Marcelo Rios, le diable chausse des tennis

25 sept. 2012 à 18:55:14

Unanimement considéré comme le plus grand bad boy de l’histoire du tennis moderne, le Chilien Marcelo Rios, éphémère numéro un mondial en 1998, était aussi un joueur surdoué. Handicapé par un corps trop fragile et...

Unanimement considéré comme le plus grand bad boy de l’histoire du tennis moderne, le Chilien Marcelo Rios, éphémère numéro un mondial en 1998, était aussi un joueur surdoué. Handicapé par un corps trop fragile et une attitude perpétuellement désinvolte, il a été contraint d’arrêter prématurément sa carrière sur un sentiment d’inachevé. Récit.

  « Marcelo Rios ? C’est le plus gros enfoiré que j’ai jamais rencontré. Quand un gars refuse de signer des autographes à des gamins, c’est un enfoiré et un idiot. Il ne mérite pas d’être numéro un mondial. Je n’ai pas pour habitude de dire du mal des autres mais pour lui je ferai une exception. » Ilie Nastase n’y va pas par quatre chemins. Interrogé par Scoop Malinowski, auteur de la seule biographie dédiée à Marcelo Rios*, l’ex-champion roumain est catégorique quant à la personnalité de celui qui fut numéro 1 mondial six semaines durant en 1998. Il est loin d’être le seul à partager cet avis. John McEnroe par exemple l’avait un jour traité de « petit con », tandis que le très respecté magazine américain Sports Illustrated avait titré un article le concernant  « L’homme le plus détesté du tennis ». Carrément.  
« Ça ne me rembourse même pas l’argent que j’ai dépensé au Casino. »
  Comment a-t-il pu en arriver à être considéré de la sorte ? Pour essayer de comprendre, il faut remonter aux origines. Issu d’un milieu relativement aisé de Santiago, Marcelo Rios se révèle vite très doué pour le tennis, un sport qu’il pratique dans un prestigieux établissement privé de la capitale chilienne. Petit génie de la balle jaune, il passe pro en 1994 à 18 ans, malgré les doutes d’un père sévère, qui exige rapidement des résultats. Il les aura au-delà de ses espérances. Intégrant le top 100 dès sa première année sur le circuit ATP, « El Chino » comme on commence à l’appeler, conquiert ses premiers titres dès 1995. Tout est presque trop facile pour lui, alors il commence à se montrer arrogant, que ce soit vis-à-vis de ses adversaires, des journalistes et même de ses propres supporters, qu’il considère avec dédain. « Il était fait pour jouer au tennis, pas pour tout ce qu’il y a autour, ce qui ne veut pas dire qu’il était insensible », tente de justifier l’Argentin Hernán Gumy, à l’époque l’un de ses seuls amis sur le circuit.   A l’issue de sa première grande victoire de prestige à Monte Carlo en 1997, Rios provoque, déclarant lors de la remise du chèque promis au vainqueur : « Ça ne me rembourse même pas l’argent que j’ai dépensé au Casino dans la semaine. » De 1996 à 1999, le Chilien conquiert quatre Prix Citron consécutifs à Roland Garros, récompensant le joueur le plus désagréable de la compétition. Un record ! Marcelo Rios agace autant hors du court qu’il régale raquette en main. En mars 1998, après ses deux superbes victoires acquises successivement aux tournois d’Indian Wells et de Key Biscayne, il s’empare de la place de numéro 1 mondial, une première pour un joueur sud-américain. Au journaliste venu recueillir sa joie de rejoindre l’illustre Guillermo Vilas au panthéon des tennismen du continent, il répond sèchement : « Vilas ? Qui c’est, Vilas ? Il n’a jamais été numéro un. »   Le gros cul de Monica Seles Ainsi était Marcelo Rios, un génie doté d’un affreux caractère, qui poussera la goujaterie jusqu’à traiter Monica Seles de « gros cul ». Cette méchanceté du quotidien lui coûtera certainement quelques victoires, comme en atteste Scoop Malinowski : « A cause de son attitude hors du court, certains adversaires étaient sur-motivés au moment de l’affronter. Carlos Moya m’a par exemple avoué avoir disputé le meilleur match de sa carrière quand il le bat en quart de finale à Roland Garros en 1998, l’année où il l’emporte. » C’est le malheur de Rios : il ne réussira jamais à remporter un seul tournoi du Grand Chelem, alors qu’il aurait pu « en gagner dix », estime Marat Safin.   « En talent pur il avait les moyens de gagner un Grand Chelem, mais peut-être n’avait-il pas les capacités physiques pour disputer sept matchs de suite en trois sets gagnants durant deux semaines », nuance le biographe. Son modeste gabarit – 1,75 m, 63 kg à son meilleur – lui a joué des tours, tout comme son impatience sur le court. Surdoué, Marcelo Rios n’a peut-être pas non plus été assez exigeant vis-à-vis de lui-même pour se hisser longtemps au niveau des meilleurs. « Il avait les capacités d’un champion mais il ne donnait pas l’impression de faire le nécessaire pour l’être. » Retraité une première fois en 2003 puis en 2007 après une vaine tentative de come-back, l’ex-enfant terrible du circuit ATP est depuis retourné au pays, travaillant avec son père dans un business de construction. Avec la pierre au moins, pas besoin de signer des autographes.   Par Régis Delanoë   * Marcelo Rios: The man we barely knew

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