Wimbledon est le temple du tennis. Combien de fois a t-on entendu cette phrase ? Tout le monde la sort à tout bout de champ. La Mecque du tennis, le musée du tennis. Demandez aux joueurs, ils vous le diront, de manière presque unanime d'ailleurs. Par contre, ils ne sauront pas pourquoi.
Pourquoi Wimbledon serait-il plus le temple du tennis que Roland-Garros par exemple ? Qui a décidé que l'US Open ou l'Australian Open devaient être moins prestigieux ? C'est pourtant clair, si vous voulez être dans le ton, alors il faut le dire. Vous imaginez Djokovic dire : « pour moi le temple du tennis c'est clairement l'Open d'Australie ». Scandale ! Et pourtant c'est bien là où Novak a démarré sa campagne de victoires en Grand Chelem.
Mais creusons un peu.
Oui, Wimbledon est le plus vieux des quatre Grands Chelems. Enfin pas de quoi fouetter un chat non plus. Première édition en 1877 quand l'US Open ouvre ses portes en 1881 et Roland-Garros en 1891. Seul l'Open d'Australie voit le jour au XXe siècle (1905).
Peut-être Wimbledon a-t-il résisté aux deux grandes guerres, devenant de facto non seulement le temple mais le fort imprenable du tennis. Loupé. De 1915 à 1918 (inclus) et de 40 à 45 (inclus), pas une balle n'a été jouée à SW19. Pas plus à Londres qu'à Paris ou en Australie d'ailleurs. Seul l'US Open n'a jamais fermé ses portes.
Peut-être que la notion de temple provient du fait que le gazon londonien le différencie des autres. Ça c'est vrai mais au même titre que la terre battue est la signature du tournoi parisien. Qui plus est, jusqu'en 1974, le seul tournoi du Grand Chelem qui se distingue par sa surface différente des trois autres est … Roland-Garros. Les autres se jouent tous sur gazon, Wimbledon compris.
Alors c'est quoi ? J'ai tapé la question dans un moteur de recherche et suis notamment tombé sur un papier du très serieux « Point » qui explique que « Wimbledon est le temple de la tradition tennistique » parce qu'on doit y jouer en blanc, parce qu'on ne joue pas le premier dimanche et qu'on peut y déguster des fraises à la crème. Certes les fruits rouges c'est bon, les polos blancs c'est élégant et les dimanche sont off (sauf quand il pleut trop, auquel cas le Sunday-Off devient plus On que jamais), mais de là à décerner le label de « temple » à un tournoi du Grand Chelem, il faudra m'expliquer.
Non franchement je ne vois pas. Ah si, j'ai peut-être une explication. Le branding. Et ça il est indéniable que la marque Wimbledon a su mieux se vendre par le passé. Alors que les autres Grands Chelems étaient plus discrets, les Anglais ont entretenu leur mythe avec insistance et notamment avec leur auto-baptême de « the championships ». Et pour déloger l'image d'une marque établie depuis plus de cent ans : bon courage.
Cependant, je mets au défi qui que ce soit de me trouver un argument valable accordant le statut de temple du tennis à Wimbledon que je ne pourrais pas utiliser pour dire que Roland-Garros ne l'est pas tout autant … si ce n'est plus.
Alors de grâce, mesdames messieurs les joueuses et joueurs, journalistes, fans, spectateurs du dimanche (on ou off), évitez le panurgisme. N'ayez pas peur d'avoir vos propres opinioins.
Je le dis donc haut et fort, et qui m'aime me suive : le temple de du tennis, c'est Roland-Garros.