Il a été le premier joueur de plus de deux mètres à intégrer le Top 10 mondial. L’un des premiers, aussi, dont le service a été officiellement chronométré à plus de 210km/h. Marc Rosset livre donc son classement des meilleurs serveurs du circuit ATP des trente dernières années. De Becker à Nadal, petit voyage dans le temps…
1/ Goran Ivanisevic
« Si on prend en termes d’aces et de capacité à tuer le point dès le premier coup de raquette, le plus chiant de tous, c’était bien Goran. Quand il était réglé, ça tombait de haut, et ça tombait vite. C’était un cauchemar. Il était gaucher, il avait une gestuelle avec laquelle il ne livrait pas d’indices sur ses zones… Sans compter tout ce que ce style de jeu pouvait avoir de frustrant pour le relanceur au fil du match. Pour moi, c’était le pire de tous. Avec lui, c’était « pan », et terminé. Fini. Même pas besoin de volée derrière. Sur surfaces rapides, je ne l’ai battu qu’une seule fois de toute ma carrière, je crois (trois en fait, ndlr). »
2/ Roger Federer
« D’abord parce que lui a cette capacité à faire tomber les aces quand il en a besoin. Mais, de manière plus générale, je le cite parce qu’il a cette faculté à sortir ‘la’ bonne première dans les moments chauds. Question de sang-froid. Parce que des énormes serveurs qui devenaient soudain moins performants à 6 jeux à 5 contre eux ou dans le tiebreak, on a en vus… Federer, lui, sait qu’il va pouvoir compter sur cette arme même quand il y a de la tension. »
3/ Pete Sampras
« A mi-chemin entre Ivanisevic et Federer. Pete ne cherchait pas forcément à ‘tuer’ l’échange. Mais son service était d’une fiabilité remarquable, soit par ses aces, soit par ses enchaînements : il servait fort, et derrière il arrivait très vite au filet pour poser une belle volée. Dans nos confrontations, il m’était en revanche plus accessible qu’Ivanisevic. Je ‘sentais’ mieux ses zones. On a souvent joué des gros matchs, serrés, lui et moi. Richard Krajicek pourrait aussi marcher dans cette catégorie. »
4/ Boris Becker
« Bien sûr, c’est loin maintenant. C’était un autre tennis, où la priorité était donnée à l’offensive. Nous deux, c’était un peu ‘à toi, à moi’ : une fois je gagnais, l’autre il me battait. Avec Boris, il fallait avoir du sang-froid car il ne laissait pas beaucoup d’occasions sur son service. Et comme lui était très opportuniste à la relance… J’aurais aimé que Jo-Wilfried Tsonga gagne sa demi-finale de Roland-Garros car c’est ce tennis-là qui manque aujourd’hui parmi l’élite. »
5/ Rafael Nadal
« Ca va peut-être vous surprendre car ce n’est pas une machine à aces, mais quand on regarde Rafa, on se rend compte qu’il gagne un nombre de points incroyable avec son service. Ca ne claque pas à 240km/h, mais c’est précis, ça va bien où il faut, avec son lot de variations. Son service ne vise pas à finir le point tout de suite, mais à avoir un deuxième coup de raquette imparable. Dans l’imagerie commune, les grands serveurs, c’est Ivanisevic, Isner, mais le grand serveur c’est surtout celui qui te claque un ace quand il le faut ! Et Rafa, avec son service de gaucher sur les égalités, il est impressionnant quand il s’agit de sauver les balles de break. »
Propos recueillis par Guillaume Willecoq
