Innes Ibou interpelle Dominic Thiem

11 mai 2020 à 14:31:00

Innes Ibou interpelle Dominic Thiem
L'Algérienne Ines Ibbou, classée 620e au classement mondial, a remporté 27 825 $ depuis qu'elle est passée pro il y a 7 ans. Quand on sait qu'une année sur le circuit représente plus de... 30 000 € de frais, on comprend mieux pourquoi elle a été choquée par les déclarations de Dominic Thiem.

Il y a de forte chance que vous n'ayez jamais entendu parler d'elle, jusqu'à ce que, comme moi, vous découvriez sa lettre ouverte et émouvante adressée à Dominic Thiem.

Vous ne l'avez pas lue/vue ?

Alors, s'il vous plaît, regardez, écoutez, lisez, puis revenez pour qu'on en discute.

Que dire  ? Qu'en penser  ?

En premier lieu, je voudrais dire que je trouve la réalisation de cette vidéo très réussie. Tant sur le fond que sur la forme. Cette fille est particulièrement touchante. Sa diction est simple et respire la sincérité. Ses fautes d'anglais sont elles aussi touchantes et ne font qu'amplifier son message.  Celui d'une joueuse mal classée qui se bat pour garder son rêve en vie.

La forme est vraiment très moyenne

Dans une interview accordée à l'Equipe, l'Algérienne explique qu'elle a été vexée par les propos de Dominic Thiem, qui a notamment expliqué qu' «  aucun de ces joueurs mal classés ne lutte pour survivre. Toute l'année, j'en vois beaucoup qui ne donnent pas tout au tennis. Beaucoup ne sont pas très professionnels. Je ne vois pas pourquoi je devrais leur donner de l'argent ».  Thiem a précisé sa pensée :  «  Je préfère donner à des gens ou des institutions qui en ont vraiment besoin. Aucun métier au monde ne vous garantit un gros succès au début de votre carrière. Aucun des top joueurs ne se considère comme arrivé, rien n'est assuré et nous devons nous battre continuellement pour notre classement.  »

Il ne s'agit pas de dire que Dominic Thiem a tort ou raison, même si j'ai ma petite idée sur la question, mais la forme est vraiment très moyenne. Prenez Matteo Berrettini, qui s'est récemment exprimé sur le problème. Il rejoint Thiem sur le résultat final, mais pas du tout quant à la manière d'y arriver :  «  Je préfère aider des situations plus complexes, comme un hôpital, une famille en difficulté, plutôt qu'un joueur de tennis  »,  avant de poursuivre  :  «  Il y a beaucoup de joueurs qui ont besoin d'aide et passent dans le rouge. Le projet est très positif pour le tennis et montre que les joueurs se soucient aussi de leurs collègues de l'arrière.  »  Là, c'est propre et respectueux. 

S'assurer qu'il n'y ait plus d'Ines Ibbou

Mais si Thiem avait fait une telle réponse, Ines Ibbou aurait-elle été suffisamment touchée pour prendre sa plume et son logiciel de montage pour s'exprimer ? Probablement que non. Si Ines Ibbou ne s'était pas exprimée, aurait-elle reçu des messages de soutien de Nick Kyrgios, Venus Williams et d'autres ?

Dominic Thiem n'était que l'excuse pour écrire cette lettre et exprimer sa colère. En réalité, Ines, comme beaucoup d'autres joueurs et joueuses mal classés qui passent leur temps à voyager d'un tournoi insignifiant à un autre, ont besoin d'être plus soutenus, par leur fédération nationale et internationale. Evidemment que tout cela est très complexe et que tout ne va pas se régler d'un coup de baguette magique. Mais le moment est propice à un changement profond. Revoir le système. S'assurer qu'il n'y ait plus d'Ines Ibbou. Evidemment que le sport pro est, de fait, le milieu le plus compétitif qui existe, et que même Dominic Thiem est en droit d'estimer qu'il mérite chaque centime qu'il a empoché. Mais ce n'est pas pour autant qu'il ne faut pas être solidaire. Tout les joueurs et joueuses mal classés ne sont pas des branleurs et d'ailleurs, je suis même prêt à parier qu'ils sont en minorité.

Peut-être qu'Ines Ibbou pourrait se présenter au Players' Council de la WTA, elle aurait ma voix, ça c'est certain.

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