Comment je suis sorti de mon match, par Alex Corretja

27 sept. 2013 à 00:00:00

Comment je suis sorti de mon match, par Alex Corretja
Pour Alex Corretja, la finale de Roland Garros en 2001 face à Gustavo Kuerten s’est jouée à « deux centimètres près ». Découvrez de quel point du match il parle en lisant son interview dans le MAG We Are Tennis.

Le tennis est sans doute le plus éprouvant de tous les jeux. Nerveusement, c’est certain. Difficile d’éluder le jeu, l’enjeu, l’adversaire, le vent, le public ou la jolie fille au foulard en soie. Comment je suis sorti de mon match ? Alex Corretja se souvient de la partie la plus importante de sa carrière : la finale de Roland Garros 2001.

 

En 2001, vous disputez la finale de Roland Garros face au déjà double vainqueur Gustavo Kuerten. Vous vous inclinez en quatre sets (6/7 7/5 6/2 6/0). Que représente ce match pour vous ?

C’est clairement le plus mauvais souvenir de ma carrière. J’avais déjà joué une finale à Roland Garros trois ans plus tôt, en 1998. Mais cette fois-là, je n’avais jamais eu l’impression de pouvoir gagner. Je ne jouais pas mal, mais Carlos (Moya, ndlr) avait toujours fait la course en tête. Quelque part, je crois que j’étais déjà content d’être en finale. Je n’ai jamais eu la sensation de tenir, en partie, la coupe en main, comme ce fut le cas en 2001. Cette année-là, j’étais prêt pour gagner. Voilà : 1998, c’est ma première finale de Grand Chelem. 2001, c’était la chance de ma vie.

 

Ce match connaît clairement un tournant à 5-5 dans le deuxième set, alors que vous avez gagné le premier set au jeu décisif…

Oui. J’avais fait un très bon début de match. « Guga » était le meilleur joueur du monde sur terre battue à l’époque. Il m’avait battu assez facilement lors de nos rencontres précédentes, trois fois de suite à Rome. Gagner ce premier set au jeu décisif, c’était idéal. Le deuxième set est également serré, et puis il y a cette balle de break à 5-5 qui, si je l’avais concrétisée, m’aurait permis de servir pour le set dans la foulée… On joue un très long échange, et à la fin mon revers sort de quelques millimètres dans le couloir. Quelques minutes plus tard, c’est lui qui me breake et gagne le set.

 

Jusque-là, la partie était très disputée. Ensuite, Kuerten domine de la tête et des épaules. Comment un seul point a pu tellement changer la physionomie du match ?

Peut-être pas le point seul, mais en tout cas la perte du set. J’ai pris un coup derrière la tête en le perdant. Psychologiquement, j’étais bloqué. La déception d’avoir perdu le set était plus forte que le reste. Je n’arrivais pas à me reprendre mentalement. Soudain, je revoyais en face de moi le joueur qui me battait systématiquement depuis trois ou quatre ans.

 

Malgré l’enjeu et le fait de savoir qu’à un set partout le titre était encore loin d’être joué ?

J’aurais dû me reprendre, mais je n’y parvenais pas. Je n’avais pas la sensation de pouvoir inverser la tendance. J’ai baissé les bras. C’était dur de me détacher de cette idée : j’étais tout proche de mener deux sets à zéro, un avantage souvent décisif dans un match sur terre battue. « Guga » avait l’habitude de gagner ce genre de finales. Moi, je n’étais pas un super champion, et gagner Roland Garros juste une fois dans ma vie aurait été un rêve. Malheureusement ça n’est pas arrivé. Il faut l’accepter.

 

Vous est-il arrivé de reparler de ce match avec Kuerten ?

On en a déjà reparlé, oui. Lui et moi avons de bonnes relations. On a reparlé du match, des conditions de jeu très venteuses… Il m’a dit penser qu’il ne serait pas revenu s’il s’était retrouvé mené deux sets à rien. Peut-être que cette finale s’est jouée à deux centimètres près en revers… Mais maintenant c’est loin. « Guga » a mérité sa victoire. Et moi j’essaie de transmettre mon expérience des bons et des mauvais moments à mes joueurs (il est capitaine de l’équipe espagnole de Coupe Davis par BNP Paribas, ndlr).

 

Quand vous revenez à Roland Garros chaque année, vous y repensez, malgré tout, ou c’est vraiment du passé ?

Pas plus que ça. Les bons souvenirs ont pris le dessus et revenir à Roland Garros est toujours un moment agréable. J’y connais tellement de personnes, des gens qui travaillent à l’organisation, des joueurs, actuels ou anciens… Pour moi Roland Garros est d’abord synonyme de tous ces visages que je retrouve avec plaisir. A chaque fois, les gens sont contents de me revoir. C’est ce que je retiens en premier. Faute d’avoir gagné le tournoi, cela veut au moins dire que j’ai laissé un bon souvenir en tant que personne.

 

Propos recueillis par Guillaume Willecoq

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