Sauf miracle, la France ne criera pas « cocorico » le week-end du 10 juin 2012. Malgré quelques bonnes cartes à jouer, le tennis tricolore devrait une nouvelle fois laisser son tournoi aux invités étrangers.
La France pleure. Comme pour sa Grande Boucle en cyclisme, les champions du cru manquent à l’appel de la victoire, et ce alors même qu’un des plus grands événements de leur discipline, Roland-Garros, se déroule sur leurs terres. Depuis l’ère Open, en 1968, l’Hexagone n’a vibré que deux fois pour le titre. Et les souvenirs remontent. Dans le tableau des dames, Mary Pierce a fait ce qu’elle a pu (trois finales pour un trophée en 2000, Ndlr) tandis que du côté des damoiseaux, le grain de l’image est encore plus trouble : 1983 pour LA victoire de Yannick Noah et 1988 pour la place de finaliste d’Henri Leconte. Le désert depuis, malgré une densité de challengeuses tricolores dans les 90, Amélie Mauresmo numéro un mondiale dans les années 2000 et nombre de challengers chez les hommes à cette même époque. Si Mary Pierce a bien réussi à tisser un rapport particulier avec le tournoi parisien, Amélie Mauresmo n’a jamais dompté la terre de Roland-Garros malgré un bon présage dans la catégorie junior (titre en 1996, Ndlr). La femme au doux revers, numéro une 34 semaines durant, craquera nerveusement ou physiquement à chaque édition. Si les défaites sont sportivement logiques en début de carrière (Graf, Hingis, Seles ou Kournikova, Ndlr), elle ira ensuite de déception en déception sans que cela n’émeuve outre mesure le public français. Vainqueur d’un Grand Chelem sur abandon de Hénin en Australie, elle gagne Wimbledon ensuite en 2006 le jour de la finale de la coupe du monde de football. Trop loin des yeux et du cœur des Français qui ne la méritent peut-être pas. Le constat paraît sévère mais le public de la Porte d’Auteuil est dur à embrasser, capable de mener la vie compliquée à un de ses plus grands champions : Rafael Nadal, lors d’une finale contre Federer. La meilleure carte française actuelle, Marion Bartoli, n’est-elle pas souvent raillée pour son embonpoint ? Public ingrat peut-être, difficile surtout.
Le cache-cache nocturne de Gaël Monfils
Il y a pourtant bien un candidat, prêt à relever le challenge du versatile public de Roland-Garros. Gaël Monfils n’est pas homme à céder face à l’enjeu, à la pression de gagner sur ses terres. Cela le galvanise plutôt. « Avoir près de moi ma famille, mes potes, ça me rend différent. Et puis j’aime ce stade. Je n’en ai pas peur. Le central, j’y ai fait tellement de conneries entre guillemets, que c’est chez moi. Je l’ai démythifié, je l’ai déjà baptisé “le bordel” ! Mon meilleur souvenir à Roland-Garros, ça reste un cache-cache, la nuit. J’avais seize ou dix-sept ans et je n’en dirai pas plus. (…) Dans tous les autres tournois, j’ai des objectifs. À Roland-Garros, j’ai un rêve » avouait amusé celui que la France appelle « la Monf’ » dans les colonnes de L’Equipe en 2010. Seulement, le corps du fantasque français n’a jamais la bonne idée d’être idéalement réglé pour la compétition parisienne. Jo-Wilfried Tsonga est quant à lui dans le brouillard. Même si, avec sa 5ème place, il appartient à la catégorie des meilleurs joueurs mondiaux, Jo n’a à ce jour toujours aucun titre sur terre-battue et confesse une certaine lassitude physique depuis le début du printemps. Que les plus chauvins se rassurent. La France n’est pas seule dans ce calvaire. Depuis le début de l’ère Open, aucun tennisman britannique n’a atteint la finale sur le gazon londonien. Les femmes étant maigrement plus vernies avec un 100% de réussite en deux finales (Ann Hayden Jones en 1969, Virginia Wade en 1977, Ndlr). Mis à part les dix premières années de l’ère Open et le « moment Pat Cash », l’Australie n’a pas à fanfaronner, avec pour maigre butin une place de finaliste de Lleyton Hewitt en 2005. Reste la grande Amérique, inclassable dans cette théorie puisqu’elle n’a qu’à puiser dans un vivier gigantesque de population pour trouver ses champions et défendre son territoire. Le destin des chemins de la naturalisation lui a même apporté deux nouveaux diamants : Martina Navratilova et Monica Seles. Trop facile. Par Ronan Boscher