Il devient en effet seulement le huitième à y parvenir, après Yannick Noah, Thierry Tulasne, Guy Forget, Henri Leconte, Fabrice Santoro, Richard Gasquet et Gaël Monfils.
Tous les joueurs susnommés ont ensuite, à un moment de leur carrière, intégré le Top 20. Du coup Luca, « en tous les cas, on te le souhaite » et surtout, merci pour les places.