Avoir 36 ans et disputer un Grand Chelem n'est pas toujours synonyme d'éclater tout le monde et forcer le respect de toute la planète. Ce type de destin est en général réservé à un ou deux bonshommes. Pour les autres, le commun des mortels, c'est plus compliqué. Et pour « eux », il est déjà bien beau de pouvoir concourir dans le tableau final d'un majeur.
Parmi « eux », il y a un certain … Nicolas Mahut.
Hier, l'Angevin a lâché une petite bombe discrète en conférence de presse, à l'issue de sa défaite face à Juan Martin Del Potro : « Il y avait cette possibilité que ce soit mon dernier. J'avais du coup envie de savourer les derniers instants. » !
Waouh !!!!! Cette phrase est lourde de conséquence. Si, en effet, Nico Mahut est en train, en "loucedé", de faire sa dernière saison en simple et surtout, s'il vient de jouer son dernier Roland-Garros en simple, il mériterait qu'on s'attarde sur son cas.
Quand on pense à Nicolas Mahut, évidemment la première chose qui vient à l'esprit est son match face à Isner à Wimbledon qui a duré 32 ans et qui s'est terminé 70-68 au 5e set. Ce match restera gravé à vie pour tout le monde et plus particulièrement chez ces deux joueurs. Cinq ans après, Isner disait : « Avant le match, je ne le connaissais pas. Depuis le match, nous sommes devenus très proches. Ma mère l'adore. C'est une des personnes les plus authentiques que je connaisse. Je n'aurais pas pu rêver meilleur adversaire pour ce match. ». Ce match a créé un lien éternel entre les deux hommes.
Mais la carrière de Nicolas Mahut ne se résume pas uniquement à un moment d'histoire. C'est surtout l'histoire d'un garçon plein de talent qui n'a percé que tardivement. En 2008, il effectue un bref séjour à la 40e place. Avant de rechuter. Il retrouve ce niveau en 2014 et s'y installe de manière plus pérenne. Ce retour dans le Top 50 coïncide avec sa toute première victoire en tournoi à 31 ans, à s-Hertogenbosch sur gazon. Il enchaîne avec Newport, quelques semaines plus tard. Ses deux autres victoires (2015 et 2016), encore et toujours à s-Hertogenbosch. Le fait que tous ses titres aient été gagnés sur gazon est tout sauf une coïncidence. Mahut, c'est un attaquant. Ce qui explique aussi ses deux finales à Newport et aux Queen's (gazon encore une fois).
Son jeu d'attaque, en plus de lui avoir offert des titres sur gazon, lui a aussi permis d'atteindre des sommets en double. C'est aux côtés de Pierre-Hugues Herbert qu'il obtient ses meilleurs résultats, avec notamment deux titres du Grand Chelem (US Open et Wimbledon), six Masters 1000 et trois qualifications aux Masters de Londres. Le 6 juin 2016, il atteint la première place mondiale en double.
En Coupe Davis par BNP Paribas, Nico a fièrement représenté la France avec sept victoires et deux défaites en double. L'année dernière, à la surprise générale, il n'est pas sélectionné par Yannick Noah pour disputer la finale. C'est pour lui un crève cœur : déjà parce qu'il avait participé à toute la campagne, mais surtout parce qu'il est un amoureux inconditionnel du maillot de l'équipe de France.
Mais le plus important chez Nicolas Mahut, et John Isner en a parlé plus haut, c'est sa classe et sa gentillesse. Ces deux qualités ont été parfaitement illustrées à Lille durant la semaine de la finale. Le mercredi soir qui précède, Noah réunit tout le monde autour de la table et annonce ses quatre joueurs. Un long silence de mort s'ensuit, car tout le monde est abasourdi. C'est Mahut qui rompt ce moment de malaise en disant : « Il ne faut pas avoir une tête d'enterrement, on a une finale à gagner ! ». C'est paradoxal, car c'est lui que Yannick Noah venait d'enterrer. Le samedi avant la fin du double, Mahut souffle à Herbert de servir « kické ». Ça fait ace, et la suite on la connait. Lorsqu'il apprend qu'il ne participera pas à cette finale, à aucun moment il ne se doute qu'il pourrait en rejouer une. Et dès cette année, à condition de battre l'Espagne de Rafael Nadal. Wait and see...
Je sais, Nicolas Mahut n'est pas parti rejoindre Coluche et Johnny. Il est bel et bien là, et le sera encore pour quelques temps en double. Mais hier, il a sans doute tourné une page importante de sa carrière et je trouve qu'elle méritait d'être mise à l'honneur.
Bravo Nico pour tout et surtout reste comme tu es !