Top 10 des disqualifications au tennis
Dimanche 17 juin, David Nalbandian a été disqualifié en finale du Queen’s pour avoir oublié qu’il y avait un juge de ligne juste derrière un panneau publicitaire. Certes, le sang a coulé. Mais ça fait plus d’un siècle maintenant que le tennis, le plus éprouvant nerveusement de tous les jeux, transforme le flegme en jus de navet. Coup de projo sur les plus beaux pères spirituels de Nalby, ou 10 manières différentes de se faire disqualifier.
1. Nicolae Mishu – Wimbledon 1924
Malgré sa blessure de guerre qui l’oblige à servir à la cuillère, le Roumain Nicolae Mishu a un sens du spectacle peu commun. Un vieux filou dadaïste qui ne peut s’empêcher de servir dos au filet ou de se mettre dans le carré de service pour retourner. Sauf qu’à la première contrariété, la fête est finie. Troisième tour de Wimbledon, 1924. Son adversaire, l’Américain John Richardson, vient de heurter la bande du filet pour la troisième fois du match. « Je ne veux pas jouer contre un cocu pareil ». Le règlement prévoit de sanctionner tout joueur qui quitte le court. Ses raquettes et chiffons resteront au pied de la chaise d’arbitre et Mishu fuira Londres dans la journée, avant d’offrir un petit cadeau à Richardson quelques mois plus tard pour s’excuser : des cigarettes !
2. Earl Cochell – Forest Hills 1951
Il y avait des punks dans le tennis des années 50 ! Bien qu’il mène dans son huitième de finale contre Gardnar Mulloy, Earl Cochell canarde tous azimuts après un litige avec l’arbitre. Il ne fait plus aucun effort en retour, sert à la cuillère et décide de devenir gaucher pendant tout un set. Une parodie de tennis qui vire même au sketch à la Marx Brothers quand l’Américain essaie de s’emparer du microphone du juge de chaise pour demander au public d’arrêter de le siffler. Un petit doigt d’honneur à tout le monde en partant et son sort est scellé. Suspendu à vie par la Fédération américaine, Earl ne rejoua plus jamais dans un grand tournoi. Navrant.
3. Stefano Pescosolido – Sydney 1992
Quand la raquette d’un joueur énervé se retrouve dans la gueule d’une spectatrice, ça peut être cocasse. Mais quand la spectatrice en question est une copine de son adversaire, ça l’est doublement. C’est ce qui est arrivé à Stefano Pescosolido en 1992, exclu lors d’un match de qualification à Sydney pour avoir blessé à l’œil droit une jeune femme assise en tribune. Elle quittera le stade sur civière.
4. Jimmy Connors – Boca West 1986
Ne supportant pas que l’arbitre lui tienne tête pendant son match très attendu contre Lendl, Jimmy Connors prend ses affaires et, fier-à-bras, quitte le court en serrant la main du juge sous les acclamations d’une meute totalement acquise à sa cause. Lendl n’en revient pas : « Je pensais qu’il faisait tout ce tam-tam pour attirer la sympathie du public ». En fin de carrière, passant du statut de star à celui de mythe vivant, il peut se permettre d’injurier quiconque sans risque. En 1991 à l’US Open, le jour de son match mythique contre Aaron Krickstein, l’arbitre se laissa ainsi gentiment insulter de « fils de pute, résidu d’avorton ! ».
5. John McEnroe – Open d’Australie 1990
En 1990, le circuit fait peau neuve et le règlement se durcit. Sympa, l’Américain donne rapidement l’occasion aux patrons du tennis mondial d’étudier un cas pratique. Dans son match contre Michel Pernfors, après avoir zyeuté fixement une juge de ligne présumée fautive, Big Mac balance un « fuck off » fatal au superviseur Ken Farrar, appelé à la rescousse. McEnroe est enfin récompensé pour l’ensemble de son œuvre. Lui qui, à presque 31 ans, n’avait jamais été disqualifié en tournoi… http://www.youtube.com/watch?v=_Z8IACYeL-c
6. Xavier Malisse – Miami 2005
Avec son look de surfeur écolo, Xavier Malisse donne l’impression d’être un ado tout gentil. Impression trompeuse. Sa géante crise d’angoisse contre Ferrer en 2005, trop grossière pour être fausse, fut parsemée de gestes hystériques et de belles insultes en flamand. Le Belge se roule par terre, houspille une juge de ligne en bombant le torse et fracasse à la barbe du superviseur son outil de travail sans même qu’il n’ait à lui demander de partir… il le fait de lui-même. http://www.youtube.com/watch?v=Oe6uLXaAnhQ
7. Ilie Nastase – Palm Springs 1976
« C’était un connard et tout le monde le savait. Sur le court, il était toujours en train de me rappeler le règlement ». Bien décidé à se prendre le chou avec ce futur taulard de Roscoe Tanner qu’il ne peut pas blairer, Ilie Nastase met le paquet. Et ce n’est pas triste. Dès la première chicane, le Roumain plante un piquet de grève derrière la chaise d’arbitre. Pris au mot par son propriétaire, celui-ci le disqualifie. Précision : Nasty l’avait insulté. L’une de ses nombreuses disqualifications. Avec bonne demi-douzaine, il est l’un des recordmen.
8. Jeff Tarango – Wimbledon 1995
Comment ce match sans enjeux entre Tarango et Mronz a fini par faire un buzz mondial ? Tout part d’un « shut up »(« ta gueule », Ndlr) adressé au public et d’un point de pénalité. Jeff Tarango, plutôt du genre écorché vif, lâche alors rageusement ses balles, embarque ses affaires et enjambe la rambarde du petit court numéro 13 en baragouinant toute sa haine sur Bruno Rebeuh : « Vous êtes l’arbitre le plus corrompu du circuit ! Tout le monde le sait ! ». Quelques instants plus tard dans les allées, sa femme prend le relais en collant une énorme baffe au célèbre arbitre français : « Ce type méritait une bonne leçon. Si Jeff avait fait ce que j’ai fait, il aurait été exclu du tennis à tout jamais. Donc c’était à moi d’agir ». CQFD. http://www.youtube.com/watch?v=qmwQTydi-eQ
9. Andre Agassi – San José 1999
« Je suis scandalisé. Je n’aurais jamais imaginé qu’une chose pareille mette fin au match. Il m’est arrivé de faire des choses bien plus graves ». Ce qu’Andre Agassi pouvait faire et dire avec certains arbitres ne passaient pas avec d’autres. Quelques insanités balancées à un juge de ligne pendant son deuxième tour contre le troisième couteau Cecil Mamiit, et hop, exit la star du tournoi ! « Les mots que j'ai prononcés ne le visaient pas du tout » s’est-il défendu. « Je ne fais pas le règlement, je l’applique », a répondu froidement le superviseur Tom Barnes. Le genre d’histoire qui fait bondir Jacques Dorfmann, l’ancien juge-arbitre de Roland-Garros : « Les arbitres ont tellement peur d’être mal notés qu’ils appliquent à la lettre un règlement qui ne tient nullement compte du contexte ».
10. Jan Kodes – Rome 1974
Qui n’est jamais allé à vau-l’eau en affrontant un Italien à Rome ? Personne. Surtout pas dans ces bouillantes années 70, dans cette ambiance baroque, fellinienne même, où le double vainqueur de Roland-Garros Jan Kodes a retrouvé un jour sa main placée sur le colbach du juge-arbitre venu vérifier que tout se passait comme prévu, c’est-à-dire mal. Kodes avait osé contester une décision étrange à la fin de son deuxième tour contre le local Antonio Zugarelli ! Ses nerfs ont lâché et on l’a expulsé manu-militari. L’Américain Bill Scanlon, lui, avait trouvé la solution pour qu’on le laisse tranquille : « J'ai joué contre Panatta sur le central du Foro Italico. J'ai perdu. C'est ce qui me paraissait la chose la plus prudente à faire. » Par Julien Pichene