Mort pour l’exemple

29 mars 2017 à 16:26:44

Mort pour l’exemple
Si un iguane vient de connaitre son heure de gloire à Miami, il ne fait pas toujours bon s’inviter sur un court de tennis pour les animaux. En témoigne le décès d’un oiseau en 2002, percuté par une frappe de Michael Llodra. Retour sur cet épisod

Si un iguane vient de connaitre son heure de gloire à Miami, Tommy Haas s’étant offert un selfie avec lui en plein match, il ne fait pas toujours bon s’inviter sur un court de tennis pour les animaux. En témoigne le décès d’un oiseau en 2002, percuté par une frappe de Michael Llodra. Retour sur cet épisode.

 

« La semaine dernière, un petit m’a encore demandé : ‘C’est toi qui a tué l’oiseau ? C’est toi qui as tué l’oiseau ?’ On m’en parle tout le temps. Plus souvent que le premier titre de Roger Federer gagné contre moi. Cette anecdote, totalement inattendue et hors du commun dans l’univers du sport, dépasse largement les frontières du tennis. Tu sais qu’elle ne t’arrivera qu’une fois dans ta vie. » Julien Boutter n’a pas peur de le dire : ce qu’il a vécu lors de la demi-finale de double de l’Open d’Australie 2002 reste exceptionnel. Et la probabilité de revoir prochainement une scène identique demeure très faible.

 

Avant de décrire l’action en elle-même, il faut poser le contexte. La demi-finale en question, 100 % française, oppose la paire Fabrice Santoro-Michael Llodra au duo Arnaud Clément-Boutter. La partie se déroule durant la nuit, les papillons sont piégés par les lumières du court et leurs dépouilles attirent régulièrement les hirondelles trop gourmandes. Sauf que lorsque l’une d’elles traverse le terrain un peu trop bas du sol, Llodra, lui, est en train de frapper. Le drame survient alors : sur le chemin de l’animal volant, la balle le tape de plein fouet. Sous les yeux de Clément et Boutter, montés au filet. « Là, tu es complètement désorienté pendant quelques millièmes de secondes, rembobine ce dernier. Llodra frappe, on se prépare à retourner… et d’un coup, le jeu s’arrête. Tu te dis ‘Qu’est-ce qu’il se passe, au juste ?’ Et puis, tu comprends très vite. Tu vois la balle changer de trajectoire et un oiseau partir de l’autre côté. » 

 

Une prière pour le défunt

 

Le pauvre vertébré ailé s’écrase par terre, inanimé. « On a tout de suite compris qu’il était mort », ne cache pas Boutter, qui porte la main à sa bouche en signe d’effroi et accourt directement vers le cadavre suite au coup fatal. Après une rapide confirmation observationnelle, le joueur s’agenouille devant le défunt, pose sa raquette, mime une prière et se signe sous les applaudissements du public, avant de réclamer gestuellement une civière aux responsables. Sans oublier de traiter Llodra d’ « assassin ». « Sur le ton de la plaisanterie, hein, sans aucune animosité ! On avait d’ailleurs l’habitude de jouer ensemble à cette période. »

 


 

 

N’empêche, tout ce cérémonial n’a pas comme unique intérêt de faire rire les spectateurs. Loin de là. Car en réalité, Boutter est un amoureux de la nature et ne trouve donc pas ça si drôle. « Une bonne partie de mon éducation provient de la ruralité. Et la sensibilité de la faune et la flore est quelque chose d’ancrée à ma famille, explique l’actuel directeur du tournoi de l'Open de Moselle. C’est con à dire, mais quand j’étais gamin, on prenait soin des animaux chez nous. Je ne compte pas le nombre de fois où on récupérait les animaux blessés pour essayer de les soigner. Mettre des mangeoires dans le jardin l’hiver, c’est une habitude. »

 

Dès lors, le décès du moineau pourrait-il expliquer en partie la défaite du clan Boutter (3-6, 6-3, 10-12) ? Possible selon le principal intéressé, même s’il dit ne plus y avoir pensé après ce point à rejouer. « En général, comme pour toute autres interventions x ou y, l’incident est bénéfique pour ceux qui sont menés. Là, on était devant avec Arnaud, et puis il y a une sorte de rupture avec l’épisode de l’oiseau. Et on perd le match. On a pu lâcher dans la tête, consciemment ou inconsciemment. » Une raison supplémentaire pour qualifier cette épisode de «triste à vivre ». Pas au point de pleurer devant les  zappings de fin d’année qui repassent inlassablement la vidéo, mais suffisamment pour espérer ne plus assister à nouveau à ce genre de situation.

 

 

Par Florian Cadu

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