Tsonga, Simon, Llodra et les autres étaient sûrement prêts à tout cette année pour avoir leur place aux Jeux. Dans les années 80, la réalité était autre. Quand Noah trouvait que les JO "puaient", Leconte hésitait lui...
Tsonga, Simon, Llodra et les autres étaient sûrement prêts à tout cette année pour avoir leur place aux Jeux. Dans les années 80, la réalité était autre. Quand Noah trouvait que les JO "puaient", Leconte hésitait lui à y aller. Finalement du voyage à Séoul en 1988, le Français y vit la pire expérience de sa carrière. Récit.
« Bravo Leconte ! » « Merci Leconte ! ». Dans le village olympique de Séoul trônent des banderoles moqueuses à l’égard du tennisman français. L’auteur ? Thierry Rey, l’ancien champion olympique de judo. En charge de l’animation au village pour la délégation française, le médaillé d’or des JO 80 est colère. Le motif ? Leconte, finaliste à Roland-Garros trois mois plus tôt et médaille potentielle à Séoul, est arrivé sur place au dernier moment. Il avait un autre truc de prévu : un tournoi sur la terre battue barcelonaise, où l’attendait un gros chèque. A vrai dire, la Corée du Sud, il ne comptait même pas y mettre les pieds. Trop loin, trop fatiguant, trop tout. Un coup de fil musclé de son sponsor Lacoste le fait finalement changer d’avis. Un revirement à 180°. Voire même un peu plus : « En voyant les autres à la télé pendant la cérémonie d’ouverture, j’étais un peu triste de ne pas pouvoir y aller ». Et Riton d’en rajouter une couche : « Maintenant que je suis là, c'est pour gagner. Je ne suis pas venu uniquement pour participer. » Puis une deuxième, à la télévision cette fois : « Ma femme voulait que je vienne. Guy Drut (l’ex-mari de sa femme de l’époque, Brigitte Bonnel. Ndlr) a quand même été médaille d’or. Pour elle, ce serait bien qu’elle voit que j’ai été médaillé d’or aussi ! ». Jean-Paul Loth, responsable de la troupe française cette année-là, se souvient d’une ambiance tendue : « Je suis allé le chercher à l’aéroport. Sa femme lui avait déconseillé de dormir au village, donc il n’y est pas venu tout de suite. Il n’y est passé que le lendemain. C’est là qu’il a découvert les fameuses banderoles de Rey… Elles se foutaient clairement de la gueule d’Henri ! ».« Ma mère a pleuré, ma sœur aussi »Même en faisant fi de la pression et de son manque de préparation, la défaite de Leconte contre un Coréen sorti de nulle part, Bong-Soo Kim, 361è à l’ATP, n’arrange rien. « Le gars jouait sa vie, se rappelle le consultant tennis. On avait promis à tous les Coréens qui gagneraient une médaille le versement d’un salaire à vie ! Le type s’était arraché ! Mais même en s’arrachant, franchement, il ne jouait pas plus que -15 ou -30 ! ». La suite de l’histoire tient de l’engrenage. Leconte perd rapidement en double avec Guy Forget, et évoque, à son retour à Paris, « un tournoi de plage ». Un mois plus tard, il est hué à mort au tournoi de Bercy par 10 000 personnes. Le tennis aux Jeux est encore loin d’être là où il en est aujourd’hui, mais personne n’a apprécié. « Elle est où ta médaille ? » hurle-t-on dans les tribunes. « Je ne pensais pas que ça allait être ma fête à ce point. Ma mère a pleuré, ma sœur aussi ». Ce fiasco coréen n’a pas cependant eu que des effets négatifs, selon Jean-Paul Loth. Pour le groupe France, tout du moins : « On a eu le temps de parfaitement s’intégrer avec les autres athlètes ! Le village olympique étant très grand, donc j’avais acheté une dizaine de vélos pour qu’on puisse mieux se déplacer. On nous regardait avec envie car il n’y avait pas beaucoup de fédérations qui avaient ces moyens. On faisait les cons, on faisait des dérapages. J’ai même failli tomber dans un ruisseau ! Ça détendait un peu et ça nous donnait une bonne image. Tout le monde nous trouvait sympa car on venait encourager tous les athlètes français toute la journée ! Mais en fait, c’est parce qu’on avait tous perdu très tôt dans toutes les épreuves. On avait que ça à faire ! ». Espérons qu’à Londres cette semaine, les athlètes français ne trouveront pas trop sympas les Tsonga, Simon, Gasquet et consorts. Par Julien Pichené