Entre le tennis et la politique, la frontière a parfois été mince. Des joueurs qui se découvrent des ambitions électorales aux personnalités politiques qui se détendent raquette à la main, tour d’horizon de ces joueurs de pouvoir.
1/ Marat Safin député
Sexy, fêtard, quadrilingue, tennisman, caractériel – « j’ai cassé 1055 raquettes en dix ans » - et désormais homme politique : Marat Safin est élu en 2001 député à la Douma, le Parlement russe, sous l'étiquette du parti au pouvoir présidé par Vladimir Poutine. « Dans 20 ans, il sera président de la Russie », gage même son ami Pete Sampras. « J’ai longtemps réfléchi à me lancer dans la politique (…) C’est une nouvelle vie, une nouvelle façon de penser, d’agir, qui n’a aucun rapport avec le tennis ou le sport en général », mesure quant à lui l’ancien n°1 mondial de 33 ans, toujours aussi charmant : « Je suis l’homme le plus mignon de la Douma, mais c’est juste parce que les autres ont plus de 60 ans. »
2/ Barack Obama fête Pâques raquette à la main
La Maison Blanche est dotée d'un court de tennis depuis que Theodore Roosevelt en a fait construire un en 1902. Depuis ce jour, les présidents américains n’hésitent pas à utiliser le cadre d’une partie de tennis avec un allié ou un adversaire politique pour discuter d'une loi, ou faire passer un projet. Roosevelt aimait tellement ces moments qu'on parlait carrément de « gouvernement du tennis. » Si aucun de ses prédécesseurs ne peut se targuer d’aimer autant la petite balle jaune, il existe une First Lady avec laquelle le vingt-sixième président des etats-Unis se serait bien entendu, c’est Michelle Obama. Depuis l'élection de son mari en 2008, elle a souvent parlé de sa passion pour le tennis et n’a jamais manqué une occasion de s’entourer des plus grands joueurs pour promouvoir son programme contre l'obésité. En 2015, Barack himself est venu taper quelques balles lors des festivités de Pâques organisées à la Maison Blanche. La Danoise Caroline Wozniacki a ainsi eu l'honneur de jouer contre un président en chemise-pantalon.
Jean-Vincent Placé le hooligan
Au tournoi de Bercy de 2016, Stan Wawrinka peut avancer confiant. Le Suisse est en train de boucler une saison de haute volée, a remporté Roland Garros, a joué deux autres demi-finales de Grand Chelem, et est numéro 3 mondial. Mais pour son premier match à Bercy, Wawrinka est accroché par le surprenant Jan-Lennard Struff, un Allemand qui sort des qualifications. Alors que le match traine et qu'il est déjà tard, Wawrinka s'arrête soudain de jouer pour hurler sur un spectateur qui parlait un peu trop fort derrière lui. Le coup de gueule est sec et concis : « Oh, ça te dérange pas qu’on joue un match ? Non mais sérieux, il est minuit, si tu n’as pas envie de voir, tu rentres. » Le fan bruyant n'était autre que... Jean-Vincent Placé, alors secrétaire d’État chargé de la Simplification et de la réforme de l’État. Une pique qui n'empêchera pas Wawrinka de perdre le match.
4/ Dominique de Villepin et les nuls
Ce n'est pas compliqué d'imaginer Dominique de Villepin sur un court. Silhouette athlétique, longs segments, élégance naturelle, l'ancien Premier ministre se fond parfaitement dans le décor. Et lorsque Le Monde l'interroge sur la question, l'homme du CPE s'emballe immédiatement. « J'ai été champion du Venezuela » démarre celui qui y a vécu dans sa jeunesse. Élogieux, François Baroin dit de lui qu'il a « un beau jeu, esthétique, un grand service qui tombe de haut, un coup droit à plat, un revers chopé. » Mais Dominique de Villepin n'est pas du genre à rendre les compliments, et a un regard un peu plus critique sur les performances sur les courts des autres hommes politiques : « Il n'y en a pas un qui sache jouer ! Vous ne trouverez personne ! Mis à part Chaban-Delmas, et il n'est plus là, ils sont nuls ! »
5/ Jacques Chaban-Delmas, un Premier ministre à Roland Garros
Depuis la nuit des temps, des milliers d'hommes politiques ont tenté d'incarner le dynamisme, mais peu l'ont aussi bien fait que Jacques Chaban-Delmas. Il faut dire que l'ancien Résistant, devenu ensuite maire de Bordeaux, président de l'Assemblée nationale, Premier ministre et candidat malheureux à l'élection présidentielle de 1974, ne faisait pas semblant quand il s'agissait de mouiller le maillot. Grand sportif et bon joueur de rugby, il était surtout un tennisman reconnu de tous, qui a même participé en double au tournoi vétéran de Roland Garros dans les années 60. Un côté hyperactif qui ne plaisait pas vraiment au président Pompidou. Ce dernier l'accusait de légèreté et a toujours jugé que son Premier ministre ne travaillait pas assez sur ses dossiers.
6/ Justin Trudeau, des tweets et des selfies
Le Premier ministre du Canada est plutôt du genre à faire de la boxe, mais il n'oublie jamais de féliciter les joueurs du tennis de son pays. « Monsieur le Président, nous célébrons aujourd'hui nos athlètes qui nous inspirent, et qui sont notre fierté », clame-t-il un jour en pleine Chambre des communes pour entamer un discours de félicitation à Eugénie Bouchard. Un peu plus tard, la joueuse profite d'un passage par le Parlement canadien pour prendre un selfie avec Trudeau. Et malgré son emploi du temps de fou furieux, le Premier ministre (ou son community manager) continue de jeter un œil aux résultats et envoie parfois un tweet à Milos Raonic pour l'encourager.
7/ Bruno Le Maire tape quelques balles avec Djoko
Devenu en quelques années un homme politique de premier plan, Bruno Le Maire n'oublie pas de garder un peu de temps pour s'adonner à ses passions. À savoir la musique classique, la littérature, mais aussi le tennis. « Même en campagne, mes équipes savent que je réserve des moments pour jouer au tennis avec mon aîné » confiait-il à Marianne en 2016, alors lancé dans la primaire de la droite. Dans le même entretien, il s'épanchait un peu plus sur sa passion pour le tennis : « J'ai même été classé 15.2. J'ai déjà tapé des balles avec Novak Djokovic. » Jouer avec le numéro 1 mondial, c'est bien, mais ça n'aide pas à gagner les élections.
8/ Poutine n'aime pas les shorts de tennis
Vladimir Poutine se bat chaque jour pour que la grandeur de la Russie soit respectée, et il est donc un homme heureux quand les joueurs de tennis du pays des tsars gagnent. Il a donc souvent félicité les titres de Sharapova et consorts, mais quand il s'agit d'avoir un peu d'humour, le président russe est absent. Un grand magasin de Moscou en a fait l'amère expérience en placardant dans les rues de la capitale des affiches publicitaires amusantes. Dessus, on pouvait admirer un montage photo où l'on voyait Vladimir Poutine et Dmitri Medvedev en tenue de tennis à l'ancienne, avec short blanc, polos stylisés, et raquette à la main. Pas du goût du Kremlin qui a demandé le retrait des affiches illico presto. Le porte-parole de Poutine avait même parlé à l'époque d'un comportement « à la limite du vandalisme. » Le poids des mots, après le choc d'une photo.
9/ Ilie N?stase au Sénat
Après quinze ans de titres, de pitreries, de bonnes blagues et de coups géniaux, Ilie N?stase a raccroché sa raquette en 1985. Mais le Roumain a encore de l'énergie, et n'a pas abandonné son esprit de compétiteur. Alors pourquoi ne pas tenter quelque chose en politique ? Candidat à la mairie de Bucarest en 1996, il part largement favori dans les sondages mais finit par s'écrouler et par perdre largement l'élection. Pas de quoi l'abattre puisqu'il s'est ensuite fait élire sénateur, même s'il a confié qu'une partie des codes de la politique lui échappaient : « Je ne me retrouve pas bien dans le milieu des politiciens. C’est difficile parce que, chez nous, dans le sport, on gagne ou on perd. Là il faut faire des concessions et je ne suis pas habitué à ça. »
10/ « Sarkozy, sur un court, c’est une pile »
Aux Etats-Unis, les présidents George Bush père et John Fitzgerald Kennedy étaient de grands amateurs de tennis. Le second, très bon joueur, avoue même un jour : « J’ai fait voter plus de lois sur un court de tennis que partout ailleurs. C’était un endroit où l’opposition baissait sa garde ». En France, ceinture marron de judo, passionné de vélo et de course à pied, Nicolas Sarkozy avait rêvé lui d’être un seigneur des courts. Au tennis, l’ancien président ne fait pas dans le style, la beauté du geste, ni dans la précision tactique. Mais plutôt dans l’abnégation. « Sarkozy sur un court, c'est une pile, explique au Monde Ronan Lafaix, ancien coach de tennis à HEC, qui l’a observé lors d’un match face au chanteur Didier Barbelivien. Il est très engagé dans la balle. Je le sentais tendu, crispé, tout dans l'envie et la force, sans aucun détachement. Il était comme au dernier débat présidentiel : il s'agaçait, alors que Barbelivien restait cool et relâché comme Hollande ».