Depuis Séoul en 1988, la place du tennis se renforce à chaque olympiade. Presque tous les meilleurs chercheurs d’or de la petite balle ronde seront à Londres cette année. Présentation de ce tournoi plutôt insolite pour joueuses et joueurs du circuit mondial.
Athènes : le tournoi de tennis était présent dès 1896 pour les Jeux de la première olympiade. Mais seulement pour les hommes. Les femmes doivent patienter quatre ans et seront ensuite privées de ceux de 1904 à Saint-Louis, Missouri, un havre du féminisme, on s’en doute... Le double dames lui n’apparaît qu’en 1920 pour disparaître après les Jeux de Paris en 1924 pour d’obscures raisons politiques.
Beurre : le tennis reviendra bizarrement comme épreuve de démonstration en 1968 à Mexico - l’année où le tennis devient Open, diantre - puis en 1984 à Los Angeles avec la promesse de revenir dans le giron olympique quatre ans plus tard. Deux tournois dont la postérité a oublié les vainqueurs…
Couple : à eux deux, Steffi Graf (championne olympique à Séoul en 1988, l’année de son super Grand Chelem, Ndlr) et Andre Agassi (sacré à Atlanta en 1996, Ndlr) ont absolument tout gagné : les quatre tournois du Grand Chelem, la Fed Cup par BNP Paribas, la Coupe Davis par BNP Paribas et le Masters.
Di Pasquale, Arnaud : avant de disparaître prématurément et de rejoindre la Direction Technique Nationale, ADP fut ce junior prodige qui promettait beaucoup et arracha la médaille de bronze à Sydney contre un Federer pré-pubère…
Elena, Dementieva : si chez les hommes, il y a beaucoup d’outsiders parmi les champions olympiques, ce n’est pas le cas chez les femmes. Graf en 1988, Capriati en 92, Davenport en 96, Venus Williams en 2000 et Hénin en 2004. Seule exception, le triplé russe de Pékin, en 2008. Finaliste à Flushing et à Roland, demi-finaliste dans les deux autres tournois du Grand Chelem, Dementieva s’est retirée à vingt-neuf ans avec l’or olympique comme plus haut fait d’armes. Battue en finale en Chine, Danira Safina a pris une longue pause à vingt-cinq ans, à l’automne dernier, après des places en finale à Roland-Garros et à Melbourne sans qu’on sache si elle reviendra… Enfin, pour Zvonareva, lire plus bas.
Federer, Roger : dix-sept titres du Grand Chelem, vingt Masters 1000, six Masters Cup. Ne manquent que la Coupe Davis par BNP Paribas - où on dépend forcément des autres - et l’or olympique en simple. Qui osera détruire le rêve du plus grand joueur de l’histoire ? En deux sets gagnants, ils sont nombreux à en rêver.
Gasquet, Richard : Comme Nadal, le Biterrois vient d’avoir vingt-six ans. Il est dans la seconde partie de sa carrière. Personne ne le dit, ni ne l’écrit mais le grand rêve est sans doute passé. Gasquet ne gagnera pas de tournoi majeur malgré son talent ébouriffant. Quoi de mieux pourtant qu’un tournoi en deux sets gagnants sur l’herbe, la surface qu’il préfère ? Aux côtés des Massu ou Rosset, le Français pourrait faire un champion olympique improbable des plus crédibles…
Henman Tim (et Neil Broad) : les deux joueurs anglais ont enlevé la seule médaille (en argent, Ndlr) du tennis britannique depuis que celui-ci est redevenu un sport olympique en 1988. C’était à Atlanta, en 1996, en double, contre les « Woodies » : Woodforde et Woodbridge. Auparavant, le tennis d’Albion avait totalisé, entre 1896 et 1924, trente-neuf médailles, dont quinze en or. A l’époque, il faut dire, le soleil ne se couchait jamais sur l’Empire…
Istomin, Denis : encore un fantôme qui peuple l'élite mondiale (34è, Ndlr) et pourtant... L'Ouzbek peut constituer un danger pour n'importe qui, surtout sur gazon. Rarement brillant en Grand Chelem, Istomin vient d'atteindre les huitièmes de finale à Wimbledon. Une première. Il a aussi sorti Verdasco au premier tour des Jeux. Longiligne, puissant, en progression constante, il arrive dans la meilleure période de sa carrière. Seul hic, s'il élimine le Luxembourgeois Muller au deuxième tour, il devra probablement affronter Federer à celui d'après...
Jaziri, Malek : le Tunisien est probablement un des joueurs les plus méconnus du top 100. En 2012, il n'a joué que dix matchs sur le circuit principal pour 7 défaites mais pointe à une avantageuse soixante-dixième place. Bénéficiaire d'une wild-card pour les J.O, il doit son rang à une présence assidue dans les challengers. Une sorte d'escroquerie que le règlement permet...
Kafelnikov, Ievgueni : avant lui, il y a eu Metreveli dans les 70’s et Chesnokov dans les 80’s : deux incongruités de l’empire soviétique. Après ça, il y eut le rêve occidental et ces flopées de Russes qui déferlaient sur le monde occidental. Fidèle à la légende, Kafelnikov rafle deux tournois du Grand Chelem et les J.O. Faut dire qu’il était né avant la chute du Mur et de ce côté-là, il n’y a jamais rien eu de mieux que l’or olympique avec l’hymne en bonus track.
Lleyton Hewitt : avec le temps qui passe, on aurait presque oublié que très jeune il a été numéro un mondial. De la même génération que Federer, Hewitt aura été plus précoce mais aussi plus météorique au plus haut niveau. On se souvient de cette finale de Wimbledon de 2002 contre David Nalbandian où personne ne montait au filet.
Mecir, Miroslav : le « Chat » fut un des génies méconnus de ce jeu. Finaliste à Flushing et en Australie, demi-finaliste à Paris, il fut à chaque fois battu par son compatriote Ivan Lendl. Son cauchemar. Le Slovaque a arrêté sa carrière en 1989 à vingt-cinq ans, vaincu par son dos, non sans gagner le titre olympique à Séoul, deux ans plus tôt.
Nadal, Rafael : « Le jour le plus triste de [sa] vie ». C’est ce qu’a déclaré le champion espagnol à l’annonce de son forfait. Outre sa non-participation au tournoi, le champion olympique regrettait amèrement de ne pas être le porte-drapeau de sa délégation…
Outre-Quiévrain : Darcis qui sort Berdych dès le premier jour, Goffin qui promet beaucoup, Wickmayer qui finira par retomber sur ses pieds et Clijsters qui reste Clijsters : les Belges pourraient faire quelques dégâts dans les tableaux…
Paes Leander : les habitants de Fréjus n’ont pas oublié ce garçon de trente-neuf ans qui élimina la France presque à lui tout seul en quart de finale de la Coupe Davis par BNP Paribas en 1993. Depuis, Paes a surtout prospéré en double, mixte et messieurs, avec treize titres du Grand Chelem et le bronze olympique à Atlanta alors qu’il n’est jamais monté plus haut que la soixante-treizième place mondiale. A Londres, il jouera les doubles…
Querrey, Sam : on aurait adoré voir jouer ensemble John Isner et Sam Querrey, deux bûcherons des Appalaches égarés dans le All England Club. Servir comme des brutes du haut de leurs double mètre et retournant au bonheur la chance sur l’herbe plus ou moins verte de Wimbledon. Sauf qu’Isner jouera avec Roddick et vu que les frères Bryan sont incontournables, il n’y aura pas de quoi frissonner…
Rosset, Marc : le grand échalas suisse brillait surtout sur dur. Il s’était rendu à Barcelone en 1992 pour voir, boire et faire la teuf. Résultat : sans se prendre la tête, avec un peu de réussite, il prend l’or olympique sur la terre battue catalane en éliminant Jim Courier, le numéro un mondial de l’époque, Sanchez et Arrese à domicile et Goran Ivanisevic, la tête à l’effondrement de l’ex-Yougoslavie. Depuis douze ans, toute l’Helvétie attend que Federer lui succède.
Serena (Williams) : comme Roger Federer, Serena a déjà gagné l’or olympique ; en double. Deux fois. Avec sa sœur Venus. A Sydney en 2000 et à Pékin, il y a quatre ans. En Australie, l’aînée de la famille avait même raflé le simple. Vainqueur à Wimbledon comme Roger, Serena sait que c’est cette année ou jamais…
Top 20 : au contraire des premiers tournois olympiques, presque tous les meilleurs sont sur le pont. Seuls Nadal et Monfils chez les hommes, Petkovic et Kanepi chez les femmes ont déclaré forfait sur blessure. Dolgopolov et Bartoli ne répondaient pas aux critères de sélection en Coupe Davis ou en Fed Cup par BNP Paribas. Victime d’une arythmie cardiaque, Mardy Fish a préféré reprendre en douceur…
Unique : les vainqueurs, et même les autres, gagneront des points ATP et WTA en fonction des tours qu’ils passeront mais aucun prix de leurs organismes respectifs. Ça s’appelle la trêve olympique.
Vogt, Stéphanie : la tenniswoman du Liechtenstein sera une des huit porte-drapeaux à jouer à la petite balle jaune. L’accompagnent : Marco Baghdatis (Chypre), Max Mirnyi (Bélarus), Agnieszka Radwanska (Pologne), Horia Tecau (Roumanie), Maria Sharapova (Russie), Novak Djokovic (Serbie) et Stanislas Wawrinka (Suisse).
Worple Road : l’ancêtre du All England Club qui accueille le tournoi de tennis aux Jeux de Londres de 1908. En 1948, la capitale anglaise accueille une deuxième fois les Jeux olympiques, mais il n’y avait pas de tournoi de tennis…
X, facteur : Grigor Dimitrov a du talent plein les mains, vient d’un pays sans tradition tennistique masculine et n’a pas encore un classement à la hauteur de ses dons. L’inconnu dans la maison, c’est peut-être bien lui…
Youzhny, Mikhail : révélé en finale de la coupe Davis par BNP Paribas il y a tout juste dix ans dans un cinquième match homérique contre Paul-Henri Mathieu, le Russe, 30 ans, a fait au moins quart de finale dans chacun des quatre tournois du Grand Chelem mais il bute toujours contre les meilleurs. Quart de finaliste à Wimbledon cette année, il serait l’outsider parfait si Roger Federer ne pointait dans son tableau dès le deuxième tour.
Zvonareva, Vera : la troisième luronne du podium de Pékin en 2008. Médaille de bronze, elle a aussi fait deux finales de Grand Chelem à New York et à Londres mais n’a elle pas pris sa retraite. Elle est encore là à Londres.
Par Rico Rizzitelli