Visiblement Benoît Paire en a gros sur la patate. Après sa victoire en cinq sets et quatre heures de jeu face à Julien Benneteau (prononcer bé-né-to et non baine-to, zut à la fin !), le 98e joueur mondial a serré la main de son adversaire, celle de l'arbitre, rangé ses raquettes, offert les cadres fracassés durant la partie (Benoît Paire oblige) aux spectateurs et s'est effondré en larmes.
C'est rare de voir un joueur de tennis pleurer, à part Roger Federer et Andy Murray. Encore plus après une victoire au premier tour.
Qu'est ce qui a déclenché ce gros chagrin ?
D'abord, la fatigue. Après quatre heure sous le cagnard new yorkais, « Ben » a été submergé par la fatigue, lui qui ne disputait que son 28e match de l'année dans un tableau final du circuit principal. Et puis, Benoît a très peu parlé durant la partie, ce qui pour lui, est un effort énorme. On connait la tension qui existe dans les match franco-français, qui plus est en Grand Chelem. C'est rarement drôle. Quelques exemples me viennent à l'esprit : Grosjean-Clément (demi-finale de l'Open d'Australie 2001), Clément-Santoro (1er tour Roland-Garros 2004), Monfils-Simon (3e tour Open d'Australie 2013) et bien d'autres. Celui-ci n'a pas dérogé à la règle.
Aussi, ce matin, certains évoquaient le fait que ce soit compliqué de jouer contre « un pote ». Là permettez-moi d'émettre un doute. Je ne dis pas qu'ils se détestent mais on connait l'amitié qui existe entre Benneteau et Llodra ainsi que la non amitié entre Llodra et Paire (remember Miami 2013). Paire et Bennet ne sont pas vraiment potes, selon moi.
Mais pour expliquer les sanglots de l'Avignonnais, il y a aussi et surtout la saison grise qu'il effectue. En début d'année lorsqu'il s'incline face à Marcel Granollers en quart de finale à Chennai 7-6 au 3e, il est classé 26e mondial. Neuf mois plus tard, il accouche d'un classement de 98e. Le 11 août dernier, il quitte même (certes brièvement) le top 100 pour la première fois depuis le 9 avril 2012.
Cette dégringolade est évidemment directement liée à sa blessure au genou qui l'a fauchée en pleine ascension. Il est éloigné des courts pendant trois mois, avant de faire un retour avec le début de la saison sur terre. Mais là, ça se passe de mal en pis, car la douleur réapparaît immédiatement et l'oblige à enchaîner les forfaits et les abandons.
Il vit très mal cette rechute. Il a du mal à accepter la non récompense du fruit de ses efforts pour guérir son genou. Fin avril, Paire est au plus bas, son entraîneur, Lionel Zimbler, lâche d’ailleurs cette phrase inquiétante : « On le tient juste à bout de bras pour qu’il ne s’effondre pas complètement. ».
Contre toute attente, Benoît s'aligne à Roland-Garros et parvient même à passer un tour (sans douleur). Ce match lui laisse entrevoir un meilleur avenir. Derrière ce n'est pas la joie, et il enchaîne quatre défaites consécutives au 1er tour, mais peu importe, c'est un nouveau joueur. Un joueur qui a, durant sa convalescence, pris conscience de la chance qu'il a d'être tennisman professionnel. Chose qu'il avait peut-être prise à la légère auparavant.
Son premier rayon de soleil apparaît à Toronto face à son (vrai) pote Stanislas Wawrinka. Dans un match solide, Benoît s'octroie une balle de match qu'il ne réussit pas à convertir, mais c'est quand même la première fois depuis huit mois qu'il rivalise avec le très haut niveau.
Et finalement, arrive ce premier tour face à Julien Benneteau et enfin une vraie victoire au terme d'une « baston ». Tout cela et plein d'autres choses, sans doute, sont sorties à la fin de ce match sous forme de larmes.
La morale de cette histoire est que le retour de Benoît Paire est une vraie bonne nouvelle pour le tennis masculin français, car des joueurs du niveau de Benoît de sa génération ne tombent pas des arbres, et si cette période compliquée lui a permis de mûrir un peu, alors pour nous/vous les commentateurs/supporters, c'est tout « bénef » !