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Par Arnaud Mahot @ArnaudMahot
Au poker comme au black jack, il est plus facile de remporter le jackpot lorsque l’on possède une bonne main, comprendre ici un tirage favorable.
Au tennis sur toute surface, un joueur qui possède une bonne main est capable de trouver les angles les plus compliqués et de maitriser tous les coups.
La terre battue mélange cette double approche d’une bonne main. Pour triompher sur l’ocre, la maitrise technique doit s’unir à certaines cartes, spécifiques à la surface.
La première carte : Avoir du coeur
La terre battue est la surface la plus exigeante pour l’organisme. Plus lente que le gazon ou le dur, elle favorise les longs échanges de fond de court et par conséquent les défenseurs infatigables. Il faut souvent s’armer de patience, et accepter de jouer le coup supplémentaire, pour réussir à déborder l’adversaire. Un spécialiste de la surface comme David Ferrer a construit ses succès sur un jeu de jambe complet et une endurance à toute épreuve, d’où ses surnoms de « pou », de « cobra » et de « mobylette ». Il a aussi en commun avec d’autres champions espagnols (Costa, Ferrero) d’avoir grandi sur cette surface, et développé très tôt un tennis axé en majeure partie sur une condition physique irréprochable. Pablo Carreno-Busta est l’héritier en 2017 de cette vocation de « terrien », avec une victoire marathon de plus de 4h contre Milos Raonic en 1/8e de finale, lui permettant de défier Rafael Nadal.
La deuxième carte : Se tenir à carreau sur le placement
Des joueurs comme Gael Monfils ou Novak Djokovic sont reconnus comme des as de la glissade.
Le mouvement, adoré par le grand public, est souvent la rampe de lancement de points mémorables. Pour rentrer dans les détails, la capacité à glisser favorise un meilleur placement.
Alors que sur dur, les appuis peuvent se bloquer dans le sol, la terre battue permet au joueur de contrôler son équilibre et de trouver un plan de frappe optimal. L’ocre est ainsi souvent considérée comme un excellent révélateur du niveau physique des joueurs, car les lacunes dans ce domaine ne peuvent pas être masquées par la technique, comme sur gazon. Pas de bluff ici !
Cette surface est aussi appréciée en tennis loisir pour sa caractéristique musculaire, les appuis sont moins brusques et amortissent les chocs, ce qui minimise largement le risque de blessure comme le tennis elbow. La fougue sur dur, la maturité sur terre ?
La troisième carte : Trèfle de plaisanteries avec les effets
Rien ne sert de jouer à plat, les effets tombent à point. L’essence intrinsèque de la terre battue est sa capacité à « prendre les effets » imprimés à la balle. Les frappes liftées présentent alors le double avantage d’un rebond très vif et d’une balle qui s’envole, pouvant devenir incontrôlable pour l’adversaire. Les coups droits de Jack Sock et de Rafael Nadal font ainsi tourner la balle sur elle-même plus de 3 300 fois par minute, entrainant cet effet si dangereux et fatiguant pour l’adversaire. En parallèle, le revers coupé est aussi une alternative technique rendue plus intéressante par la surface.
Au niveau professionnel, il permet outre de varier son jeu de délivrer une balle plongeante, difficile à relever. Kristina Mladenovic et Timea Bacsinszky usent d’ailleurs beaucoup de l’amortie sur ce Roland Garros pour casser à leur avantage le rythme des échanges. Au niveau amateur, ce coup construit le piège d’une balle molle, sans vie, et particulièrement énervante (!) à laquelle c’est à l’adversaire de redonner de la vitesse.
La quatrième carte : Une météo qui tombe à pic
La seule des quatre cartes que joueuses et joueurs ne peuvent pas contrôler. Le facteur
météorologique prend ainsi une importance considérable sur terre battue. Par temps chaud et ensoleillé, la terre battue est sèche, et ainsi beaucoup plus vive. Ces conditions avantagent les attaquants, qui pourront faire le point plus rapidement tant leur vitesse de balle est amplifiée, ainsi que les amoureux du lift qui chercheront un rebond particulièrement haut et capricieux.
A l’inverse, un temps pluvieux et orageux rend la terre battue lourde et grasse. Les balles grossissent au fil des échanges en se remplissant d’eau, perdant alors toute leur vivacité initiale. Un excellent défenseur sera alors presque impossible à déborder.
Alors que l’édition 2016 avait battu des records d’intempéries - pendant une journée entière
tous les matches avaient même été annulés - la quinzaine 2017 a commencé sous une très forte chaleur. Un climat qui amplifie les dominations de Dominic Thiem ou Rafael Nadal, ou encore le lift en coup droit d’Alizé Cornet et le service kické de Samantha Stosur, toutes deux présentes en deuxième semaine des Internationaux de France.
Jeu, set et match !
Arnaud Mahot @ArnaudMahot