Comment bien gérer une balle de match ?

23 mars 2017 à 16:21:09

Comment bien gérer une balle de match ?
Comme Pablo Cuevas, qui a raté deux balles de match avant de perdre au BNP Paribas Open d’Indian Wells, énormément de tennismans ont du mal à maitriser leurs nerfs lors de ce moment chaud. Pourquoi ? Et comment progresser dans ce domaine ?

Comme Pablo Cuevas, qui a raté deux balles de match avant de perdre contre Pablo Carreno Busta en quart de finale du BNP Paribas Open d’Indian Wells, énormément de tennismans ont du mal à maitriser leurs nerfs lors de ce moment chaud. Pourquoi ? Et comment progresser dans ce domaine ?

 

C’est souvent la même histoire. Alors qu’on arrive à ce qui devrait être la fin de la partie, le ou l’un des derniers points, le dernier set, la goutte de stress remplace celle de l’effort et apparait sur le front de celui qui doit conclure. Le bras tremble, les jambes deviennent molles, le rythme cardiaque s’accélère et le cerveau réfléchit beaucoup trop. Résultat : le coup est forcé et la sphère jaune n’atterrit pas où elle devrait. Voilà, une balle de match supplémentaire vient d’être manquée, rejoignant le cimetière des points mal abordés. Car la peur de terminer constitue un mal qui ronge énormément de joueurs dans le monde du tennis, qu’ils soient professionnels ou amateurs, jeunes ou vieux, doués ou non.

 

« Les pensées alternent entre le passé, le présent et le futur »

 

« Ce qui est difficile dans ce sport, c’est de finir le point. De finir le jeu. De finir le set. De finir le match. De finir, quoi, commence Gilbert Sochet, entraîneur de tennis doté d’une certification en psychologie du sport et en préparation mentale. Les émotions n’arrivent pas au début du match, mais quand le résultat approche. C’est là que le mental s’avère hyper important. » OK, mais pour quelle raison ? Si cela semble logique en apparence, pourquoi les muscles répondent moins bien lorsque l’objectif sportif est à portée de main ? Pourquoi le stress intervient alors que le plus difficile est fait ? Tout simplement parce que c’est le moment choisi par les pensées parasites pour s’inviter dans les boites crâniennes. « Les pensées alternent entre le passé, le présent et le futur. De manière naturelle, un joueur qui s’offre une balle de match part dans le futur. Or, s’il se projette vers le futur, c’est foutu. Idem s’il reste dans le passé après avoir loupé sa balle de match, reprend Gilbert Sochet. Mentalement, les meilleurs joueurs du tennis sont ceux qui chassent les pensées du passé et du futur. »

 

Sébastien Tholozan, entraîneur physique fédéral détenteur d’un DU en psychologie positive, qui reconnait avoir lui aussi connu des problèmes lors des balles de match lorsqu’il était sur les courts, confirme : « Ce point est différent des autres parce qu’il est très dur de rester dans l’instant présent quand on l’aborde. Or il faut se concentrer non pas sur le résultat de l’action, mais sur l’action elle-même, et se détacher de l’enjeu pour rester dans le jeu. » Se focaliser sur le point sans penser à ses conséquences positives (une victoire, une coupe à soulever) ou négatives afin d’éviter de jouer petits bras. Rafael Nadal a ainsi déjà expliqué que le plus grand obstacle de sa carrière fut de se maintenir dans cet instant présent sans se projeter vers la victoire ou sans oublier la frustration du point précédent perdu.

 

Comprendre qu’on a le droit de la perdre

 

Dès lors, comment résoudre ce souci ? Dans un premier temps, il faut déjà se montrer lucide et identifier l’ennemi pour le combattre. En clair, s’avouer qu’on a peur. « Prendre conscience de ça, c’est essentiel et pas si aisé. Certains refusent de dire qu’ils sont dans la difficulté», pointe Sébastien Tholozan, alors que son confrère note une certaine évolution depuis quelques temps : « Avoir des discussions là-dessus, c’est devenu très fréquent. Et c’est relativement nouveau. Il y a quinze ans, c’était tabou, tu n’avais pas le droit d’avoir peur. » Lorsque tout est sur la table, le boulot peut commencer. L’objectif est donc de maitriser ses émotions lors d’une balle de match. Et d’essayer de la jouer comme un autre point banal, dans l’idéal. Pour cela, comprendre qu’on a le droit de perdre cette balle de match est indispensable. D’autant que le résultat dépend autant de soi que de l’adversaire, lequel peut très bien sortir un énorme retour ou un service parfait impossible à défendre.

 

Ensuite, à chacun de trouver son truc pour rester concentré et ne pas subir mentalement une balle de match. Avec un objectif : garder son calme et ses nerfs. « La notion de calme est intimement associée à la performance, qui existe peu sous la colère, l’anxiété ou toutes autres émotions liées au résultat. En revanche, le calme est évoqué par tous les grands champions et joue un rôle fondamental », note Sébastien. Différents moyens sont cités par les deux spécialistes pour, toujours, se défocaliser du résultat : respirer, prendre la balle tôt, s’appliquer sur la prise en main de la raquette… Restent les profils sur lesquels les plus perturbés par les moments chauds peuvent prendre exemple. Comme… les enfants et la nouvelle génération, explique Gilbert : « Les adultes ont énormément de mal à ne pas cogiter après une balle de match. Il y a donc un vrai travail d’après-match à faire. Alors que les enfants pleurent une heure puis oublient très vite. Quant aux Nick Kyrgios, Borna ?ori?, Dominic Thiem… Vous avez vu leur détachement ? On a l’impression qu’une balle de match les booste. Parce qu’ils ont compris que le tennis n’est qu’un jeu. » Et qu’on peut donc aussi se faire plaisir sur une balle de match.

 

Par Florian Cadu

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