Souvent comparé à une pieuvre en raison de ses bras tentaculaires semblant se démultiplier pour aller chercher des balles aux quatre coins du court, “l’octopus” Daniil Medvedev est aussi bernard-l’hermite. En l’absence de Rafael Nadal et Roger Federer, blessés, le Russe leur a chipé la coquille de rival numéro un de Novak Djokovic. “Une grande rivalité se développe sur le court entre Daniil et moi”, s’est exprimé le Serbe lors de la cérémonie de remise des trophées d’un superbe tournoi de Bercy. Tombeur du Russe 4/6 6/3 6/3 après un match d’une intensité à faire sauter EDF, le Serbe a remporté leur troisième duel de l’année. Les deux autres ? Deux finales, déjà.
L’une à l’Open d’Australie - victoire du Belgradois -, l’autre à l’US Open, où le Moscovite a empêché son adversaire de devenir le premier homme à remporter 21 Majeurs et le deuxième à réussir le Grand Chelem dans l’ère Open. Un combo qui aurait pu mettre la concurrence K.O. dans la course aux records les plus importants de l’histoire de ce sport. Dans leur face-à-face, Djokovic s’est imposé lors de six de leurs dix affrontements. Mais deux d’entre eux ont eu lieu en 2017. Depuis 2019 et l’émergence du surnommé “Danya” au plus haut niveau : quatre succès partout. “J’aime bien jouer contre lui, mais je ne sais pas s’il aime bien jouer contre moi (sourire)”, avait même lâché le protégé de Gilles Cervara après sa qualification pour la finale parisienne.
"Il (Meddvedev) se rapproche de la place de numéro 1, je sui sûr qu'il finira par y arriver" - Novak Djokovic
En arrivant dans la capitale française, le “Djoker” avait un objectif : s’assurer de terminer une année en tant que numéro 1 mondial pour la septième fois, et devenir seul détenteur du record devant Pete Sampras et ses six saisons finies au sommet du classement. Une mission accomplie en venant à bout d’Hubert Hurkacz en demi-finale. “J’ai ressenti un énorme soulagement en atteignant ce but, a-t-il confié en conférence de presse. Ça m’a permis d’être plus relâché aujourd’hui (dimanche, en finale contre Medvedev). Même s’il y a toujours de la pression quand on joue contre le numéro 2 mondial, qui est probablement mon plus grand rival actuellement, et que je voulais finir avec le trophée, aucun doute là-dessus.”
“Il (Medvedev) se rapproche de la place de numéro 1, a ajouté le Spider-Man du tennis. Je suis sûr qu’il finira par y arriver, et quand ce sera le cas, ce sera totalement mérité parce qu’il est le leader de sa génération, devant Zverev, Thiem, Tsitsipas, Rublev… (...) Mais il reste encore beaucoup d’années à venir, et j’aurai certainement l’opportunité de gagner d’autres titres du Grand Chelem”, a déclaré le monument de 34 ans, qui a plusieurs fois affiché son envie de poursuivre sa carrière jusqu’à la quarantaine. Au-delà d’un 37e sacre en Masters 1000, un record de plus devant les 36 unités de Rafael Nadal, l’enjeu était aussi de réaffirmer sa suprématie sur le circuit.
Alors qu’il n’avait plus rejoué depuis les larmes de New York, le patron voulait montrer qu’il était de retour au bureau. “On a senti qu’il voulait absolument gagner, a analysé Medvedev. Je savais qu’il voudrait prendre sa revanche (par rapport à l’US Open).” Et, malgré son triomphe aux États-Unis, le joueur de 25 ans savait qu’il n’aurait aucune emprise mentale sur son aîné. “Quand on connaît Novak, on a conscience qu’il est impossible d’avoir un ascendant psychologique sur lui", a-t-il affirmé. Une source d’inspiration. “Je prends exemple sur ça, a-t-il poursuivi. J’ai envie que ce soit pareil pour moi.”
"Novak, tu es un grand sportif et une belle personne" - Daniil Medvedev
“Andrey (Rublev), Grigor (Dimitrov) et Novak (Djokovic) sont les trois derniers joueurs qui m’ont battu. La prochaine fois que je serai face à eux, je ne veux pas qu’on se demande : ‘Est-ce que Danill va être un peu pris psychologiquement ?’” Rivaux sur le court, les deux hommes se sont toujours appréciés en dehors. “La première fois que je me suis entraîné avec Novak, je devais être environ 500e ou 600e mondial et lui était déjà numéro 1, avait raconté Medvedev lors de son discours après leur duel à Melbourne en début de saison. J’étais très timide, parce que le gars était un dieu pour moi, et il m’a tout de suite mis à l’aise en me traitant comme un ami.”
“Son attitude n’a jamais changé depuis, avait-il poursuivi. Il a toujours été le même avec moi, que je sois 500e ou Top 10. Novak, tu es un grand sportif et une belle personne. La seule chose que je peux te reprocher, c’est que tu étais en retard (sourire).” Ce dimanche soir, Djokovic a, une nouvelle fois, confirmé publiquement leurs affinités. “Ce que j’aime et respecte chez Daniil, c’est qu’il reste toujours vrai, fidèle à lui-même, a-t-il écrit sur Twitter. Il a une personnalité authentique, originale. Peu importe ce que les autres pensent, disent ou attendent, son cœur et son esprit sont toujours en accord avec ses valeurs.” Comme quoi, bien qu’ennemis sur le terrain, Spider-Man et le Docteur Octopus peuvent tisser des liens amicaux.
