Le circuit est planétaire, la compétition permanente et les voyages internationaux incessants : dans le monde du tennis plus qu’ailleurs, les avions font partie intégrante du quotidien des joueurs et des joueuses de haut niveau. Entre aviophobie et crash aériens, retour en dix anecdotes sur le moyen de transport préféré (ou honni) de la petite balle jaune.
1/ Marc Rosset, Mats Wilander et la chance en avion
En 1988, Mats Wilander, alors N°1 mondial, envisage de se rendre aux Etats-Unis pour se faire opérer du genou en vue du prochain Open d’Australie. Mais à quelques jours de Noël, le Suédois hésite et, à la dernière minute, renonce. Belle intuition : le 21 décembre 1988, le vol Pan Am 103 qu’il devait emprunter explose au-dessus de la ville de Lockerbie en Ecosse, victime d’un attentat attribué à la Libye. Aucun survivant. Dans la même veine, Marc Rosset perd au premier tour de l’US Open 1998. Une grosse surprise. Il ne lui reste plus qu’à retrouver la Suisse, et réserve alors un siège sur un appareil de la compagnie Swissair. Préférant s’entrainer encore quelques heures de plus sur les courts de Flushing Meadows, il renonce à s’y installer… Le vol 111 New York-Genève en question s’écrase en mer canadienne, tuant au passage deux cent trente passagers !
2/ Avion militaire, Bill Tilden et un photographe
En 1920, lors de la finale du championnat des Etats-Unis à Forest Hills, Bill Tilden est opposé Bill Johnson, tenant du titre. Le match est serré, l’enjeu de taille : le gagnant de la rencontre prendra la première place du classement international. Mais au début de la cinquième manche, un avion militaire qui plane au-dessus du court pour prendre des clichés s’écrase violemment à quelques encablures du stade. Le photographe et le pilote sont tués sur le coup. La stupeur envahit le stade, mais le match reprend finalement et Tilden devient numéro 1 mondial.
3/ « Nadal m’a serré dans ses bras »
Wojtek Fibak, ça vous parle ? Plus grand joueur que la Pologne ait offert au monde, l’ancien vainqueur de l’Open d’Australie croise un jour de 2010 Rafael Nadal dans les allées du tournoi de Monte-Carlo. Coïncidence : cette rencontre survient quelques jours après le crash de l’avion Tupolev Tu-154 qui provoque la mort des 96 passagers, dont celle du Président polonais Lech Kaczynski. Les deux joueurs échangent quelques mots. Puis l’Espagnol, submergé par l’émotion, se met soudainement à enlacer Fibak. Des larmes glissent même sur son visage. « Nadal m’a serré dans ses bras, raconte l’embrassé. Il m’a dit qu’il était très attaché à la Pologne, qui était le pays où il a gagné son premier titre ATP (au tournoi de Sopot, en 2004, ndlr). Je n’en revenais pas. Quel type ! »
4/ « Ce type est un crétin »
En 2010, le joueur américain Wayne Odesnik est arrêté à l’aéroport de Brisbane, en Australie, avec des bagages importuns : huit fioles remplies d’hormones de croissance, soucieusement emmitouflées dans quelques-unes de ses chaussettes. Pour se défendre, il affirme aux juges que cette substance lui a été recommandée comme traitement pour soigner ses blessures, mais il est incapable néanmoins de produire quelconque autorisation thérapeutique, ni de se souvenir du nom du praticien qui lui aurait prescrit ce fameux remède. Résultat : il écope d’une amende de 6 000 euros, d’une suspension de deux ans et d’une punchline de son compatriote Andy Roddick : « C'est de la pure tricherie et les instances devraient le virer du tennis. J'étais choqué. Nous n'avons pas besoin d'histoires comme ça. Je n'ai aucune sympathie pour lui. Ce type est un crétin ».
5/ « Oui, j’ai un jet privé. Mais aussi un hélicoptère et un sous-marin »
« J’ai assez donné pour le tennis et le tennis m’a donné assez. Je peux rentrer à la maison en jet privé », a dit un jour Pete Sampras en fin de carrière. Désormais, les joueurs sont moins patients. Pour plus de confort et de rapidité, les meilleurs d’entre eux n’hésitent même plus à faire appel à des sociétés de location de jets privés. Ou même à s’en offrir un personnel. C’est le cas d’Ernest Gulbis, à qui on aurait souvent « reproché » de voler en illimité grâce à l’avion de son père, l’un des hommes les plus riches de Lituanie. Une rumeur à laquelle l’intéressé a récemment répondu, non sans ironie : « Oui, j’ai un jet privé. Mais aussi un hélicoptère et un sous-marin ».
6/ « Le tennis est un cirque ambulant »
Sydney, Tokyo et Paris. Trois villes éloignées. Trois continents. Trois tournois. Un seul joueur : Boris Becker. À 18 ans seulement, l’Allemand entreprend ce tour du monde en 21 jours ponctué par trois victoires. « Le tennis professionnel est un cirque ambulant, explique-t-il en fin de voyage. Cette tournée à travers le monde a été une formidable expérience et ce sont sans doute les trois meilleures semaines de tennis de ma carrière.». Nul doute qu’il faut un minimum encaisser le jet-lag pour supporter un tel périple : parti de Hong-Kong, où il jouait une exhibition, Becker met dix heures d’avion pour rallier Sydney. Puis, une fois son tournoi remporté, dix heures supplémentaires pour retrouver Tokyo, et enfin, une fois le titre en poche, quinze heures pour rejoindre Paris. L’intéressé d’atterrir : « Après la France, j’ai quasiment dormi 24 heures ».
7/ Aéroport, US Open et revues pornographiques
L’US Open est un monde de démesure. Entre l’odeur des graillons et celle des hamburgers, le « plus grand chapiteau du monde », comme l’appelait Henri Leconte, a longtemps tenu sa réputation grâce au passage, au-dessus des courts, des avions de l’aéroport de La Guardia. En 1978, la fédération américaine a en effet l’idée d’installer le tournoi au bout des pistes de l’un des aéroports les plus fréquentés du pays. Un an plus tard, lors d’un mythique match face à John McEnroe, Ilie Nastase, perturbé par ce vacarme aérien, demande à arrêter le match. Son excuse ? Le Roumain souhaite téléphoner à la tour de contrôle de La Guardia et voir si les avions ne peuvent pas être détournés. Requête refusée. « Dehors comme dedans, j’ai jamais aimé les avions, explique quelques années plus tard Nastase dans son autobiographie. Je buvais souvent lors de mes longs vols pour m’aider à me relaxer. Ou alors je feuilletais des revues pornographiques. Et croyez-moi, ce sont bien les seules choses que j’ai eu la patience de lire un jour jusqu'au bout ».
8/ « Je ne pouvais plus monter dans un avion »
Grand espoir du tennis français, Olivier Mutis a pendant deux ans été contraint d’adapter son calendrier international à son aérodromophobie, ou phobie des avions. Une appréhension contractée lors d’un décollage en Grèce, en 2000. « Quelques minutes après avoir quitté le sol, une forte odeur de brûlé s’est répandue dans l’appareil qui a piqué du nez, tous les voyants se sont allumés, se souvient Olivier Mutis dans le Républicain Lorrain. J’étais traumatisé, j’ai vomi dans les toilettes, j’étais très mal. Mon coach en revanche l’a vécu différemment, il était hilare comme un enfant qui sort d’un manège à sensations dans un parc d’attractions. » Conséquences lourdes : le joueur « ne peut plus monter dans un avion » et refuse dès lors les tournois trop éloignés. « J’ai privilégié la France, l’Allemagne, la Belgique, l’Italie… en fait les tournois à 500 kilomètres à la ronde, avoue le joueur. Tous ceux que je pouvais rejoindre en voiture ». Retraité depuis 12 ans, il assure aujourd’hui prendre l’avion sans trop de difficulté mais toujours en première classe, quitte à casser sa tirelire : « Pour plus de sécurité et de champagne ».
9/ Djokovic a-t-il vraiment joué sur les ailes d’une avion ?
Qu’est-ce qu’on ne ferait pas pour son sponsor ? En 2011, comme promis depuis longtemps par son équipementier Head, Novak Djokovic a joué un match de tennis sur les ailes d’un avion en plein vol. La preuve en images, avec une question : véritable exploit ou montage vidéo ? Vous seriez déçus de la réponse…
10/ Un aéroport sponsor d’Avarane Rezaï
En 2006, la jeune Française Aravane Rezaï, révélation de la saison, signe son premier contrat professionnel avec un sponsor pour le moins inattendu : l’aéroport de Beauvais, dans le Nord de la France. Durant plusieurs mois, le logo de l’aérodrome s’est affiché sur la liquette de la joueuse contre une aide financière estimée à 30 000 euros annuels et la gratuité totale, pour elle et ses accompagnateurs, sur tous les vols à partir de l’Oise. A l’époque, Marc Amoudry, directeur général de la Chambre de Commerce et d’Industrie du coin (CCI), déclare : « Dans un ou deux ans, Aravane n’aura sans doute plus besoin de l’Aéroport de Beauvais ou alors, il faudra que nous rajoutions un zéro au contrat. Mais nous aurons été son premier sponsor ». Et son dernier.