Cette année à Flushing Meadows, il y a évidemment eu les chocs finaux entre Novak Djokovic et Rafael Nadal d’un côté, entre Serena Williams et Victoria Azarenka de l’autre. Mais il y a eu aussi plein de petites phrases, d’anecdotes et de records passés plus ou moins inaperçus.
Rafa et Nole, les inséparables
La finale de l’US Open opposant Rafael Nadal à Novak Djokovic était déjà le 37e affrontement entre les deux hommes. Depuis que le tennis est devenu Open, marquant par la même occasion la fin du principe des tournées professionnelles, il s’agit de la rivalité la plus récurrente du tennis masculin. Ils ont dépassé Ivan Lendl et John McEnroe, qui s’étaient arrêtés à 36 confrontations. Mais le Tchèque et l’Américain avaient mis 12 ans pour parvenir à ce chiffre, quand Nadal et Djokovic les dépassent en 8 saisons seulement. Et à respectivement 27 et 26 ans, c’est sans doute loin d’être fini… Bon ceci dit, Martina Navratilova et Chris Evert peuvent dormir tranquilles : leur record absolu de 80 face-à-face ne sera jamais menacé.
Le set en or de Julian Reister
Bill Scanlon n’est plus seul. L’Américain, honnête Top 10 du début des années 1980, avait réalisé en 1983 une prouesse longtemps restée unique dans les annales du circuit masculin : réaliser un « set d’or » en match officiel, à savoir remporter les 24 points mis en jeu dans une manche, sans en perdre un seul. Il devra maintenant partager ce record avec l’Allemand Julian Reister, qui en a réalisé un aux dépens de son compatriote Tim Puetz, au premier tour des qualifs’ de l’US Open, lors de sa victoire 6/76/4 6/0. Le plus grand fait d’armes d’un joueur qui n’a jusque-là jamais dépassé le 92e rang mondial.
Gasquet, le bras d’honneur et les chaussettes
S’il a brillé raquette en main, Richard Gasquet a également alimenté les photographes en clichés insolites durant cette quinzaine. Episode 1, au deuxième tour, face à Stéphane Robert : le Français oriente un magnifique bras d’honneur droit devant lui, sans que l’on puisse déterminer exactement à qui il s’adresse. En salle d’interviews, Gasquet désamorce la petite polémique naissante : « C’était destiné à moi-même. Il faisait chaud, j’étais un peu énervé de m’être pris deux aces… Je n’étais plus moi-même. » La moiteur d’un ciel orageux dix jours durant au-dessus de Flushing Meadows lui joue encore des tours deux matchs plus tard, face à Milos Raonic. Après avoir perdu le premier set, le Français ôte ses chaussettes au changement de côté et les balance au beau milieu du court, suscitant le courroux de l’arbitre Enric Molina : « Ne compte pas sur les ramasseurs pour aller ramasser tes chaussettes ! » Explication du N°9 mondial : « J'étais trempé de sueur, je ne pouvais même plus courir tellement j'avais les chaussettes trempées ! J’avais même changé mes chaussures avant le tie-break... Ce n’était pas une réaction très classe. » Plus tard, qualifié pour les demi-finales, il choisit d’en rire : « Cette fois, pas de bras d’honneur, pas de chaussettes… C’est plus difficile sur le Central. Je garde ça pour les petits courts ! » Et de conclure : « On est souvent con quand on joue au tennis. »
Les joueurs américains ont le blues
Ce n’est pas un scoop, le tennis masculin américain file un mauvais coton. A la dérive au classement, les joueurs de l’Oncle Sam ont en outre de bonnes raisons de se sentir abandonnés par leurs propres instances. Cette année, et pour la première fois de l’histoire, le N°1 américain n’a pas été programmé une seule fois en « night session », le match roi de Flushing Meadows sur le gigantesque Stadium Arthur Ashe. Récent finaliste à Cincinnati, John Isner a pourtant croisé de sérieux clients en la personne de Gaël Monfils ou Philipp Kohlschreiber… Rien à faire, l’USTA l’a, à chaque fois, relégué sur le court Louis-Armstrong. Pire, un seul Américain a foulé le Central cette année : Ryan Harrison au premier tour… parce qu’il jouait Rafael Nadal. Même les adieux de James Blake au tennis ne méritaient pas mieux que le deuxième court du complexe aux yeux des organisateurs. Difficile d’être plus clair : la Fédération américaine de tennis a acté le déclassement de son propre tennis.
Dites « 33 » ou les bobos de l’Espagne
Vingt-quatre heures plus tôt, le camp espagnol baignait dans l’euphorie : Nadal impressionnait, Ferrer assurait, Suarez Navarro étonnait et Robredo époustouflait en venant à bout de Roger Federer. « La Armada », comme disent les journalistes ibériques, était de sortie… mais pas pour longtemps. Le lendemain, les Espagnols coulaient spectaculairement sur le pont du Arthur-Ashe : Marcel Granollers écopait contre Djokovic (6/3 6/0 6/0), Carla Suarez Navarro sombrait contre Serena Williams (6/0 6/0) et Tommy Robredo était sabordé par son propre compatriote Rafael Nadal (6/0 6/2 6/2). Soit une incroyable série de 33 jeux perdus consécutivement par les membres de « l’armada ». Comme d’habitude, il ne faudrait compter que sur Nadal dans les derniers tours.
Errani et Vinci, un couple se déchire
Quand la paire n°1 mondiale de double, qui plus est pilier de son équipe nationale de Fed Cup par BNP Paribas, se dispute, que fait-elle ? Elle ne se sépare pas. Comme n’importe quel couple, elle essaie de recoller les morceaux. Tel est l’état d’esprit actuel de Sara Errani et Roberta Vinci. La belle amitié entre les deux Italiennes, titrées à trois reprises en Grand Chelem depuis un an et demi, a pris du plomb dans l’aile depuis que Vinci, l’aînée et la moins bien classée du tandem, a pris deux fois le dessus sur sa cadette cette année. Poignée de main sans chaleur en finale à Palerme, puis noms d’oiseaux à Cincinnati. Suffisant pour que le capitaine de Fed Cup Corrado Barazzutti monte au créneau : « J’ai déjà parlé avec elles, et je dois encore le faire ces jours-ci. Il faut éclaircir les choses et tout remettre en place. Oui, elles se sont disputées, mais entre deux aussi forts caractères c’est inévitable qu’il y ait parfois des tensions. » De là à recevoir un avertissement de l’arbitre parce qu’elles se disputent entre les points, comme ce fut le cas lors de leur match du deuxième tour…
Le Grand Chelem calendaire manqué des Bryan
Les deux armoires à glace avaient un peu la voix cassée au moment de revenir sur leur défaite en demi-finale du tournoi de double : à New York, Bob et Mike Bryan jouaient tout simplement pour réussir « le » Grand chelem calendaire, un accomplissement encore plus rare en double qu’en simple, puisque seuls les Australiens Sedgman et McGregor sont parvenus à le réaliser, en 1951. Et les jumeaux pouvaient y croire, eux qui n’avaient plus perdu en Grand Chelem depuis Wimbledon 2012. Les farfelus Leander Paes et Radek Stepanek ont finalement brisé ce beau rêve. Les Bryan Brothers n’apporteront pas une lumière bienvenue sur une discipline en panne d’intérêt : « Ils ont vraiment remporté les trois premiers tournois du Grand Chelem ? », fut ainsi la réaction première de Rafael Nadal à une question portant sur l’exploit possible en début de quinzaine.
Ode aux orteils d’Azarenka
Victoria Azarenka est une jeune fille pleine d’entrain et d’humour. Et heureusement pour ce journaliste qui avait une question pour le moins… décalée à lui poser en conférence de presse : « Au début de l’année, vous avez eu une infection au doigt de pied à cause d’un souci chez un pédicure. Avez-vous changé votre façon de prendre soin de votre pied depuis cet épisode ? Et qui garde votre pied en bonne forme aujourd’hui ? Je veux dire… Je sais que cette question va vous sembler bizarre, mais, vous savez, la raison pour laquelle je vous la pose est que vous êtes une athlète, et que, pour une athlète, le pied est une partie du corps très importante. Mais en même temps, en tant que femme il y a aussi forcément certaines tentations dans les fêtes destinées aux joueurs, comme de se faire peindre les ongles. C’est une question humoristique mais pas tant que ça, vous voyez. » Réponse d’Azarenka, petit sourire en coin : « Est-ce vraiment important ? » Next.
Nadal bat aussi Gasquet aux jeux vidéos
Il n’y a pas que sur un court de tennis que Richard Gasquet n’y arrive pas face à Rafael Nadal. Avant d’affronter l’Espagnol en demi-finale, le Biterrois a confié que le multi-vainqueur de Roland-Garros le mettait également à l’amende… aux jeux vidéo : « L’année dernière, à Monte-Carlo, Gaël (Monfils, ndlr) et moi avions joué une partie de jeux vidéo de foot contre Juan Monaco et lui. Il faut savoir qu’il y a deux grands jeux qui se partagent le marché : Fifa et PES. Ces deux jeux sont assez différents. Gaël et moi, nous sommes plutôt branchés Fifa. Malheureusement cela s’est joué sur PES. Nous n’étions pas prêts et ils nous ont battus. »
Gulbis se trompe (encore) de terrain de jeu
On peut toujours compter sur Ernests Gulbis pour faire le show… hors du court. Transparent face à l’Autrichien Andreas Haider-Maurer, n°88 mondial, qui l’a sorti dès le premier tour, le Letton s’est rattrapé en assurant l’une des conférences de presse les plus « punchy » de la quinzaine. Après avoir parsemé de jurons l’analyse de son « fuckin’ » match, le plus grand talent gâché de sa génération a renvoyé dans les cordes un journaliste qui lui demandait s’il comptait travailler avec un préparateur mental ou un psychologue : « Un psy ? Non. Vous n’avez qu’à aller en voir un, vous. Moi, je n’en ai pas besoin. » Histoire de soigner sa sortie, à la question « Quel joueur voyez-vous remporter le tournoi ? », il a répondu, impassible : « Haider-Maurer. » Merci Ernests.