1979 : New York, New York

Le tennis en bas des tours avec Vitas Gerulaitis à New York

Vitas Gerulaitis, on le connait pour ses frasques  : il a dilapidé la majorité de ses 2,7  millions de dollars gagnés en carrière dans des voitures (une Lamborghini, une Ferrari, une Mercedes, une Porsche et deux Rolls-Royce, dont une jaune, comme ses cheveux, ornée d’une plaque d’immatriculation « VITAS G. »), des vacances onéreuses, des soirées débridées au Studio 54 et des drogues. Un jour, l’ancien joueur Paul McNamee, l’un de ses amis les plus proches, déclara même : « Quelqu’un qui bossait chez American Express m’a dit qu’une année, il figurait dans ses registres comme le troisième plus gros client dépensier au monde. » Mais en 1979, au lendemain d’une victoire 5-0 en finale de Coupe Davis contre l’Italie, l’Américain décide de monter la Vitas Gerulaitis Foundation. L’objectif ? Rendre le tennis plus accessible aux enfants des cinq quartiers de New York – Manhattan, Brooklyn, le Queens, le Bronx et Staten Island. Parce que derrière le masque de « Broadway Vitas » se cachait un homme issu d’une famille lituanienne qui avait dû fuir le pays au moment de son invasion par les forces russes en 1939, débarquer en Autriche avec une simple valise à la main et troquer les bijoux maternels sur le marché noir contre des tickets de rationnement. « Vitas voulait amener le tennis aux enfants des quartiers isolés de New York, alors il formait une petite bande qui écumait ses cinq quartiers tous les étés, racontait en 2014 à l’ATP Mary Carillo, proche de l’Américain et de sa sœur, Ruta. On offrait des raquettes. Vitas a réussi à convaincre chaque grande star du tennis de donner de son temps, d’Arthur Ashe à Bjorn Borg, Chris Evert et John McEnroe, Ilie Nastase et Jimmy Connors. C’était son meilleur visage. » Vitas multipliait les exhibitions et les dîners de charité, histoire d’allier l’utile à l’agréable. Son fonds pour la jeunesse, Gerulaitis Foundation Youth Clinic, a aidé des centaines d’enfants newyorkais à se mettre au tennis, et surtout lancé une dynamique dont les fondations de Roger Federer, Rafael Nadal ou Novak Djokovic sont aujourd’hui les réminiscences. « Vitas a été le premier à donner des raquettes aux enfants, témoignait sa grande amie Billie Jean King à l’ATP, en 2019. On a perpétué cette tradition à la ligue World Team Tennis en offrant des raquettes gravées à son nom. C’était une manière pour nous d’honorer l’homme, le joueur, l’amoureux du tennis et le très bon ami qu’il était. » Retraité à 31 ans après une carrière jamais réellement considérée à l’égal de celle de ses pairs (25 titres, mais 29 finales perdues), Gerulaitis est mort à 40 ans, intoxiqué dans son sommeil au monoxyde de carbone par le chauffe-piscine défectueux d’un ami chez qui il dormait. La veille, il assistait à un événement caritatif.