La «  *Cinderella Story  » d'Aslan Karatsev

15 févr. 2021 à 09:54:00 | par Eli Weinstein

Parmi les quarts de finaliste de l'Open d'Australie 2021, il y en a un que personne n'aurait pu pronostiquer  : le Russe Aslan Karatsev. Présentation.

 

Si quelqu'un dans votre entourage a le culot de vous dire une phrase du genre « Je savais que Karatsev allait faire un truc  », j'ai une mauvaise nouvelle pour vous  : il ou elle est un gros mytho  ! Evidemment, il était totalement impossible de prévoir que le 114e joueur mondial ferait partie des huit derniers en lice pour le premier des quatre (on espère) Grands Chelems de l'année.

Mais qui est-il, ce Karatsev  ? Il est Russe. Un de plus, j'ai envie dire. D'ailleurs, qu'il y ait eu trois joueurs russes en huitièmes de finale de l'Open d'Australie (tous les trois désormais en quarts  : une première tous Grands Chelems confondus depuis l'ère Open) est, dans l'ère Open, tout simplement du jamais vu. Les trois Russes sont évidemment ceux qui, il y a dix jours, ont remporté l'ATP Cup. Il n'y a pas de hasard.

Novak Djokovic faisait des compétitions de pompes sur son balcon

Mais revenons à Karatsev. Il a 27 ans et est joueur de tennis professionnel depuis 2012. Il fêtera ses 28 ans le 4 septembre prochain et est natif de Vladikavkaz sur la frontière géorgienne, entre la mer Noire et la mer Caspienne. C'est un joueur qui a évolué quasi exclusivement sur le circuit secondaire voire tertiaire. Il est très offensif, adepte des points en deux ou trois coups de raquettes maximum. Il possède un gros service et frappe très fort des deux côtés du fond du court, avec des trajectoires très à plat.

Sa participation dans le tableau final de l'Open d'Australie est la première de sa carrière. C'était une question de temps, car il montait en puissance. Au moment où tout s'est arrêté en mars dernier, Karatsev était classé 253e mondial. Durant cette pause, il a remporté 17 matches d'exhibition sur 23 disputés. Lorsque le circuit a repris, il a été immédiatement récompensé avec une finale (perdue face à Wawrinka) et deux victoires sur le circuit Challenger. A partir de cette reprise, il a terminé l'année en trombe avec 18 victoires sur 20 matches joués en Challengers (et quelques tentatives moins fructueuses sur le circuit principal), dont 16 sans perdre un set.

2021 démarre alors pour lui avec les qualifications de l'Open d'Australie à Doha. Il se qualifie en concédant un seul set en 3 matches. Il arrive ensuite en Australie avec les punis, ceux contraints de respecter une quarantaine stricte. Donc pendant que Novak Djokovic faisait des compétitions de pompes sur son balcon, ou que Grigor Dimitrov (son adversaire en quart de finale) sortait pour s'entraîner 5 heures par jour, Aslan restait, au même titre que les Benoît Paire et compagnie, dans sa chambre à ronger son frein. Une fois libéré, il n'y avait plus rien pour arrêter l'homme d'Ossétie du Nord.

Il en déjà remporté 400 000 de plus !

Comme on peut le constater dans ses conférences de presse, Aslan n'est pas le plus bavard de la troupe.

 

 

Vous me direz, c'est somme toute assez classique pour un Russe. Gilles Cervara, entraîneur de Daniil Medvedev, l'a un peu côtoyé à l'occasion de l'ATP Cup. Il était conquis par son jeu et lui avait glissé «  La seule question est de savoir qui va jouer avec toi en double  », ce qui avait eu le mérite de le faire sourire. Cervara raconte  : «  Le reste de l'équipe s'est marré parce qu'il est assez introverti, et Daniil et les autres étaient surpris que j'aie réussi à le faire parler.  »

Sa performance australienne, au-delà d'être formidable, est un enchaînement de premières. Premier tableau final en Grand Chelem, première fois qu'un «  rookie  » en Grand Chelem atteint un quart de finale depuis 1996 et le Roumain Alex Radulescu à Wimbledon, premier qualifié à atteindre les quarts de finale à Melbourne depuis un certain Goran Ivanisevic en 1989  ! On continue : il est le premier joueur aussi mal classé à atteindre les quarts de finale à Melbourne depuis Patrick McEnroe en 1991. Petit clin d'oeil de l'histoire, PatMac était aussi classé à la 114e place ! Ah oui, son match contre Félix Auger-Alliassime était également son premier match en 5 sets, sa première victoire en 5 sets. Et forcément, c'est donc aussi la première fois qu'il a remporté un match après avoir été mené 2 sets à rien.

Pour terminer, voici une stat qui me plaît, mais qui doit lui plaire encore plus  : en 9 ans de carrière, Karatsev avait remporté 618 354 $ de prize money. En une semaine à Melbourne, il en déjà remporté 400 000 de plus !

C'est peu de dire qu'il n'a rien à perdre face à Dimitrov en quart de finale. Et franchement, j'espère que cette «  *Cinderella story  » ne s'arrêtera pas là.

 

*Cinderella : Cendrillon

 

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