Capitaine de l’équipe de France de Coupe Davis par BNP Paribas à deux reprises, Yannick Noah a officialisé la semaine dernière son retour pour un troisième tour de piste. Une surprise ? Pas vraiment. Il existe chez le Français un léger appétit pour la marche arrière, les retournements de situation et autres contradictions. Un être humain, en somme. Fois cinq.
1/ « J’éprouvais une sorte de frustration »
Capitaine de Coupe Davis par BNP Paribas entre 1991 et 1992, avec pour climax un saladier d’argent glané dès sa première année, Yannick Noah revient aux affaires trois ans plus tard, en 1995. L’origine de ce retour sur le banc : un malaise diffus. « Depuis que j'avais arrêté de faire partie du jeu, j'éprouvais une sorte de frustration qui n'a cessé de grandir, explique-il alors dans Tennis de France à l’époque. Il suffisait que dans un dîner les mots ‘tennis’, ‘équipe de France’, ou ‘Coupe Davis’ surgissent pour que ça m'énerve. » Pour assoir sa crédibilité, Noah perd neuf kilos : « Je ne peux pas me concevoir gros, assis au bord du court à dire aux gars : ‘Allez, bougez-vous le cul !’ » Résultat : il récidive en 1996 avec Cédric Pioline, Guillaume Raoux, Guy Forget et Arnaud Boetsch en donnant la victoire à la France en finale contre la Suède. En septembre 1998, Noah se retire de nouveau. Le projet de la direction technique nationale de lui donner non seulement les clés des deux équipes de France (Coupe Davis par BNP Paribas et Fed Cup par BNP Paribas) mais aussi des équipes de jeunes est trop contraignant. « C'était intéressant, concède-t-il dans l’Equipe. Mais ça supposait que je passe au minimum trois mois en France. Dans le contexte actuel, ce n'était pas possible. J'ai choisi une autre vie ». Outre-Atlantique.
2/ Basket, Yvelines et duplex trois chambres
À cette époque, Noah vit en effet depuis plusieurs années à New-York. Ses deux premiers enfants, Joakim et Yelena, sont nés là-bas. Après quelques retours aux sources, Noah se réinstalle définitivement dans la Big Apple en 2008 pour se rapprocher de Joakim qui entame une carrière en NBA, le championnat américain de basket, et « reconstituer sa famille, rassembler tout le monde, avoir du temps », confesse-t-il dans Femme Actuelle. Un an plus tard, il quitte de nouveau New-York. Un 17 juin, date de la fin de l’année scolaire de ses enfants au lycée français de la ville. Direction les Yvelines, où Yannick possède une maison en pleine campagne. Un souci ? « Je vais devoir me lever à 4 heures du mat’ pour regarder mon fils jouer au basket. » Aujourd’hui, le Français a même mis en vente son appartement new-yorkais acheté en 1995, un duplex avec trois chambres, un W.C indépendant et une vue imprenable sur Central Park. Valeur : 8 millions d’euros. Une affaire.
3/ « C’était par peur du lendemain »
Juin 2012. Une commission d’enquête du Sénat se penche sur un sujet aussi vaste qu’épineux : l’évasion fiscale. Pour ce faire, les Sages ont la bonne idée d’auditionner Yannick Noah. Qui, entre 1991 et 1993, s’est dérobé en Suisse avant de revenir payer ses impôts en France. Un come-back fiscal qui lui a toujours collé aux chaussettes. Si Noah est parti de chez lui, « c’était par peur du lendemain », explique-t-il alors devant ce parterre de hauts fonctionnaires. Avant de remettre les pendules à l’heure : « J'ai eu un petit moment de doute après ma carrière. J'ai fait ça pour faire des économies. Depuis, je suis revenu en France. Je suis là depuis près de 20 ans. Pendant toute ma carrière de joueur de tennis, j'étais fiscalement en France. » Passé du côté des intermittents du spectacle, Noah sait très bien dans quelle cour il joue : « Maintenant, si j’étais une vedette internationale et que je gagnais aux Etats-Unis cinquante fois plus, est-ce que j'aurais envie de payer mes impôts ici ? Certainement pas. […] Je ne vais pas conseiller à mon fils qui a fait toute sa carrière aux Etats-Unis de venir payer 75% ici, ce serait aberrant. » Silence dans la salle. Et de souffler : « J'ai trop parlé. »
4/ « En fait, je crois qu’il vaut mieux rester »
Durant sa carrière de chanteur, Yannick Noah n’a jamais eu de mal à vendre des disques. Mais l’année dernière, l’artiste a connu quelques difficultés. Son dernier album, Combats ordinaires, n’a pas rencontré le succès escompté, et il a du mal à vendre ses places de concerts. Pourquoi ce désamour soudain ? « Je pense que j'ai dû faire quelques boulettes, prendre des positions qui n'ont pas forcément été entendues ou comprises. » Noah juge que ses engagements politiques – en faveur de François Hollande lors de la dernière campagne présidentielle, et plus récemment contre le Front national – n’ont pas joué en sa faveur. En 2005 déjà, dans un entretien à l’hebdomadaire Paris Match, il assurait : « Une chose est sûre, si jamais Sarkozy passe, je me casse ». Pris au mot, il déclara dans le Parisien du 13 octobre 2006 avoir « dit ça sur le coup » avant d’ajouter « en fait, je crois qu'il vaut mieux rester ». Plus qu’un come-back, une marche arrière.
5/ Avion, oseille et préparation psychologique
Comme son père Zacharie, ancien footballeur professionnel, Yannick est un fou de ballon rond. À tel point qu’en 1996, alors que le club du Paris Saint-Germain prépare la finale de la Coupe des Coupes, la direction du club engage pour l’occasion et quelques jours l’ancien tennisman en tant que préparateur mental. Coïncidence ou non, le PSG remporte sa première et unique coupe d’Europe. Une bonne expérience ? « Evidemment, mais je ne mettrai plus un pied dans le football, c’est un milieu trop bizarre pour moi », lâchera-t-il dans la foulée. Evidemment, Noah remet le couvert comme « préparateur psychologique » de l’équipe nationale de football du Cameroun, en 2005. Une bonne expérience ? « C'est mon cousin qui était ministre des Sports. Il décidait du staff. Je voulais bien venir sur certains matchs et je lui avais dit : ‘je viens bénévolement, je paye mon avion, mon hôtel’ », clarifie-t-il en 2010 au Parisien. On manque la qualif’ pour le Mondial 2006 sur un penalty raté. Là-dessus, il y a la Coupe d’Afrique des nations. J'étais en concert. Il y a un truc qui sort comme quoi pendant la CAN, j'avais pour 125 000 € de frais. Je n'y étais pas. En fait, mon cousin avait pris de l'oseille sur mon dos. » Bilan des courses : « Il n'est plus ministre… »