Togo, terre d'avenir avec Félix Auger-Aliassime
Il n’y était pas revenu depuis ses 13 ans. Mais Félix Auger-Aliassime se souvient de son premier séjour dans la préfecture de Sokodé, au Togo, comme si c’était hier. C’est dans cette région centrale du pays que son père, Sam, a grandi, avant d’émigrer au Canada au milieu des années 1990. « J’avais vu des choses dures lorsque je m’étais rendu là-bas, même si c’est un État très stable avec plein de bonnes choses, expliquait-il alors. Je m’étais dit que si je réussissais dans ma carrière, j’aiderais les jeunes à réaliser leurs rêves en leur permettant d’avoir les opportunités que j’ai pu avoir au Canada. Quand tu aides quelqu’un dans le besoin, tu lui donnes une chance, et il aidera peut-être un jour son prochain car on lui a montré le chemin. » Pour ce faire, le natif de Montréal a travaillé avec BNP Paribas à l’élaboration d’un projet commun, le FAAPointsForChange : à chaque point gagné en match officiel, il donne cinq dollars à EduChange, un programme visant à améliorer les conditions de vie et d’éducation des enfants togolais, cette somme étant elle-même augmentée de quinze dollars par BNP Paribas. Pour déterminer où et comment les moyens mobilisés par l’initiative devaient être investis, Vincent-Baptiste Closon, le directeur des partenariats sportifs de BNP Paribas, s’est rendu à Montréal en 2019 afin d’établir avec Félix et sa famille les modalités du projet : « Nous avons échangé en amont à de nombreuses reprises et Félix nous avait demandé de travailler en priorité pour l’éducation des enfants. Nous avons finalement décidé d’intervenir au Togo, le pays de son père, Sam. Nous avons identifié une ONG, Care, qui était la plus à même de nous accompagner et nous avons choisi de nous concentrer d’abord sur la région de Kara, qui est la plus pauvre du pays, celle qui a le plus de besoins. »
Depuis le lancement du programme en 2020, les plus de 18 000 points glanés par le 6e mondial auront permis de reverser plus de 360 000 euros à des actions humanitaires sur place. L’argent mobilisé aura notamment profité à dix villages. Dix terrains de sport ont été rénovés, autant d’écoles réhabilitées, 80 enseignants formés et dotés en matériel et des centaines d’enfants ont reçu de l’aide alimentaire, vestimentaire, médicale ou psychologique. Fin novembre 2022, plutôt que de prolonger la fête avec ses équipiers après la victoire du Canada en Coupe Davis, Félix Auger-Aliassime avait ainsi préféré aller au Togo pour constater les fruits de son engagement : « Depuis trois ans, on m’envoie des photos et des comptes rendus, mais ce n’est pas la même chose de le vivre, de le sentir, de discuter sur place avec les jeunes qui bénéficient du projet », expliquait-il alors. Accompagné de son père, de membres de l’ONG Care et de Vincent-Baptiste Closon, le Canadien s’était rendu dans plusieurs villages où l’initiative est déployée. Au programme : des visites d’écoles et de centres d’apprentissage, des rencontres avec de nombreux élèves et apprentis et des échanges prolongés avec les leaders des communautés locales. Des danses en costume traditionnel avaient célébré la venue du Canuck, également ponctuée de matchs de football auxquels Félix a joyeusement pris part. Très concrètement, de nombreux jeunes ont été sauvés par le projet. Comme l’histoire d’une petite jeune togolaise, couturière, infiniment timide, qui avait fui pour le Bénin afin de trouver du travail puisqu’elle n’avait plus de quoi vivre dans son village. Dès lors, le projet lui a permis de rentrer chez elle et de sortir de la rue. Elle avait même fait une petite tenue pour Malika, la sœur de Félix, afin de le remercier.Une expérience unique pour le joueur de 22 ans, qui a désormais de la suite dans les idées : « C’était un magnifique voyage, hyper-enrichissant, avait-il alors confié à L’Équipe. J’ai aussi vu ce qu’on pouvait améliorer et peaufiner là-bas. Ce n’est qu’un début, j’espère construire quelque chose de solide ici. » À terme, Félix espère notamment que les fondations posées par le projet puissent permettre à ses bénéficiaires de mettre ensuite leur propre pierre à l’édifice : aujourd’hui, 80 apprentis sont devenus tisserands, menuisiers, soudeurs, formés auprès de professionnels financés par le programme. Pour assurer la continuité de l’initiative, Félix Auger-Aliassime sait par ailleurs parfaitement ce qui lui reste à faire : continuer de gagner beaucoup de points, raquette en main.
Quand tu aides quelqu'un dans le besoin, tu lui donnes une chance, il aidera peut-être un jour son prochain car on lui a montré le chemin