TOP 10 : HISTOIRES ET DEBOIRES DES QUALIFS DE ROLAND-GARROS

22 mai 2013 à 11:57:55

224 joueurs et joueuses vont s’affronter du 21 au 24 mai sur les courts annexes de Roland-Garros, mais peu survivront. 28 pour ainsi dire, comme le nombre de places qui restent à pourvoir dans les grands tableaux.

224 joueurs et joueuses vont s’affronter du 21 au 24 mai sur les courts annexes de Roland-Garros, mais peu survivront. 28 pour ainsi dire, comme le nombre de places qui restent à pourvoir dans les grands tableaux. Une armée de seconds couteaux prêts à mourir dans l’anonymat pour se faire une place au soleil, et autant d’anecdotes qui racontent bien la singularité de l’épreuve des qualifications à Roland-Garros.

 

1/ Oui, les matches nuls existent en tennis

Fait unique en 1973, plusieurs matches des qualifications ont eu ni vainqueurs ni vaincus. Cette année-là, plusieurs forfaits de dernière minute dans le tableau principal ont forcé la direction du tournoi à élargir le numerus clausus. Lors d’une longue interruption due à un orage et avant même la fin du tour qualificatif, les « lucky losers » des finales du tableau des qualifs ont été tirés au sort. Les organisateurs n’ont donc pas jugé utile de poursuivre quatre rencontres dont la victime allait être automatiquement repêchée. Ainsi, le match entre Denis Naegelen et Nikos Kelaidis est resté bloqué, à jamais, à 4 jeux partout au troisième set.

 

2/ Des qualifs…à la victoire finale

Chacun a son propre rythme pour passer de l’ombre des qualifications à la lumière du Central. Si certains mettent toute une vie à voir le bout du tunnel, d’autres décollent comme une fusée ! Mats Wilander et Gustavo Kuerten passaient encore à la moulinette des qualifications douze mois seulement avant de soulever le trophée pour la première fois. Ce sont les seuls à avoir connu une « ascension sociale » aussi rapide.

 

3/ Anxiolytiques qualifications  

On a encore rien inventé de mieux que les qualifs pour assister à d’authentiques crises de nerfs… En 2011, la raquette de l’Américain Ryan Harrison, passablement énervé de n’être passé qu’à un set du grand tableau, termine coincée dans les branches d’un marronnier, à cinq mètres de hauteur. En 2012, la Française Alizé Lim va s’étendre, seule, tout en haut des gradins déserts du court Suzanne Lenglen pour tenter d’oublier qu’elle vient de perdre après avoir menée 6/3 et 3-0.

 

4/ Des « joueurs du dimanche » ont tenté leur chance

En 1986, le Français Laurent Rizzo, classé seulement -30, réussit l’exploit de sortir Christophe Roger Vasselin, demi-finaliste des Internationaux de France trois ans plus tôt. C’est l’un des derniers exemples frappants de « sans-grade » de l’ATP réussissant à se distinguer dans les qualifs. Des négatifs, vous n’en trouverez quasiment plus aujourd’hui dans le tableau, sauf une petite wild card par-ci par-là, et encore. Autrefois, lorsque les participants se faisaient plus rares, on est même descendu très bas. L’ancien juge-arbitre Jacques Dorfmann se souvient avoir arbitré en 1957, première année des qualifications, le match d’un Dominicain dont le niveau n’était pas très élevé : « Son adversaire était à -15, mais lui devait à peine jouer la seconde série ! »

 

5/ Le Belge qui a préparé son match… au cinéma

Battu lors du tour qualificatif en 1976, le Belge Bernard Mignot n’a pas eu la patience de passer deux jours entiers au stade à espérer qu’un collègue se foule la cheville pour prendre sa place en tant que lucky loser. Arrivé le mardi, dernier jour du premier tour, persuadé que son tour ne viendra pas, Mignot part faire une virée dans Paris. Restaurant, cinéma, la tournée des grands ducs… Mais lorsqu’il revient au stade en fin d’après-midi, il apprend qu’il est attendu immédiatement sur le court pour jouer un premier tour contre Paolo Bertolucci ! Mignot ira jusqu’en 8è de finale, le meilleur résultat de sa carrière. Mais tout s’est joué à une minute près… 

 

6/ Le match qui a eu deux fins

En 1977, l’arbitre André Vanderpol ne sait pas, ou ne sait plus, qu’il n’y a pas de tie-break au troisième set. Même en qualification. Quand Terry Rocavert et Lionel Santeiu arrivent à 6 jeux partout dans l’ultime set, il annonce donc…un jeu décisif. Les deux joueurs ont consenti, mais lorsqu’il découvre ce vice de forme, le juge-arbitre Jacques Dorfmann fait rejouer la fin de la partie en convertissant les points gagnés dans le tie-break en points de jeu. Pour la petite histoire, Rocavert a gagné les deux fois. Au tie-break donc la première, et 9 jeux à 7 la seconde.  

 

7/ Il fallait arriver avant la quinzaine

C’est en 1996 que s’est joué le set le plus long – en termes de nombre de jeux – de toute l’histoire du tournoi. C’était entre Thierry Guardiola et Daniel Nestor, il y a eu 22/20 et ça s’est passé lors des qualifications. L’année suivante, il fallait aussi être des qualifs pour voir Olivier Mutis sauver pas moins de sept balles de match face à Julian Alonso. Enfin, qui n’a pas vu ce deuxième tour de qualification de 2008 entre Ilija Bozoljac et Diego Hartfield ne sait pas ce qu’est un match où deux inconnus jouent leur vie sur trois sets : à la tombée de la nuit, après plusieurs heures d’un combat épique, le premier, un casse-cou au look de Don Juan, s’impose 11 jeux à 9, devant des centaines de spectateurs enthousiastes. Ce fut, cette année-là, le plus beau match du tournoi.

 

8/ Purgatoire pour anciennes gloires

Pas évident de retourner se débattre parmi les va-nu-pieds du circuit quand on a goûté aux fastes. Nul n’est pourtant exempté à vie de la purge des qualifs. Ainsi, de temps à autre, elles voient (re)pointer quelques vieilles gloires renommées ou des raquettes sur le retour. En 2010, c’est là qu’on a vu pour la dernière fois Gaston Gaudio. Triste sortie pour le vainqueur surprise 2004, éliminé devant quelques dizaines de spectateurs, par le Brésilien Thiago Alves. En 2012, Tommy Haas, ex-numéro 2 mondial, n’a pas eu le choix et avouera : « Pour l’ego, c’est pas terrible. » Cette année, il fait partie des têtes de série.

 

9/ Le qualifié le plus fort de tous

Le joueur issu des qualifications à être ensuite allé le plus loin dans le tournoi est le Belge Filip Dewulf, demi-finaliste en 1997. 122è à l’ATP au début du tournoi, Filip Dewulf arrive à Paris sans avoir de quoi se payer mieux qu’un hôtel deux étoiles. Finalement, il remportera huit matches d’affilée, trois dans les qualifications et cinq dans le grand tableau : « J’étais arrivé sans fonder beaucoup d’espoirs. La suite est d’autant plus inattendue que j’ai d’ailleurs joué des premiers matchs dégueulasses. » Au plat pays, son aventure a pris des proportions folles : le Prince Philippe a fini par débarquer à Paris et un journal limbourgeois a affrété un hélicoptère pour amener sa copine Annick assister à sa demi-finale. C’en était trop pour ce fan de rock-alternatif, qui s’est souvent auto-proclamé fainéant. Mais on lui en reparle toujours depuis : « Quasiment tous les ans, avant chaque Roland ! »

 

10/ McEnroe, merci à Jacques Dorfmann !

John McEnroe a fait sa première apparition à Roland-Garros dans l'épreuve des qualifications, en 1977, à l'âge de 18 ans. C'est ce qui a lancé sa carrière. Pourtant il n'aurait jamais dû les jouer ! Le juge-arbitre Jacques Dorfmann a en effet accepté d’inscrire le junior américain au dernier moment, suivant les recommandations enthousiastes de Patrice Dominguez et de Jean-Paul Loth, qui comptaient alors parmi les rares Français à l’avoir vu jouer : « Les inscriptions étaient closes à ce moment-là, mais je peux maintenant l'avouer – il y a prescription : j'ai antidaté l'engagement de McEnroe ». Une petite entaille au règlement qui a eu une grosse répercussion : John McEnroe s'est brillamment extirpé des qualifications, avant de passer un tour dans le grand tableau. Et la semaine suivante, il remportait l'épreuve juniors et le double mixte...

 

Par Julien Pichené

 

 

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