Mais au fait, comment les wild cards sont-elles attribuées ?

24 juin 2014 à 00:00:00

Cette année encore à Wimbledon, comme sur les autres tournois du Grand Chelem, il y aura les meilleurs joueurs mondiaux, les qualifiés et… les wild cards. Une poignée d’invités retenus selon des critères bien précis. Surtout ici.

Dans le tableau principal d’un tournoi, il y a ceux et celles qui figurent grâce à leur classement du moment, mais aussi les qualifiés, qui ont cravaché pour y accéder. Et puis il y a les autres, une poignée d’invités qui bénéficient de la fameuse « wild card ». Qui sont-ils ? Selon quels critères sont-ils retenus ? Et par qui ? Une enquête s’impose.

 

Les archives des grands tournois révèlent que c’est au cours des années 80 que se généralise la pratique de l’attribution de wild cards. Le principe ? Autoriser à titre exceptionnel des joueurs et joueuses à participer à la compétition, bien qu’ils ne répondent pas aux critères communs de sélection. En clair, leur classement du moment est trop faible pour intégrer le tableau mais ils ont tout de même le droit d’en être par une forme de « fait du prince ». « C’est un comité composé du président de la fédération nationale concernée, du secrétaire général, du vice-président délégué et du directeur du tournoi qui valide l’attribution des wild cards, précise Christophe Fagniez, directeur opérationnel des Internationaux de France de Roland-Garros. Un travail préparatoire est effectué en amont pour soumettre une liste de joueurs et joueuses susceptibles d’obtenir le sésame, en tenant compte également des propositions de la DTN. » Les instances internationales de l’ATP et de la WTA n’ont donc aucun droit de regard sur l’attribution de ces wild cards. Elles contrôlent juste leur nombre. Pour un tournoi du Grand Chelem, il y a huit invitations pour le tournoi principal masculin, autant chez les filles, et autant pour ce qui est du tableau des qualifications.

 

Qu’en est-il des critères d’attribution ? Christophe Fagniez reconnaît qu’il n’y a « aucune règle figée dans le marbre. Tout est question d’équilibre, avec un grand principe fort à respecter : la wild card doit revenir à un joueur qui a de fortes chances de réaliser des performances sur le tournoi. » En d’autres termes, c’est la forme du moment sur la surface de jeu concernée qui doit être le critère numéro un de sélection. « D’ailleurs, poursuit Fagniez, dans le tableau masculin, les quatre joueurs français les mieux classés n’ayant pas pu intégrer le tournoi directement ont été repêchés pour cette édition 2014 ». A savoir Paul-Henri Mathieu, Michaël Llodra, Albano Olivetti et Pierre-Hugues Herbert. Ce qui nous amène au deuxième critère d’attribution, primordial : la préférence nationale. En clair, une majorité de Français bénéficient d’une wild card pour participer aux Internationaux de France, tout comme une majorité d’Australiens sont invités à Melbourne, de Britanniques à Wimbledon et d’Américains à l’US Open. A Roland-Garros, la règle veut généralement que six Français reçoivent le sésame sur les huit attribués, avec une proportion identique chez les filles. Dosage similaire à Flushing Meadows. En Australie, cinq wild-cards sont réservées aux joueurs nationaux. Enfin à Wimbledon, la règle est plus floue.

 

Ivanisevic face au pacte franco-américano-australien

 

Pour ce qui est des invitations restantes, elles font l’objet d’un partenariat entre fédérations organisatrices des grands tournois : un Américain et un Australien sont chaque année conviés à participer à Roland-Garros, un Français et un Américain à l’Australian Open et un Français et un Australien à l’US Open. « C’est un processus d’échanges gagnant-gagnant, estime Christophe Fagniez. Il y a une forme de solidarité entre nos trois fédérations, ce qui permet aux jeunes talents français, américains et australiens d’avoir la chance de participer à des tournois du Grand Chelem, dans leur pays mais aussi à l’étranger. C’est important pour leur progression. » Quant à la raison pour laquelle ce partenariat fonctionne seulement à trois et non à quatre, c’est parce que le tournoi de Wimbledon, contrairement aux trois autres grands tournois, n’est pas organisé sous l’égide d’une fédération nationale mais par un club privé, le All England Lawn Tennis and Croquet Club, avec ses propres règles. Une plus grande liberté qui lui permet d’inviter régulièrement des joueurs étrangers, et pas juste français, américains ou australiens. C’est ainsi qu’en 2001, le Croate Goran Ivanisevic, trois fois finaliste du tournoi par le passé et très populaire sur gazon, s’était vu attribuer une wild card alors qu’il n’était que 125e mondial. Une invit’ qu’il avait transformée en victoire finale du tournoi, une grande première ! En 2009, la Belge Kim Clijsters réussira pareil exploit à l’US Open. Dans un cas un peu similaire, les organisateurs de Roland-Garros avaient invité en 2008 un Gustavo Kuerten en fin de carrière pour disputer une dernière fois le tournoi de ses plus beaux succès passés. Marcos Baghdatis, invité cette année pour ses bonnes performances sur herbe dans le passé, espère lui que ce ne sera pas son chant du cygne...

 

Dans l’ensemble néanmoins, ce sont plutôt des jeunes espoirs qui se voient attribuer une wild card. Exemple avec le Français Lucas Pouille, qui en a reçu trois, en tout, depuis un an : lors des deux dernières éditions de Roland-Garros ainsi qu’au dernier Australian Open. Un soutien qui peut offrir un bel élan à celui ou celle qui en bénéficie, comme des roulettes sur une bicyclette pour effectuer les premiers tours de roue en toute sécurité. Exemple avec Caroline Garcia, qui a obtenu pas moins de cinq wild cards entre 2011 et 2013, avant de réussir à intégrer les grands tournois par la seule force de ses résultats sportifs depuis l’US Open l’été dernier. Idem avec l’espoir américain Steve Johnson, sept fois invité sur les grands tournois depuis 2011 et qui est enfin parvenu de lui-même à participer au dernier tournoi de Roland-Garros, où il a passé un tour. Preuve que le système de wild card peut avoir la grande vertu de donner sa chance aux meilleurs jeunes de progresser. Mais mieux vaut quand même avoir la bonne nationalité…

 

Par Régis Delanoë

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