Nadal : stop ou encore ?

21 août 2012 à 17:43:53

La semaine dernière, Rafael Nadal a déclaré forfait pour l’US Open. Une énième blessure qui ne manque pas d’interroger sur la suite de sa carrière. Celle d’un champion précoce qui a beaucoup tiré sur la corde. Sur...

La semaine dernière, Rafael Nadal a déclaré forfait pour l’US Open. Une énième blessure qui ne manque pas d’interroger sur la suite de sa carrière. Celle d’un champion précoce qui a beaucoup tiré sur la corde.

Sur la fin de sa carrière en 2005, Andre Agassi jouait les oracles : « Rafa tire des chèques sur sa santé que son corps ne sera pas capable d’honorer. » Cette remarque, frappée au coin du bon sens alors que le prodige espagnol n’avait pas encore vingt ans, est revenue hanter la mémoire des observateurs du circuit au fil des saisons, à mesure que le plus grand sportif de l’histoire ibère martyrisait son corps. Personne n’était allé si loin dans la douleur, dans la maltraitance de son organisme, dans le refus de la défaite que le septuple champion de Roland-Garros. Jusqu’alors, le numéro trois mondial n’avait raté « que » six tournois du Grand Chelem : les internationaux de France de 2003 et 2004 (avant même son avènement, Ndlr), Wimbledon 2004 et 2009 et l’Open d’Australie 2006. On passera sur des défaites équivoques où, blessé, il a préféré ne pas abandonner comme à New York en 2005 et à Melbourne en 2011. Les deux fois contre David Ferrer et la seconde à deux matchs seulement du ‘Rafa Slam’. Depuis son émergence au printemps 2005 à pas même dix-neuf ans, on sait que Nadal ne fera pas de vieux os. On lui pronostiquait même une carrière à la Borg.   Nadal, comme Wilander ?   Quand on compulse les livres d’histoire, on constate tout d’abord que la quasi-totalité des vainqueurs les plus jeunes des Quatre Majeurs n’ont jamais joué les prolongations. Lauréat à Paris à dix-huit ans en 1974, Björn Borg arrête sa carrière au début de l’année 82, huit mois après sa sixième victoire porte d’Auteuil. Vainqueur de l’US Open à dix-neuf ans en 1979, John McEnroe ne gagnera plus de Grand Chelem après l’automne 1984. Pareil pour Michael Chang - plus jeune lauréat à Paris à 14 ans et quatre mois - qui ne s’en remettra jamais tout à fait, malgré des finales en Australie, aux Etats-Unis et une autre à Paris. Quelques années auparavant, Mats Wilander avait connu une drôle de trajectoire : vainqueur à Paris à dix-sept ans en 1982, il avait empoché par la suite trois autres Majeurs avant de réussir le petit Chelem en 1988. Australie, France, USA et place de numéro un mondial à vingt-quatre ans. Il a alors disparu des radars, ne supportant pas la pression afférente à son nouveau statut. Outre Chang, les 90’s vont moduler quelque peu la tendance. Jim Courier, double vainqueur du ‘French’ et de l’Australie au début de la vingtaine va perdre pied peu à peu et ne plus être un joueur du Top 10. De la bande des quatre mousquetaires américains, Andre Agassi sera le seul contre-exemple parfait. Il est le plus précoce avec une demie à Roland en 1987 et sera le dernier de la bande à rafler un Grand Chelem à Wimbledon en 1992. Le « Kid de Las Vegas » restera également comme un des rares joueurs à avoir gagné les quatre Majeurs, à être revenu d’entre les morts deux fois (classé bien au-delà de la centième place ATP, Ndlr) et à finir sa carrière à trente-six ans, alors que l’année précédente il est encore finaliste à l’US Open, battu par un Federer au faîte de son talent incandescent.   La retraite après Rio   Nadal, donc, vient de fêter ses vingt-six ans en juin, l’âge où Borg a dit stop. Cinquante titres dont onze tournois du Grand Chelem, vingt-et-un Masters Series, l’or olympique et trois Coupes Davis par BNP Paribas. Ouf. L’ogre de Manacor n’a eu de cesse de s’améliorer, il a fait progresser son jeu dans tous les secteurs sous l’égide de son oncle, Toni. Vendredi dernier, il a donné une conférence de presse qui se voulait rassurante. S’il a manqué les Jeux, Toronto, Cincinnati et bientôt l’US Open, c’est à cause du syndrome de Hoffa, une inflammation du tendon rotulien gauche. Rien à voir avec ses douleurs anciennes et récurrentes aux deux genoux. Angel Ruiz Cotorro, le médecin de la fédération espagnole mais aussi celui du muchacho de Manacor depuis ses quatorze ans, précisait dans Marca : « La lésion de Nadal est gênante et douloureuse mais bénigne. Ça évolue bien et la semaine qui vient sera décisive pour savoir si nous allons poursuivre le même traitement. » Dans l’entourage du Majorquin, on table sur une indisponibilité de soixante-dix-huit jours. Tout le monde se fout de la perte probable de la troisième place au classement ATP au profit d’Andy Murray après l’US Open mais rêve à haute voix de le voir disputer la demi-finale de la Coupe Davis par BNP Paribas, à Gijon mi-septembre. Personne en Espagne ne se fait de souci quant à son avenir. Docteur Cotorro évacue : « Il n’y a aucune inquiétude à avoir pour le futur. » Manuel Orantès, l’immense gaucher des années soixante-dix, a la nuance plus elliptique : « On parle beaucoup à son sujet de son talent singulier de gaucher, de son mental extraordinaire mais on oublie de dire que c’est un athlète hors du commun. Nadal ne reculera pas au classement, il ne jouera pas pour n’être que finaliste même si les joueurs durent plus longtemps aujourd’hui. Il ne s’éternisera pas comme Connors c’est sûr mais je le vois évoluer au plus haut niveau quelques années encore. Il est en pleine force de l’âge.» Dans sa conférence de presse, Rafa a laissé filtrer qu’il se verrait bien jouer jusqu’aux prochains Jeux Olympiques de Rio en 2016 pour être enfin porte-drapeau de la délégation espagnole. Un plaisir et un honneur dont l’a privé le syndrome de Hoffa cette année à Londres. Au Brésil, il aura trente ans. L’âge de Roger Federer…l’année dernière.   Par Rico Rizzitelli

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