Quand Zacharie Noah a offert sa première coupe à son fils

11 janv. 2017 à 11:38:13

Pas inscrit à son palmarès, le premier trophée touché par Yannick Noah est la coupe de France de football 1961. Et il le doit à son père Zacharie, défenseur de Sedan, mort le week-end dernier. Histoire d’un passage de relais en forme d’hommage.

Pas inscrit à son palmarès, le premier trophée touché par Yannick Noah est la coupe de France de football 1961. Et il le doit à son père Zacharie, défenseur de Sedan, mort le week-end dernier. Histoire d’un passage de relais en forme d’hommage.

 

Quand on revient sur Yannick Noah, son caractère de winner et sa folle carrière, on oublie trop souvent d’évoquer le rôle pourtant prépondérant de Zacharie, son père. Comme on zappe également de mentionner Sedan, ville de naissance de Yannick et terre de football entre 1955 et 1961. C’est d’ailleurs au ballon rond que Yannick doit son prénom, son papa s’étant lié d’amitié avec Yannick Lebert (ancien joueur emblématique du Club sportif Sedan Ardennes, alors appelé l’Athlétique Sedan-Torcy) et Roger Lemerre (ex-Sedanais également puis vainqueur de l’Euro 2000 en tant que sélectionneur de l’équipe de France) et ayant promis de donner le prénom d’un de ses amis à son premier enfant. Et c’est aussi au ballon rond que Yannick doit son premier titre sportif officieux, à un âge où il a encore du mal à tenir debout.

 

« Je suis devenu footballeur par hasard »

 

Rembobinons la cassette. En mai 1960, date de naissance du futur tennisman désormais connu de tous, Zacharie Noah évolue en première division française de foot avec Sedan en tant qu’arrière latéral, tout en gagnant sa croute en travaillant dans l’usine des Draperies Sedanaises des frères Laurant, également propriétaires du club. « Je suis devenu footballeur par hasard. Je n’en avais pas la vocation, mais je me suis lancé dans l’aventure sans hésiter », remet-il dans le livre La saga Noah : Zacharie, Yannick, Joakim. Pourquoi Sedan ? « À l’époque, Sedan avait la réputation de faire confiance aux jeunes joueurs. Louis Dugauguez leur donnait régulièrement leur chance. Je me suis dit qu’en rejoignant ce club, j’aurais plus rapidement l’opportunité de jouer en première division. Et puis, je crois aussi avoir choisi Sedan car je voulais (…) me retrouver dans un environnement porté sur les valeurs du travail, de l’engagement, de la volonté. Je voulais bosser. Souffrir aussi, sûrement, dans une ville ouvrière, où rien n’est jamais acquis d’avance. J’ai refusé la solution de facilité pour préférer l’option la plus dure. »

 

Abnégation, goût du combat, refus de la fatalité… Des traits de caractère qu’on retrouvera plus tard sur les courts de tennis avec Yannick. Toujours est-il qu’en cette saison 1960-1961, ce dernier ne sait pas prononcer un mot quand son père réalise un super parcours en coupe de France sous les ordres de Dugauguez. Avec ses partenaires de terrain, qui constituent pour la majorité d’entre eux des collègues de boulot, le Camerounais d’origine atteint la finale de la compétition contre Nîmes, après avoir éliminé Toulouse, Strasbourg, Nice ou encore Bordeaux en demie, match lors duquel Noah réalise un sauvetage essentiel (2-2 ap). « J’étais un des seuls de l’équipe qui gagnait sa vie avec le foot et qui ne travaillait pas chez les Laurant, se souvient Thadee Polak. On avait une équipe très complète, avec de bons éléments en attaque capables de faire la différence à tout moment. On était aussi solide défensivement. » Polak sait de quoi il parle : derrière, c’est lui qui tient la baraque en compagnie de Zacharie. Et pour les Sangliers, pas question de se rater dans une épreuve déjà remportée en 1956. « La coupe de France, à Sedan, c’était une tradition, attention. C’était même sacré ! », rigole Guy Hatchi, milieu de terrain à cette époque.

 

Dîner près de la tour Eiffel

 

Le 13 mai 1961, les Verts et Rouges mettent donc le bleu de chauffe et dominent assez facilement les Nîmois devant 40 000 spectateurs au Stade olympique Yves-du-Manoir à Colombes. S’en suit une joie fêtée comme il se doit. « On a été reçu par la mairie de Colombes, qui nous a payés un pot, puis on a célébré ça en allant au restaurant tous ensemble, près de la tour Eiffel, détaille Polak. Après avoir fait un boucan pas possible, on est parti dormir vers trois ou quatre heures du matin, et on rentré à la gare de Sedan le lendemain. » C’est là que le petit Yannick, un an moins quatre jours, fait son apparition. « À notre arrivée, la foule était monumentale, indescriptible. On avait l’impression d’être des stars. Et pour rigoler, on a mis le minuscule Yannick, que mon épouse gardait très souvent et qui nous attendait avec sa mère, dans la coupe. Il était tout petit donc il tenait parfaitement dedans. » Pas encore habitué aux applaudissements, Yannick ne retient pas ses larmes pendant que son paternel et ses coéquipiers paradent en ville avec le trophée. La suite de sa carrière n’est finalement pas si surprenante, quand on sait qu’il est tombé dedans quand il était petit.

 

 

Par Florian Cadu

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