En dix ans, We Are Tennis by BNP Paribas n’a pas été seul à grandir. Le tennis a, lui aussi, continué d’évoluer et a même expérimenté de nouvelles règles lors des différentes éditions du Next Generation ATP Finals. Retour sur la première d’entre elle, disputée à Milan, en 2017.
Mardi 7 novembre 2017, sous les coups de 16h30. Après quatre sets assez serrés et à peine deux petites heures de jeu, Daniil Medvedev vient à bout de son compatriote Karen Khachanov. Rien de bien extraordinaire, en apparence ? En apparence seulement. Car en remportant cette rencontre 100 % russe, le Moscovite entre en réalité dans l’histoire. Pour s’en convaincre, pas la peine d’avoir suivi la rencontre. Il suffit de jeter un œil au score final : 2–4, 4–3(6), 4–3(3), 4–2. Un bug informatique, qui a transformé certains 6 en 4 ? Non, seulement un indice dévoilant la particularité d’un tournoi organisé à Milan, dans un gigantesque hall du centre d’exposition du Fiera Milano, en banlieue nord-ouest de la ville, nommé Next Generation ATP Finals.
Réinventer un tennis sexy
Le Next Generation ATP Finals ? Une compétition rassemblant les sept joueurs de moins de 21 ans les mieux classés à l'ATP, plus un invité issu d'un tournoi de qualifications entre les huit meilleurs joueurs italiens de 21 ans et moins, en l’occurrence Gianluigi Quinzi en 2017. Autre objectif de la compétition : expérimenter de nouvelles règles et charmer un public plus jeune, habitué aux courtes vidéos de highlights défilant sur Internet. Les dirigeants du tennis mondial s’inquiètent de l’après big three et comptent sur les nouveaux talents d’aujourd’hui et de demain pour réinventer leur sport. « Notre philosophie, c'est de dire : pourquoi pas ? Pourquoi ne pas essayer de nouvelles choses et pourquoi ne pas être un peu plus créatifs ? On veut rendre le tennis plus excitant et limiter les temps faibles. Nous voulons attirer une nouvelle génération en complément de nos fans les plus fidèles. Il faut réduire l'âge moyen du fan de tennis », ne cache d’ailleurs pas Ross Hutchins, le directeur du tournoi.
Le patron de l’ATP, Chris Kermode, abonde dans le même sens : « Je pense que chaque sport doit s’adapter, doit faire des changements. Nous n’allons pas faire des changements pour changer, mais nous regardons vers l’avenir et vers la prochaine génération de fans. » Voilà pourquoi la phrase "The future is now" est choisie comme slogan de l’épreuve, qui, contrairement au Masters « classique », ne distribue aucun point au classement ATP. Voilà pourquoi, aussi, les spectateurs ont le droit de se balader au gré des 4 500 places disponibles n’importe quand - donc pas forcément lors d’un changement de côté - et n’importe où. Voilà pourquoi, encore, le temps d’une semaine, la petite balle jaune est soumise à des lois totalement inédites… pour ne pas dire insolites.
Ça va vite, très vite… trop vite ?
Les points, d’abord. Si les matchs se jouent, comme lors des Grands Chelems au meilleur des cinq sets, les manches sont limitées à sept jeux (le premier à quatre) avec un tie-break à 3-3 disputé en cinq points. Sans oublier qu’à 40-40, les avantages disparaissent. Conséquence ? Des joueurs parfois paumés, comme un Medvedev pensant avoir perdu un set contre Jared Donaldson alors que le score n'est que de 3-1, des sautes de concentration imméditatement sanctionnées - dans ce format, un break concédé est souvent irrattrapable et les renversements de situation quasiment inexistants - et des duels beaucoup, beaucoup moins longs, malgré un grand nombre de jeux décisifs (25 disputés en 15 rencontres). Pour preuve : lors de cette première édition, seulement deux matchs vont dépasser le cap des deux heures. D'autres spécificités ? Oui : les "let" sont désormais autorisés, un seul medical time out est accordé et un compte à rebours de 25 secondes est visible entre les points, obligeant ainsi les joueurs à se replacer plus vite et à davantage respecter les délais de service.
« Cette règle est bien car comme je n’ai pas un chronomètre dans la tête, je sais où j’en suis. C'est tellement rapide, c'est très exigeant. Mentalement, c'est totalement différent, vous ne pouvez pas avoir un moment où vous vous relâchez. C'est un défi permanent, j'aime vraiment ça », réagit Medvedev, ajoutant que ces nouveautés génèrent du « stress » et que perdre un service équivaut à perdre le set. « C'est trop court, je pense qu'on devrait plutôt jouer jusqu'à 4-4 avant le tie-break. Il y aurait plus d'opportunités de breaker », répond Khachanov, alors que Rublev n’est quant à lui pas convaincu : « Avec ces règles, tout le monde peut battre tout le monde. Je pense que ça n'est pas très juste, parce que j’estime que celui qui gagne doit être celui qui travaille le plus. Je m'entraîne comme un fou, et je dois jouer un set qui dure à peine un quart d'heure ? Non ! » Le public, lui, n’a pas le temps de s’ennuyer.
Le futur, c’est maintenant
Entre les « out ! » et les « fault ! » robotiques, la technologie Hawk-Eye ayant complètement remplacé les juges de lignes pour gagner en efficacité et en précision, il est, par exemple, possible de se délecter de l’échange entre Borna Coric et son entraîneur : les discussions, par micro-interposés, avec le coach sont maintenant autorisées. Un Coric qui achève un de ses affrontements par un ace, alors que son service touche la bande du filet… Une règle que même les arbitres ont du mal à garder en tête, Carlos Bernardes se trompant deux fois en deux jours en signalant des lets. Shapovalov : « C'est bien d'essayer des choses nouvelles, le no-let a un côté divertissant avec des points un peu fous. Le sport a besoin d'avancer, et de changer. » Et si Alexander Zverev a préféré se rendre aux ATP Finals pour lesquels il était qualifié au détriment de ce tournoi foufou remporté par Hyeon Chung, l’Allemand s’est tout de même déplacé à Milan pour disputer un match d’exhibition en ouverture de la compétition. C’est dire le fun entourant cette nouvelle épreuve. « Je ne m'attends pas à ce que les règles les plus sensibles, comme le no-ad à 40A ou les sets de quatre jeux, s'imposent immédiatement. Ni même dans les cinq ans qui viennent. Mais d'ici 10 ans, peut-être », conclut Chris Kermode. Rendez-vous en 2027 !