Elle est au 3e tour de l'Open d'Australie. Elle n'a pas 16 ans. Elle est Ukrainienne. Je vous présente Marta Kostyuk. Elle est aujourd'hui la plus jeune joueuse depuis Mirjana Lucic-Baroni (US Open 1997) à se qualifier pour le 3e tour d'un tournoi du Grand Chelem.
Marta possède une technique presque parfaite à tout point de vue. Coup droit, revers, volée, service, sens du jeu... Tout. On ne va pas s'le cacher, et n'ayons pas peur des mots, elle est surdouée et précoce !
Marta, je l'ai connue un peu avant vous.
En septembre dernier, j'étais à Budapest pour couvrir la Coupe Davis et Fed Cup junior par BNP Paribas. A cette occasion, j'ai découvert cette joueuse qui défendait les couleurs de son Ukraine natale. La capitaine de l'équipe n'était autre que sa maman, celle qu'on a vue dans le box des joueurs à Melbourne.
C'est dans ces moments privilégiés qu'on peut découvrir un joueur, ou en l'occurence une joueuse. Mieux que jamais.
Pour commencer, c'est elle que l'organisation avait désignée pour effectuer le tirage au sort. A ce moment-là, je ne savais pas encore à qui j'avais affaire. Ce n'est que le lendemain que j'ai commencé à comprendre le phénomène Kostyuk. Marta aime quand ça brille. Pour une ado de 15 ans, elle est parfaitement consciente de l'importance de la caméra. Sur son premier match face à la Colombie, nous (moi et le cadreur) étions placés dans le coin du court. Marta nous a captés tout de suite. Le spectacle pouvait commencer. Les cris, les rires, les larmes, les jets de raquettes, les points gagnants... Beaucoup de points gagnants. En quittant le court, elle avait fait naturellement coucou à la caméra. En interview, elle maîtrisait déjà très bien l'anglais pour une enfant de 15 ans.
Le lendemain, elle jouait en double face à une équipe japonaise composée de deux petits formats. Normalement, le match était plié d'avance. Marta jouait en double, mais pas vraiment. Elle prenait toute les balles, elle voulait gagner tous les points. Elle se positionnait au milieu du court. A chaque fois qu'elle marquait un point, elle criait de joie. Et à chaque fois qu'elle (ou sa coéquipière) perdait le point, elle se mettait à pleurer, litttéralement, dans les jupons de sa maman assise sur le banc du capitaine. Elle a fini par perdre ce match avec une dramaturgie digne d'un Game of Thrones croisé avec un Breaking Bad.
La maîtrise de soi est l'un des gros chantiers que va devoir affronter Marta. Mais bon, quoi de plus normal pour une jeune fille. Je vous rappelle qu'elle n'a pas 16 ans.
Après il y a l'aspect : « Je veux que la lumière soit sur moi tout le temps ». Exemple concret : à l'occasion de la soirée de clôture de cet évènement (remporté par les USA chez les filles et la République tchèque chez les garçons), il y avait des photographes qui se baladaient et shootaient les jeunes. Marta s'est incrustée sur toute les photos, même avec des groupes composés de parfaits inconnues. Il y a eu un magicien qui a demandé un ou une volontaire. C'est encore Marta qui est montée sur scène, volontaire choisie parmi près de 500 enfants tout de même !
Cette fille se fait sa place. Que ce soit sur ou en dehors du court. Elle a compris comment ça marche. Elle a les armes pour le faire sur le circuit professionnel. Et je n'ai aucun doute qu'elle réussira. La regarder jouer la nuit dernière, qui plus est sur un show court, était incroyable, mais en même temps paraissait normal, tellement elle est hors norme.