Comment écrire un article sur le BNP Paribas Open sans évoquer le cas de Naomi Osaka, qui a totalement craqué sur le Stadium 1, samedi dernier, face à Veronika Kudermetova ? Et quand je dis « craqué », je pèse mes mots.
Voici ce qui s’est passé chronologiquement :
Alors commençons par la première vidéo avec le « You suck Naomi » (T’es nulle Naomi). Ces mots ont été prononcés par une femme ayant sans doute un peu trop abusé de Miller light et qui a hurlé cette phrase avec beaucoup trop de véhémence pour un stade qui était loin d’être plein et qui, en plus, est doté d’une acoustique de très grande qualité. Bref, tout le monde a parfaitement entendu les mots prononcés par cette sympathique personne, et en premier lieu Naomi Osaka.
Il faut préciser que le reste du stade était derrière la Japano-Haïtienne. Quand bien même, cette personne isolée a réussi à totalement déstabiliser la quadruple vainqueur en Grand Chelem, qui a subi toute la première manche tennistiquement, mais également émotionnellement. Osaka était en larmes du début à la fin de ce set qui lui a échappé 6-0 en 31 minutes.
Il faut préciser qu’à la fin du premier jeu, Osaka s’était approchée de l’arbitre de chaise, lui demandant si elle pouvait lui emprunter son micro pour répondre à la fameuse spectatrice. Cette demande a été rejetée par le tournoi. Du coup, la 78e joueuse mondiale a réfléchi à la façon dont elle pourrait s'adresser au public. La solution était toute trouvée : il suffisait de gagner et de profiter de l’interview d’après-match sur le court pour dire ce qu’elle avait sur le cœur. Problème, elle n’a pas réussi à gagner. Certes, la qualité de son tennis s’est améliorée et les larmes du premier set ont séché. Néanmoins, le mal était fait et elle n’a pas réussi à refaire son retard. Au final, elle s’est inclinée 6-0 6-4 en 1h17.
Très clairement, le match est devenu anecdotique dans l’esprit de celle qui a battu Serena Williams en finale de l’US Open 2018. Tout ce qu’elle voulait, c'était s’emparer du micro pour s’adresser à la planète. Il a fallu qu’elle attende que son adversaire réponde aux trois questions du speaker, avant de s’avancer pour faire son « statement ». Kudermetova, pour le coup, est restée pour assister au spectacle.
Voici ce qu’a ensuite dit Naomi Osaka, à nouveau en larmes :
« Je voulais seulement vous dire merci, a-t-elle murmuré sous les applaudissements nourris du public. (Ses yeux se remplissent alors de larmes). Je crois que j'ai suffisamment pleuré devant des caméras... (Elle s'arrête). Pour être honnête, j'ai déjà été chahutée par le passé sans que ça ne me dérange vraiment, mais être chahutée ici... J'ai regardé une vidéo de Venus et Serena (Williams) se faisant chahuter ici. Si vous ne l'avez jamais regardée, vous devriez le faire. Je ne sais pas pourquoi, mais c'est rentré dans ma tête. C'était en boucle dans ma tête. J'essaie de ne pas pleurer... Je veux simplement vous dire merci. Et (en s'adressant à Kudermetova, restée au bord du court) félicitations. Juste merci. »
Tout ça n’est pas très compréhensible. On a vraiment l’impression d’être en présence d’une jeune femme qui est complètement perdue et surtout en grande souffrance. A travers son speech, elle essaie d’expliquer que si elle a été à ce point affectée par les paroles de la personne éméchée, c'est parce qu’elle se repassait en boucle le scénario des sœurs Williams qui, en 2001, ont été copieusement sifflées, voire plus. Pour rappel, les deux sœurs devaient s’affronter en demi-finale, mais Venus s’était retirée 20 minutes avant le match en raison d’une blessure au genou. Autant dire que ce forfait de dernière minute n’a pas du tout plu au public chaud (en raison du soleil mais aussi de la vente d'alcool qui est autorisée dans le stade), qui a tout de suite cru à un complot de la part de Richard Williams - le père, d’ailleurs si vous avez l’occasion, allez voir le film King Williams et vous découvrirez de plus près ce personnage qui y est pour beaucoup dans la réussite de ses filles -, connu pour être un chouia machiavélique.
Voici la vidéo dont parlait Osaka :
Je pense que Naomi Osaka doit faire un grand break et prendre le temps de se poser les bonnes questions concernant sa vie et la façon dont elle souhaite la mener. Actuellement, ça ne tourne clairement pas rond et ça fait un petit moment que ça dure. Souvenez-vous de Roland-Garros l’an dernier et de son forfait en plein tournoi, pour cause de « trop de pression ».
Il faut qu’elle s’éloigne de ce monde qui, pour le moment, ne lui convient pas et qu’elle y revienne uniquement lorsqu’elle en ressentira l'envie et le besoin. Mais sera-t-elle alors capable de redevenir la joueuse exceptionnelle qu’elle était lorsqu'elle avait atteint la place de numéro 1 mondiale ?
A voir, mais en attendant, il faut prendre du recul de manière urgente.
