Hurkacz n’est pas parvenu à faire ce qu’avait réussi Connors : remplacer un arbitre

3 juin 2024 à 18:52:09 | par Mathieu Canac

Dimanche, à Roland-Garros, Hubert Hurkacz, frustré par une décision, a demandé à Grigor Dimitrov s’il était d’accord pour changer d’arbitre.

Des cercles à l’intérieur d’un rectangle. A priori, une plaque de cuisson n’a rien à voir avec un terrain de tennis. Elle est, à la rigueur, bien plus proche du tracé d’un terrain de hockey sur glace. Pourtant, le court a un point commun avec cet appareil chauffant : il est capable de faire fumer les émotions des cocottes-minute les plus résistantes. À tel point que certains joueurs - amateurs comme professionnels - calmes et adorables au quotidien, se transforment en utilisant leur bouches comme soupapes pour évacuer la furie d’une frustration générée par la pression. « Le tennis rend fou » ; même Hubert Hurkacz, considéré comme l’un des joueurs les plus fair-play du circuit.

S’il l’a fait dans le calme, le Polonais a perdu la raison au cours de sa défaite 7-6⁵, 6-4, 7-6³ en huitième de finale de Roland-Garros contre un Grigor Dimitrov en pleine forme depuis fin 2023. En prenant l’arbitre pour une balle, une raquette, une paire de chaussure… Bref, comme un vulgaire objet qu’on peut changer durant un match. Au changement de côté à 6-5 dans le dernier set, suite à une contestation - sur laquelle Alison Hughes avait pourtant raison -, le Polonais a offert une scène tragicomique, en tentant une requête qui a laissé son compère bulgare interloqué.

« G, tu veux changer d’arbitre ? » - Hubert Hurkacz

« G (le surnom de Grigor Dimitrov), tu veux faire un changement, ou tu veux continuer avec la dame qui est ici ? », a-t-il lancé, sans même regarder la patronne du jeu, comme si elle n’était qu’un élément inanimé du décor livré avec la chaise.
- Continuer avec quoi ??
- Je demande si tu veux continuer avec la dame ici présente, ou si tu veux changer ? Je te laisse décider.
« Honnêtement, peu importe, comme tu veux », a conclu Dimitrov, avant de se lever pour aller parler à son ami - « Je connais ‘Hubi’ depuis pas mal d’années, on s’entraîne souvent ensemble, on partage beaucoup de moments », s’est-il exprimé lors de l’interview sur le court -, afin de le rassurer et lui dire qu’ils allaient poursuivre l’aventure avec Mme Hughes.

Si l’ancien numéro 3 mondial avait été d’accord, les deux hommes auraient pu, pour réclamer un nouveau maître du jeu, faire appel au superviseur. Ce dernier ayant autorité pour « révoquer un arbitre de chaise quand il juge cela nécessaire pour améliorer l’arbitrage d’un match ». Une requête aux chances d’être acceptées proches du néant. Nick Kyrgios pourrait en témoigner, lui à qui il est déjà arrivé, au sommet de sa furie, d’exiger un remplacement. Mais pour en venir à de telles mesures, il faudrait que la rencontre soit plongée dans un chaos absolu sur lequel l’homme perché n’aurait plus aucun contrôle. Comme lors de l’US Open 1979.

Connors, lui, avait réussi à faire remplacer un arbitre

Au deuxième tour du Majeur new-yorkais, Ilie Năstase et John Mcenroe avaient fait sombrer le stade dans une apocalypse telle que le juge-arbitre en personne, Mike Blanchard, avait remplacé l’arbitre de chaise, Mike Hammond. Un duel marqueur dans l’histoire du tennis, puisqu’il avait mené les instances à durcir le code de conduite imposé aux joueurs. Toutefois, la substitution ne s’était pas opérée suite à une demande du Roumain ou de l’Américain. Blanchard avait décidé de son propre chef de venir (tenter de) faire régner la loi. Néanmoins, il existe au moins un exemple de joueur étant parvenu à dégager un patron des règles : Jimmy Connors.

En octobre 1982, en demi-finale du tournoi de Sydney, « Jimbo » l’atrabilaire et son adversaire, Gene Mayer, après moultes contestations, avaient fait trois appels au superviseur, Bill Gilmour. « L’un de nous deux (l’arbitre, Peter Duncan, et lui-même) doit partir !  », s’était emporté Connors la première fois, comme rapporté dans une archive de l’Union Press International. La seconde avait été à l’initiative de Mayer, et lors de la troisième, Connors avait hurlé « Ce gars (l’arbitre) n’a aucun contrôle sur le match depuis le premier jeu, je veux qu’il sorte ! ». Il avait fini par avoir gain de cause (ce qui ne l'avait pas emêcher de perdre la partie). Ce jour-là, sous la pression d'une Connors-minute une fois de plus en train d'exploser, c'était l’arbitre qui avait servi de soupape.

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