Dix infos de la quinzaine de Roland-Garros qui vous ont (sûrement) échappées

6 juin 2014 à 00:00:00

Cette année à Roland-Garros, il y a évidemment eu la pluie et les éliminations surprises de Williams ou encore Wawrinka, mais aussi plein de petites phrases, anecdotes et fait survenus pendant le tournoi et passés presque inaperçus.

En attendant l’inévitable finale Nadal – Djokovic et le non moins inéluctable triomphe de Maria Sharapova, ce French Open a heureusement été riche en surprises, anecdotes et petites histoires de toutes sortes. En voici dix, avec pas mal de ping-pong en salles d’interviews.

 

Ernests Gulbis, grand misogyne, génial provocateur ou simple incompris ?

 

Il a beau avoir réalisé le meilleur tournoi de sa carrière sur le court, le Roland-Garros 2014 d’Ernests Gulbis restera marqué par sa réponse à la question « Conseilleriez-vous à vos deux jeunes sœurs une carrière dans le tennis », posée en conférence de presse. Du tac au tac, le Letton répond : « J’espère qu’elles ne feront pas de carrière dans le tennis, car pour une femme, c’est vraiment difficile. Je ne voudrais pas qu’une de mes sœurs devienne joueuse pro. C’est une voie difficile. » Jusque-là, tout allait bien, le point de vue de l’enfant terrible du tennis mondial est défendable : le haut niveau est rude en sacrifices pour une réussite bien incertaine… La chute en revanche est moins claire : « Je crois que les femmes ont besoin de profiter un peu plus que ça de la vie. Elles ont besoin de penser à la famille, aux enfants…  Comment voulez-vous qu’elles puissent penser aux enfants avant 27 ans si elles sont joueuses professionnelles ? » Autant dire qu’il ne s’est pas fait que des ami(e)s…

 

Maria Sharapova, retour à l’envoyeur

 

La joueuse est peut-être monolithique, mais la jeune femme Maria Sharapova ne manque pas de finesse… à partir du moment où les questions posées suscitent son intérêt. Interrogée à propos de la saillie d’Ernests Gulbis, son œil a pétillé : « Il est mignon. Vous savez, je ne crois pas qu’il faille prendre au sérieux tout ce qu’il dit ! » Avant de développer un raisonnement plus nuancé qu’attendu : « Ce sport amène tellement de possibilités aux femmes. Il a changé ma vie, je ne regrette absolument pas ce qu’il m’a apporté et les étapes qu’il m’a fait franchir. C’est compliqué d’avoir un avis tranché : c’est vrai, le matin, je me dis parfois que je ne voudrais pas que mes enfants, plus tard, vivent la même chose que moi. Mais quand je suis devant des milliers de spectateurs à vivre des moments extraordinaires, je me dis que si, finalement. »

 

Roger Federer et ses records syndicaux

 

Il est comme ça, Roger Federer : même dans une petite quinzaine, il tombe des records. Battu en huitième de finale par Ernests Gulbis, l’homme aux 17 Grands Chelems n’en a pas moins ajouté deux nouvelles lignes à son Guinness Book personnel : il est devenu le seul tennisman de l’Histoire a avoir gagné plus de 60 matchs dans les quatre tournois majeurs (73 en Australie, 61 à Paris, 67 à Wimbledon, 67 à l'US Open) et, accessoirement, le joueur ayant le plus régulièrement répondu présent en deuxième semaine de Roland-Garros (12 fois, une unité de mieux que Guillermo Vilas).

 

Jeunesse ardente…

 

On n’avait tout simplement jamais vu ça : les trois premières têtes de série d’un tournoi du Grand Chelem éliminées lors des trois premiers tours. A Roland-Garros, Serena Williams (n°1, 2e tour), Li Na (n°2, 1er tour) et Agnieszka Radwanska (n°3, 3e tour) ont, bien malgré elles, écrit l’Histoire. Curiosité : elles ont toutes trois perdu face à des joueuses issues de la nouvelle génération et nées en 1993, à savoir Garbine Muguruza, Kristina Mladenovic et Ajla Tomljanovic. L’émergence tant attendue de la nouvelle vague WTA ?

 

… chute violente

 

On n’avait tout simplement jamais vu ça (bis) : les deux champions de l’Open d’Australie éliminés au premier tour du Roland-Garros suivant. Stanislas Wawrinka, balayé à la nuit tombante et devant une poignée de spectateurs par Guillermo Garcia Lopez, et Li Na, éjectée par la Française Kristina Mladenovic, ont écrit une première, dépassés par la pression et les attentes pesant sur leurs épaules. A force de voir Roger Federer, Rafael Nadal ou Serena Williams enfiler les victoires comme des perles, on avait presque fini par oublier que, plus encore que l’exploit ponctuel, l’enchaînement quotidien des succès est le plus grand défi du champion.

 

Petkovic, le tennis, Nietzsche et les existentialistes

 

En sport, il y a les conférences de presse où l’intéressé n’a qu’un catalogue de banalités à débiter - à coup de « C’était un match difficile », « J’ai joué mon meilleur tennis » et « Je ne regarde pas plus loin que mon prochain adversaire » - et puis il y a Andrea Petkovic. Une jeune femme de 27 ans, montée jusqu’au Top 10 mondial et d’une curiosité insatiable. Fan de musique, de sciences politiques et de littérature. Alors quand l’interview dérive soudain vers ses goûts littéraires, aucune raison de s’étonner. Juste savourer : « J’ai deux auteurs favoris : Goethe d’abord, qui est comment dire… Pour moi, Goethe est le plus grand génie quant à l'utilisation des mots. Si vous ne parlez pas allemand, vous ne saurez pas ce que je veux dire. Et il y a David Foster Wallace. J'ai commencé à le lire il y a quelques mois. Je suis ébahie par ce qu'il écrit, c'est un des plus grands philosophes. Nietzsche, je ne suis pas d'accord avec ce qu'il écrit, c'est très noir, très sombre, mais il a une plume superbe. J'ai aussi lu les existentialistes français, Sartre, Camus, voilà. » Oui, voilà.

 

My Taylor is rich

 

Instant mea culpa : spectateurs, mais aussi journalistes, ont hésité entre l’incrédulité et le sourire condescendant quand Taylor Townsend a fait son apparition sur le court Suzanne-Lenglen, pour y défier Alizé Cornet au second tour. Il faut dire que la jeune fille, tout juste 18 ans, affiche des rondeurs évoquant plus une chanteuse de gospel qu’une sportive de haut niveau. Mais les petits sourires n’ont duré que le temps de l’échauffement : l’Américaine s’est chargée ensuite de les effacer à grands coups de volées inspirées, éliminant au passage la n°1 française. Il y a bien longtemps que le tennis féminin n’avait engendré pareil talent brut. A vrai dire, avec ce physique un peu rond dans lequel se niche une « patte » gauche d’une incroyable facilité, n’y a-t-il pas les reflets d’un certain Henri Leconte ?

 

La cabane au Canada s’agrandit

 

Tabernacle! D’habitude, un Nord-Américain qui brille en tennis est forcément Américain. Mais voilà que le Canada n’en finit plus de rebattre les cartes et d’écrire les plus belles pages de son histoire sur les courts. Tandis que les enfants de l’Oncle Sam ont tous plié bagages avant les quarts, Eugénie Bouchard et Milos Raonic ont représenté le pays à la feuille d’érable dans leur Grand huit respectif. Pour faire simple : Bouchard est la première joueuse de son pays à disputer deux fois les demi-finales d’un Grand Chelem… qui plus est à la suite : à Melbourne en janvier et maintenant à Paris. Raonic est quant à lui le premier Canadien à jouer un quart de finale en majeur de toute l’ère Open. Il était temps : à 41 ans, Daniel Nestor commençait à se sentir un peu seul à porter haut les couleurs rouges et blanches en deuxième semaine des tournois du Grand Chelem… de double.

 

De pères en fils

 

Ils s’appellent Bubka, Mecir et Gomez. Prénoms ? Sergueï Jr, Miloslav Jr et Emilio. Le premier est le fils de la légende ultime du saut à la perche, le deuxième le rejeton du mythique « Chat » champion olympique de tennis en 1988, et, le dernier, la progéniture d’Andres, vainqueur de Roland-Garros en 1990. Les trois étaient engagés dans les qualifications de Roland-Garros. Bubka a perdu au premier tour, Gomez a gagné un match, tandis que Mecir – portrait craché de papa – est parvenu à décrocher son billet pour le tableau final. Et si les histoires de fratries sont monnaie courante en tennis, c’est moins le cas en matière d’hérédité : seuls les Stolle (Fred et Sandon), les Dent (Phil et Taylor) et les Roger-Vasselin (Christophe et Edouard) ont par le passé réussi la prouesse de disputer Roland-Garros à deux générations d’écart. A ce propos : grâce à son premier tour disputé contre Jo-Wilfried Tsonga, Edouard Roger-Vasselin a imité son père, qui avait foulé le Central en simple trois décennies plus tôt (demi-finaliste en 1983 notamment). Ils sont les seuls pères et fils à pouvoir se vanter d’avoir disputé un match sur le court Philippe-Chatrier.

 

Nicolas « chip and charge » Mahut

 

Il n’y a pas qu’au filet que Nicolas Mahut peut se montrer tranchant : battu au premier tour par Mikhaïl Kukushkin, le Français n’a pas apprécié de se faire accueillir en salle d’interview par un journaliste américain visiblement peu au fait de son résultat, et qui salivait à l’avance devant un deuxième tour Mahut / Isner, remake de leur blockbuster de Wimbledon, il y a quatre ans. Transcript intégral :

Journaliste : Félicitations!

Mahut : Félicitations ? J’ai perdu.

Journaliste : Vous avez perdu ? Oh. Alors que s’est-il passé?

Mahut : Vous êtes sérieux ? Vous avez vu le match ?

Journaliste : Non. Je croyais que vous aviez gagné. Je suis désolé.

Mahut, tournant la tête vers l’autre côté de la salle : Questions en français.

 

Par Guillaume Willecoq

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